L’état du réseau de distribution d’électricité d’Hydro-Québec (HQ), dont la fiabilité est en « baisse marquée », selon un récent rapport de la vérificatrice générale, n’est pas en cause dans les centaines de milliers de pannes causées par la tempête hivernale, estime sa présidente-directrice générale, Sophie Brochu.

« Ce qu’on a vécu n’a rien à voir avec […] la vétusté du système d’HQ […]. N’importe quel équipement, devant des vents de 120 km/h, serait dans la même situation. On est aux prises avec une situation météorologique extrême », a-t-elle précisé lors d’un point de presse, lundi en fin d’avant-midi.

Depuis vendredi, pas moins de 600 000 clients d’Hydro-Québec ont été privés d’électricité durant des périodes plus ou moins longues en raison d’une tempête hivernale d’une rare ampleur qui a frappé le sud du Québec. Lundi soir, plus de 40 000 clients étaient toujours plongés dans le noir.

Plus de 40 000 clients toujours privés d’électricité à 22 h 30 lundi

  • Capitale-Nationale : 12 284 clients sans électricité sur 438 203
  • Saguenay–Lac-Saint-Jean : 8152 clients sans électricité sur 133 935
  • Côte-Nord : 6545 clients sans électricité sur 48 699
  • Laurentides : 3271 clients sans électricité sur 365 812
  • Mauricie : 6284 clients sans électricité sur 169 325
  • Outaouais : 975 clients sans électricité sur 226 120
  • Montérégie : 562 clients sans électricité sur 813 432
  • Estrie : 389 clients sans électricité sur 94 022
  • Montréal : 194 clients sans électricité sur 1 083 243
Consultez le site d’Hydro-Québec pour obtenir le plus récent bilan par région

La situation a soulevé des interrogations dans la population quant à l’état du réseau de distribution d’électricité d’Hydro-Québec et à sa fiabilité lors d’évènements météorologiques extrêmes. Pas plus tard que l’été dernier, un épisode de vents violents avait également privé 550 000 clients québécois d’électricité.

Lisez « La tempête du 21 mai aura coûté 70 millions à Hydro-Québec »

La fiabilité en baisse

Dans un rapport publié début décembre, la vérificatrice générale du Québec, Guylaine Leclerc, constatait qu’Hydro-Québec « n’est pas outillée adéquatement pour faire face au défi grandissant du vieillissement de ses actifs ». Conséquence : la fiabilité de son service de distribution d’électricité présente une « baisse marquée ».

Lisez « Hydro-Québec est de moins en moins fiable »

Pour réduire les pannes de son réseau de distribution, Hydro-Québec a prévu un plan en 2020 dont le coût de mise en œuvre était estimé à 800 millions de dollars. Ce plan ne tient pas compte d’aspects importants, et les résultats atteints en 2021 étaient « bien en deçà des attentes », dénonçait toutefois Guylaine Leclerc dans son rapport.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

La présidente-directrice générale d’Hydro-Québec, Sophie Brochu

Bien qu’elle « ne minimise pas » ce rapport, la PDG d’Hydro-Québec juge toutefois que le réseau n’aurait pas pu sortir indemne de la « situation météorologique extrême » à laquelle il a été confronté durant le temps des Fêtes.

Rétablis d’ici mercredi

Hydro-Québec entend faire un bilan de l’évènement, comme elle l’a fait à la suite du dérécho de mai dernier. « Ce qu’on vit aujourd’hui, c’est quelque chose de pan-Québec, et si on en croit l’évolution des changements climatiques, on peut s’attendre à [le] revivre », a-t-elle expliqué.

La société d’État a doublé ses dépenses pour effectuer des « contrôles de végétation » depuis 2021, a rappelé Sophie Brochu. Si Hydro-Québec effectuait auparavant entre 50 et 60 millions de ces interventions destinées à protéger ses lignes électriques de la chute de branches d’arbres chaque année, elle en fait maintenant de 100 à 120 millions.

Elle aimerait d’ailleurs en faire plus, mais « l’accès à la main-d’œuvre » limite son pouvoir d’action, dit Sophie Brochu. « C’est certain que lorsqu’on est capable de contrôler la végétation, il y a moins de chances d’avoir [à subir] des branches d’arbres qui tombent. Maintenant, ce qu’on a dû beaucoup subir [durant cette tempête hivernale], ce ne sont pas des branches d’arbres, mais des arbres complets qui sont tombés », a-t-elle ensuite déploré.

En attendant, Hydro-Québec prévoit avoir rétabli l’électricité chez « la très grande majorité » de ses clients d’ici mercredi. C’est du moins ce qu’a annoncé lundi la directrice principale des opérations et de la maintenance d’Hydro-Québec pour le Centre-du-Québec, Julie Sbeghen, en conférence de presse virtuelle.

Les pannes qui demeureront après mercredi sont les plus complexes ou les plus éloignées, Hydro-Québec préférant donc ne pas donner d’échéance dans leurs cas.

Au bord de la catastrophe

À Saint-Raymond, dans la région de Portneuf, où la tempête a frappé fort vendredi dernier, on ne s’attend pas à retrouver entièrement le courant de sitôt.

Joint par La Presse lundi, le maire Claude Duplain a déploré être resté sans nouvelles des équipes d’Hydro-Québec pendant plus de 24 heures après la tempête, au moment où le village entier était plongé dans le noir.

La municipalité de 11 200 résidants a depuis ouvert les portes de son centre multifonctionnel, où les citoyens peuvent venir se réchauffer, la Croix-Rouge est intervenue pour prendre en charge des sinistrés, et la moitié des foyers ont pu être reconnectés au réseau.

« Si on n’avait pas eu finalement de la chaleur, je ne sais pas ce qui serait arrivé. Je n’ose pas dire qu’on aurait perdu des vies, mais on était sur le bord de la catastrophe », a-t-il raconté. Claude Duplain donne en exemple le cas d’une femme de 92 ans ayant dormi pendant deux jours dans sa voiture en compagnie de sa fille pour pouvoir se réchauffer.

L’élu appelle à une révision du processus de communication d’Hydro-Québec avec les petites municipalités lors d’évènements météorologiques majeurs.