Pour les végétaliens ou végétariens de ce monde, ou encore pour des omnivores qui cherchent simplement à varier leur alimentation, les simili-viandes et autres «fauxmages» constituent une option facile et recherchée. Très recherchée même.

À preuve, l'histoire à succès de The Herbivorous Butcher, une petite «charcuterie» végétalienne à Minneapolis, la première du genre aux États-Unis. Après avoir mené une campagne de sociofinancement très fructueuse sur Kickstarter (où 61 800 $ ont été amassés, pour un objectif de 50 000 $), l'entreprise, projet des frères et soeurs Kale et Aubrey Walch, a littéralement été prise d'assaut le jour de son ouverture l'hiver dernier. En tout, 5000 personnes ont visité le commerce lors de son premier week-end d'activité.

Plus près de nous, l'entreprise québécoise Gusta connaît aussi un succès fou depuis son lancement fin 2014, elle aussi propulsée par une campagne de sociofinancement sur Indiegogo.

L'homme derrière le projet, Sylvain Karpinski, est d'origine suisse et végétalien depuis 12 ans.

«En Europe, il existe plusieurs excellents produits à base de seitan - de la protéine de blé - qu'on ne retrouve pas ici.»

C'est pour offrir un produit végétalien de qualité, mais aussi local, qu'il a décidé de lancer Gusta.

Fabriqués dans un local du marché Jean-Talon - un espace boutique et restaurant devrait ouvrir ses portes au public au courant de l'été, - les produits (trois sortes de saucisses à base de seitan et un fauxmage à gratiner) sont fort populaires et désormais distribués dans plus de 120 points de vente au Québec et en Ontario. Et le jeune entrepreneur travaille déjà à concevoir de nouveaux produits, dont une saucisse style « smoked meat » et même un fauxmage à poutine!

Nostalgie d'enfance

Pour Élise Desaulniers, végétalienne convaincue et auteure de plusieurs livres sur le sujet (dont son plus récent est Le défi végane 21 jours), les simili-viandes sont d'abord de bons aliments de transition. «C'est une façon d'adopter des mets végés sans changer ses habitudes ni ses recettes.»

Bien sûr, ces produits n'ont pas les mêmes propriétés nutritionnelles que les aliments entiers. Cela dit, elle aime bien en consommer de temps à autre. Pourquoi? Pour le plaisir et pour se remémorer des souvenirs gustatifs d'enfance.

«J'étais avec des amis dans un chalet l'été dernier et on s'est fait des hot chickens avec du "faux" poulet et c'était vraiment le fun, ça nous rappelait lorsqu'on était petit. Il y a du plaisir à retrouver ces goûts-là ! C'est du gros comfort food

Plusieurs produits de simili-viande vont ainsi reproduire des mets populaires, version végétalienne: croquette de faux poulet ou de poisson, fausses saucisses pour les hot-dogs, tranches de faux jambon... Le restaurant de «fast-food végétalien» Doomie's, à Toronto, joue à fond sur cette carte et propose même un «faux» Big Mac qui ressemble à s'y méprendre à l'original, à la différence qu'il est fait de boulettes de fausse viande, de mayonnaise végétalienne et de fromage à base de soya.

Mais ce ne sont pas tous les végétaliens qui s'enthousiasment pour ces produits. Jeune trentenaire et réalisateur à son compte vivant à New York, Philippe Tremblay est végane depuis déjà 18 ans. Inspiré par la culture punk, liée de près au mode de vie végane et au militantisme pour le droit des animaux, il s'est converti au végétarisme à l'adolescence, puis est rapidement passé à un mode d'alimentation exclusivement végétalien.

Au début, avoue-t-il, il ne savait vraiment pas ce qu'il faisait ou comment bien manger. Les simili-viandes et les «fauxmages» étaient des choix faciles, qui l'ont aidé dans sa transition.

«Au départ, j'étais vraiment excité par ces produits! Il y a quelque chose de psychologique là-dedans, qui ressemble à ce que tu connais déjà. Mais au fil du temps, j'ai commencé à trouver que c'était lourd, que ça pesait sur l'estomac. À la base, ça reste des produits transformés qui ne sont pas très nutritifs. Je préfère utiliser des légumes comme l'aubergine ou les champignons pour retrouver une texture qui rappelle la viande», dit-il.

Bon ou pas?

En général, les nutritionnistes conseillent d'éviter les produits transformés. Qu'en est-il lorsque ces produits sont végétariens? Nous avons posé la question à Hubert Cormier, nutritionniste et auteur (Non coupable!, À bas les kilos), qui a comparé pour nous deux produits transformés avec et sans viande. Ses conseils et conclusions.

Liste d'ingrédients

Comme pour tout produit transformé, l'important est d'abord de prêter attention à la liste d'ingrédients et de privilégier les listes plus courtes que longues, et aussi de regarder les valeurs nutritives des produits. À avoir à l'oeil, notamment: la présence d'additifs alimentaires et de colorants.

Nitrite

À noter que les fausses charcuteries peuvent contenir - comme les vraies - des nitrites. «Une fois dans l'organisme, ceux-ci peuvent se transformer en nitrosamines, des substances considérées comme cancérogènes selon l'Organisation mondiale de la santé», détaille M. Cormier.

Sodium

Le sodium est particulièrement à avoir à l'oeil dans les substituts de viande ou de fromage, qui sont généralement plus salés que leurs équivalents à base de protéines animales. M. Cormier suggère de viser 345 mg ou moins par portion, ce qui correspond à 15 % de la valeur quotidienne recommandée.

Avantages

Parmi les avantages de ce type de produits, le nutritionniste note qu'ils sont plus faibles en gras saturés et trans que la viande rouge et qu'ils ne contiennent pas de cholestérol, puisqu'il s'agit de protéines végétales. Lorsque la source de protéines est le soya, ils contiennent aussi des fibres alimentaires, ce qui est bien. Certains produits seront aussi enrichis en vitamines (comme la B12) et en minéraux (fer et zinc).

Recommandables?

«Les meilleures sources de protéines végétales sont celles qui ne sont pas transformées», affirme M. Cormier, qui recommande de privilégier des sources de protéines végétales naturelles comme les légumineuses, les noix, les graines, le tofu et le tempeh. Cependant, note-t-il, «il peut être intéressant d'inclure ces alternatives à l'occasion, par exemple dans un party où l'on servirait des cheeseburgers, où l'utilisation d'une boulette végé et de fauxmage peut permettre d'avoir un menu s'intégrant parfaitement aux activités».

Comparaison: jambon

M. Cormier a comparé du jambon ordinaire avec le jambon sans viande d'Yves Veggie. «Ce substitut de viande semble plus avantageux puisqu'il contient moins de sodium, moins de gras saturés et plus de protéines pour une même portion d'environ 60 g.»

Comparaison: viande hachée

Ici, c'est du boeuf haché extra maigre qui est comparé à la simili-viande hachée d'Yves Veggie. «Le sans-viande haché contient moins de calories, moins de lipides et moins de cholestérol. Toutefois, il contient près de huit fois plus de sodium que le boeuf haché!»

Photo fournie par Hubert Cormier

Hubert Cormier, nutritionniste et auteur.

Sur les rayons

Quelques produits de simili-viande et fauxmages sur les rayons d'épicerie.

Sans viande hachée original Yves veggie

Ce faux steak haché est à base de soya et de blé et permet de remplacer facilement la viande hachée dans la sauce à spaghetti, les tacos, le pâté chinois, etc. Prix payé: 4,99 $ chez Provigo.

Jambon veggie Yves veggie

Ces tranches de faux jambon sont fabriquées avec du gluten de blé, du tofu et de la protéine de blé texturée, parfaites pour se faire un sandwich, même si le goût nous a semblé un peu trop fumé et peu convaincant. Prix payé: 3,29 $ chez Provigo.

Filet végé sept grains Gardenin

Leur goût et texture imitent très bien ceux des croquettes de poulet. À base de protéine de soya et de gluten de blé, avec une chapelure aux sept grains, produit surgelé. Prix payé: 4,49 $ chez Provigo.

Végé-boeuf en cube Gardenin

Moins convaincants que les croquettes de poulet, ces morceaux de faux boeuf s'utilisent tout de même bien dans un sauté aux saveurs asiatiques avec des légumes et du riz. À base de protéine de soya et de gluten de blé, produit surgelé. Prix payé: 4,49 $ chez Provigo.

Saucisses Field Rose

Une bonne marque de saucisses végétaliennes à base de gluten de blé et à la liste d'ingrédients assez courte, sans additifs, ici aux saveurs italiennes (aubergines, fenouil, ail...). Prix payé: 8,99 $ chez Rachelle-Béry.

Burger original Sol cuisine

Une bonne option pour se concocter un burger végétalien que ces boulettes à base de protéine de soya, sans gluten ni additifs. Saveur originale, produit surgelé. Prix payé: 5,99 $ chez Provigo.

Fromage Daiya

Probablement la marque de «fauxmage» la plus facile à trouver sur le marché, ce fromage Daiya «style cheddar» en tranches ne nous a par contre pas convaincu sur les plans de la texture et du goût. À base de fécule de tapioca, il ne contient pas de soya ni gluten et fond bien dans un grilled-cheese. Prix payé: 5,99 $ chez Provigo.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Sans viande hachée original Yves Veggie