(Montréal) Le front commun intersyndical du secteur public passe à l’acte : dès la semaine prochaine, il commencera à consulter ses 420 000 membres sur un mandat de grève pouvant aller jusqu’à la grève générale illimitée.

Le mandat prévoit cependant qu’avant d’en venir à une grève illimitée, le front commun aura recours à des coups de semonce, des « séquences » de grève. Il pourra par exemple s’agir de journées de grève, prises isolément ou en groupe. Tout dépendra du déroulement de la négociation avec le gouvernement du Québec.

Mais le front commun exclut une grève qui ne toucherait qu’un secteur à la fois, comme l’éducation seulement ou la santé seulement. « C’est essentiel pour le front commun : premièrement, de montrer l’unité du front commun et, deuxièmement, de montrer que les grèves vont être nationales, donc dans tous les secteurs d’activités qu’on représente », a précisé en entrevue François Énault, vice-président de la CSN.

La tenue de toutes ces assemblées générales s’étendra du 18 septembre au 13 octobre. Cela concerne les membres du front commun des secteurs public et parapublic, soit ceux de la CSN, de la CSQ, de l’APTS et de la FTQ.

« On n’a pas le temps de niaiser, là. Il faudrait négocier rapidement. C’est pas le cas. Alors il faut mettre de la pression. Mais on a bon espoir, quand même, que dans les prochaines semaines, les prochains mois, quelqu’un va nous entendre et qu’on ne se rende pas là. Mais on se rendra où c’est nécessaire d’aller pour avoir des bonnes conditions de travail », a lancé en entrevue Éric Gingras, président de la CSQ.

Si une grève venait effectivement à être déclenchée, les services essentiels seraient assurés. Les syndicats se sont engagés à respecter toute décision du Tribunal administratif du travail en ce sens.

9 % contre 21 % et 30 %

Les négociations des organisations syndicales avec le Conseil du trésor et les ministères concernés durent depuis des mois. Les demandes syndicales avaient été déposées l’automne dernier et l’offre de Québec en décembre. Les conventions collectives sont échues depuis le 31 mars dernier.

La présidente de la FTQ, Magali Picard, rapporte que ses membres sont exaspérés et même « insultés » de l’offre gouvernementale, qui est restée depuis décembre 2022 à 9 % sur cinq ans, avec un montant forfaitaire de 1000 $, malgré le contexte inflationniste actuel.

Mme Picard parle d’« arrogance » de la part du gouvernement Legault et se demande s’il n’agit pas ainsi parce que le secteur public compte surtout des femmes. « On a le droit de se questionner. Comment ça se fait que le même employeur, le gouvernement, reconnaît que lui a droit à 30 % [d’augmentations], que la Sûreté du Québec a droit à 21 %. Et, pendant ce temps-là, à 420 000 travailleurs sous sa gouverne, qui représentent 78 % de femmes, on leur offre 9 % ? » s’insurge Mme Picard.

« On est vraiment dans un dialogue de sourds où, publiquement, on dit qu’on se parle. C’est vrai qu’on se parle. Mais, concrètement, à la table, on ne parle que des solutions du gouvernement, qui sont de garder les gens plus longtemps au travail, en modifiant les règles du régime de retraite, et en augmentant le nombre d’heures par semaine pour certains corps d’emploi », a critiqué à son tour le président de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), Robert Comeau.

Les syndiqués aussi ont des solutions à proposer aux problèmes vécus dans les réseaux et ils veulent aussi en parler, ajoute M. Comeau.

La présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, a réagi dans une brève déclaration envoyée lundi matin sur X (anciennement Twitter).

« Pour négocier adéquatement, il faut avoir des bases valides : contrairement à ce que le Front commun prétend, le salaire moyen de ses membres n’est pas de 44 000 $, mais bien de 61 000 $ pour les travailleurs à temps complet », a-t-elle soutenu.