(Ottawa) Le gouvernement fédéral doit se doter de critères plus objectifs pour définir les armes d’assaut afin d’éviter d’englober certaines armes de chasse, selon la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs. L’interdiction des armes d’assaut ajoutée au projet de loi C-21 l’automne dernier avait semé la confusion et le gouvernement avait finalement dû reculer. Il compte revenir à la charge après une série de consultations.

« On n’en veut pas d’armes d’assaut, on n’a pas besoin de ça personne. Ça, on ne s’y oppose pas. On s’oppose plutôt au libellé, la façon dont c’est fait », a plaidé le président de la Fédération, Marc Renaud, en entrevue.

Le gouvernement s’était mis à dos les chasseurs l’automne dernier en tentant d’élargir la portée du projet de loi C-21 qui visait au départ à interdire les armes de poing. Il avait déposé deux amendements après les consultations en comité parlementaire, ce qui avait causé une levée de boucliers. Le premier ajoutait des spécifications à la définition d’arme à feu prohibée et l’autre dressait une liste d’environ 300 pages de modèles qui auraient été interdits. Certaines armes utilisées pour la chasse s’y trouvaient.

« On n’est pas la bonne cible », a déploré M. Renaud. La Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs s’est opposée à ces amendements. Elle a rencontré le ministre de la Sécurité publique en janvier pour tenter d’obtenir des réponses à ses questions et a fait part de son point de vue en comité parlementaire mardi. Les amendements retirés en février font tout de même l’objet d’une nouvelle consultation au Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.

M. Renaud estime que la liste mise de l’avant par le gouvernement n’avait pas été élaborée à partir de critères objectifs. « Il y a un critère d’esthétique, a-t-il déploré. Il y a une arme à feu mise dans la liste à cause de la façon dont la crosse est faite. On dirait peut-être une arme militaire, mais en fait c’est un calibre 20. Une arme utilisée à la chasse pour le petit gibier, le lièvre même la sauvagine. »

Il propose que le gouvernement fasse d’abord la distinction entre les armes de poing et d’épaule dans sa définition avant de considérer d’autres critères comme le mécanisme de chargement ou la capacité du chargeur.

Si on s’entend sur ce qu’est une arme d’assaut, on n’aura pas à travailler à partir de listes.

Emily Vallée, coordonnatrice aux communications de la Fédération québécoise des chasseurs lors de son témoignage, mardi

Elle s’est dite d’accord avec la nouvelle façon de catégoriser les armes proposée par le professeur au cégep de Trois-Rivières, Francis Langlois, qui est également membre de l’Observatoire sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand. Il suggère de les classer en fonction de leur maniement et de leur mécanisme de tir. Elles pourraient ensuite être regroupées en sous-catégories, selon leur type et leur calibre par exemple. « Il sera ainsi plus logique d’interdire certaines plutôt que d’autres », a-t-il indiqué par courriel mercredi.

Lors de son témoignage en comité parlementaire le 17 février, il avait précisé que le gouvernement devrait éviter la multiplication des listes pour éviter que certains modèles soient retirés advenant un changement de gouvernement. Une liste enchâssée dans la législation ne pourrait pas être mise à jour régulièrement vu la lourdeur du processus parlementaire, donc la Gendarmerie royale du Canada devrait en tenir une autre pour ajouter les nouveaux modèles fabriqués par l’industrie qui seraient interdits.

« S’il faut qu’il y ait une liste, il faut qu’il n’y en ait qu’une seule pour tout le monde, avait-il affirmé. De cette façon, on éviterait les ambigüités et la confusion. »

Le groupe PolySeSouvient, qui milite pour une interdiction des armes d’assaut depuis le féminicide de masse de l’École Polytechnique en 1989, demande à la fois une « définition globale et permanente » des armes d’assaut et une liste.

« Il y a des armes d’assaut qui ont différents mécanismes et qui peuvent seulement être répertoriées au moyen d’un processus de cas par cas dans le cadre duquel on regarde les caractéristiques militaires », avait souligné la coordonnatrice de PolySeSouvient, Heidi Rathjen, en comité parlementaire le 14 février.

Cette nouvelle ronde de consultation se termine vendredi. De son côté, le ministre Mendicino multiplie les rencontres depuis décembre avec divers groupes représentant les communautés autochtones, les chasseurs, les policiers et les familles de victimes. Il compte ensuite revenir à la charge. Une interdiction des armes d’assaut a déjà été imposée par décret en 2020, mais les libéraux avaient promis de la durcir dans une législation lors de la dernière campagne électorale.