Un sachet de drogue dans un casseau de framboises, une veuve noire dans une grappe de raisins, une balle de fusil dans un rôti de bœuf : de 2018 à 2021, le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) a reçu environ 800 plaintes pour des « corps étrangers » retrouvés dans la nourriture. Des objets parfois étonnants, toujours peu ragoûtants.

La majorité des plaintes fondées

Environ les trois quarts des plaintes déposées au MAPAQ entre octobre 2018 et octobre 2021 pour présence de « corps étrangers » ont été considérées comme « fondées », révèle la réponse à une demande d’accès à l’information de La Presse. Une plainte est considérée comme étant fondée « lorsque les constatations de toute nature : analyses, éléments vérifiables en inspection ou enquêtes, démontrent que la plainte est plausible ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire que l’objet de la plainte est justifié », précise Mélissa Lapointe, porte-parole du MAPAQ. Les plaintes reçues vont de la présence d’insectes, de cheveux ou de pansements à des objets plus dangereux comme des clous, des boulons ou du verre. « Ce genre de signalement est rare et inhabituel au MAPAQ », précise toutefois Mme Lapointe au sujet des objets qui posent un risque de blessure.

Piqûre d’araignée

La présence d’insectes et autres arthropodes dans la nourriture est un motif très fréquent de plainte, mais parfois, elle engendre plus qu’une perte d’appétit. En février 2019, une femme contacte le centre antipoison après avoir été piquée par une araignée qui se trouve dans ses raisins achetés dans une épicerie de Port-Cartier. Elle est hospitalisée pour « paralysie à la jambe », est-il écrit dans un tableau synthèse préparé par la Direction générale de l’inspection et du bien-être animal. Le centre antipoison demandera alors au MAPAQ d’identifier l’espèce. Selon l’analyse de l’ADN, le spécimen appartient à l’espèce Steatoda bipunctata. La morsure de cette araignée, qui est établie au Québec, peut « être douloureuse et son intensité se rapproche de celle d’une piqûre de guêpe ». Cependant « elle n’est pas considérée comme dangereuse », indique le rapport d’analyse. Questionné sur cet évènement, le MAPAQ a répondu que bien cette plainte ait été « déclarée fondée », on ne peut « pas affirmer que la piqûre de l’insecte est à l’origine de la paralysie de la femme ».

Une veuve noire à l’épicerie

Une araignée venimeuse – la veuve noire – a aussi été découverte par un employé d’une épicerie de Shawinigan en juin 2019 au comptoir de fruits et légumes. L’araignée se trouvait sur des raisins rouges provenant du Mexique. Le spécimen de 6 mm a été envoyé au Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection du MAPAQ. « Selon les critères observés, l’araignée présente dans l’échantillon appartient à l’espèce Latrodectus hesperus, communément appelée la veuve noire de l’Ouest […] On la retrouve fréquemment dans les raisins », souligne le rapport obtenu grâce à la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Heureusement, personne n’a été mordu par l’araignée.

Drogue et balle de fusil

Une personne vivant dans la région de Québec a découvert, en mai 2019, un « sachet de cristaux » dans un casseau de framboises provenant du Mexique. La Sûreté du Québec est intervenue dans le dossier, mais un échantillon a tout de même été envoyé dans un laboratoire du MAPAQ. Une analyse a été menée par un chimiste avec la technique de la spectrométrie de masse. « Le spectre de la substance principale aurait une grande similitude avec le spectre de la méthamphétamine, avec quelques impuretés », conclut le rapport d’analyse. Le mois précédent, en avril 2019, une femme a fait une découverte tout aussi surprenante, dans le rôti de bœuf qu’elle venait d’acheter dans une épicerie montréalaise : une balle de fusil. Conclusion de la plainte ? Fondée. « Oui, c’est effectivement ce qui a été constaté, sans nécessairement déterminer les causes ou la responsabilité », a souligné Mme Lapointe.

Du verre dans de la crème glacée

En mai 2020, un homme de la région de Québec s’est rendu aux urgences d’un hôpital après avoir subi une coupure à la langue en mangeant de la crème glacée. Trois morceaux de verre transparent ont été retrouvés dans le contenant. Le plus gros mesurait 28 mm sur 15 mm sur 1 mm d’épaisseur. « Ces morceaux de verre sont coupants et ne sont pas facilement détectables dans l’aliment. La présence de ce corps étranger dans un aliment pourrait représenter un risque élevé pour la santé humaine », conclut le rapport d’analyse. En juin 2021, une femme de Belœil a aussi dû se rendre à l’hôpital pour faire retirer un fil de fer de 1 cm qui s’était incrusté dans sa langue après qu’elle eut mangé une pizza. Les inspecteurs du MAPAQ ont visité le restaurant et constaté que la pelle métallique utilisée pour sortir les pizzas du four était abîmée.

Que faire après une telle découverte ?

Lorsqu’une personne découvre un corps étranger dans un aliment, que devrait-elle faire ? « Il est préférable de communiquer le plus rapidement possible avec le MAPAQ. Toute plainte relative à un aliment ou à un établissement alimentaire qui est transmise au MAPAQ est traitée, qu’elle soit anonyme ou non », affirme Mélissa Lapointe. « Nous demandons aussi à la personne plaignante de conserver le corps étranger, si possible, et le produit intact, si possible. Par la suite, le produit est prélevé au domicile et acheminé au laboratoire pour analyse », ajoute-t-elle. Si nécessaire, le MAPAQ procédera ensuite à un rappel. Dans tous les cas où la santé de la population est mise en cause, dit-elle, un communiqué est publié pour aviser les gens de ne pas consommer l’aliment.