Après tant d'années passées à manger des sandwichs au porc effiloché, de la poutine haut de gamme et du bacon à toutes les sauces, il était normal que le pendule revienne vers la légèreté.

Les légumes en général et les salades en particulier font un grand retour, dopés par la popularité du kale et autres végétaux chouchous des végétariens et végétaliens. (Açai ! Chia !)

Bref, bien des années après la Californie, New York, Londres et Sydney, c'est finalement un bon moment, à Montréal, pour avoir envie d'un smoothie vert.

Cette approche autoproclamée « santé », à l'alimentation, que d'aucuns trouveront trop souvent spartiate, intellectuelle ou nutritionniste, peut donner son lot de plats baroques peu portés vers le plaisir. Mais ça n'a pas à être ainsi.

Il y a moyen d'être heureux en mangeant de la salade.

La preuve : les salades de chez Mandy's, d'Olive + Gourmando, du nouveau petit Vinaigrette au Square Décarie - prenez la Nourish avec sa vinaigrette au yuzu ! - les plats d'antipasti végés de chez Titanic, toutes les salades de Sumac.

Et maintenant, il y a aussi Venice, une nouvelle adresse du Vieux-Montréal.

Avis à la police de la langue : Venice, ce n'est pas ici la ville italienne avec son nom anglais. Venice, c'est le nom d'une communauté californienne qui fait partie de Los Angeles. Hipster et hippie, balnéaire et artistique, Venice Beach de son nom entier est une petite ville remplie de maison d'architectes, de canaux, d'agences de communications, de plages et de bons restos. C'est là que j'ai bu mon premier café Intelligentsia et que je suis tombée amoureuse du restaurant Gjelina.

À Venice, vous comprendrez, on boit du bon cappuccino équitable et du jus vert au petit-déjeuner, avec de généreuses tartines à l'avocat. Et le soir, les cocktails ne sont jamais ennuyants, dopés au gingembre frais et aux baies antioxydantes. C'est de ça que s'est inspirée l'équipe derrière Venice, à Montréal, pour offrir un restaurant aux allures de vacances à la plage, chez les granos.

Murs blancs, vélo suspendu, teintes pastel, références nombreuses au surf et à la plage. L'endroit évoque clairement ses inspirations.

Au menu ? Des tacos, des salades, des smoothies...

On commence le repas par des edamames dans leur cosse, servis enrobées d'une crème sure au citron vert. L'exercice d'attraper les grains verts est ludique et délicieux. On en prendrait deux plats pour un repas végétarien très vert, avec en prime peut-être une portion de guacamole, très citronné, délicieux, servie avec tortillas en croustilles naturelles, bien loin des chips à la Doritos ultra salés de ce monde.

En plat principal, les tacos au poisson sont préparés avec des tortillas molles et savoureuses, du turbot, de la salade de kale et de l'avocat tandis que ceux au poulet combinent simplement poivron et avocat, avec salsa piquante. Nos préférés ? Les El Pastor au porc effiloché, avec coriandre, ananas et salsa de tomatillo. On n'est pas chez les grands maîtres de la cuisine mexicaine réinventée et les créations sont assez basiques. Mais la fraîcheur des produits s'impose.

Même chose du côté des salades, comme la « Sunset » où se rencontrent brocolis et bocconcini, épinards et amandes en bâtonnets ou encore la Chinatown, avec arachides, nouilles croquantes et vinaigrette au sésame. On aimerait toutefois un peu plus de saveurs percutantes. Chili ? Citron ?

Le plat préféré après trois visites ? La tartine grillée à l'avocat, que l'on sert avec un oeuf. C'est plein de coriandre et l'oeuf bien coulant enrobe chaque bouchée.

Au menu, il y a aussi toute une série de « poke », des plats combinant riz, sashimi, légumes, algues, condiments en toutes sortes de versions. On a essayé celui au thon à 18 $, combinaison de poisson cru, riz, mangue et edamames qui laisse bien repu, mais on cherchait un peu le zeste promis par la liste d'ingrédients : gingembre, mayonnaise épicée...

Au dessert la maison offre du pudding aux pêches ou alors au chia - tous les plats, en passant, sont identifiés sur le menu comme végétarien, vegan, sans gluten, etc. -, mais côté sucré, les smoothies sont du grand art. En tout cas rares sont les combinaisons de kale, de banane et de thé vert qui me font sourire. Et ce fut le cas.

Bref, Venice est un restaurant chouette qui répond bien aux modes et à la demande du jour. Pourquoi pas ?

Venice

440, rue Saint-Francois-Xavier, Montréal, 514 985-0686

Prix : smoothies 9 $, salades entre 11 $ et 13 $, tacos entre 10 $ et 13 $, « poke » entre 15 $ et 18 $...

Carte de vins : Il y a du vin, mais ne va-t-on pas surtout chez Venice pour prendre une bière, un kambucha, un cocktail exotique moderne, un gros smoothie nourrissant ?

Service : efficace et franchement sympathique.

Atmosphère et décoration : Dès l'ouverture le lieu a été rempli par les travailleurs et résidants du Vieux-Montréal qui attendaient de nouveaux choix alimentaires savoureux et allégés. La décoration balnéaire, avec murs blancs et meubles pastel, donne en plus au lieu un air de vacances apprécié en ce printemps gris.

Plus : l'approche fraîche et légumière.

Moins : plusieurs plats pourraient être plus parfumés, plus relevés, bref plus savoureux.

On y retourne ? Oui.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Poke de thon.