Il s’est passé quelque chose de très rare, dimanche dernier à Philadelphie. Pour la première fois en probablement trois ans, les Sénateurs d’Ottawa ont déployé une formation complète en attaque et en défense.

Dernière pièce manquante du puzzle, Shane Pinto a enfin amorcé sa saison. On n’écrira pas un roman sur les 14 minutes et demie qu’il a passées sur la patinoire. Mais son retour, jumelé à celui de Josh Norris, a constitué un véritable électrochoc pour les Ottaviens, qui seront les adversaires du Canadien ce mardi soir à Montréal.

« Il nous a vraiment manqué, a confirmé le défenseur Jakob Chychrun, mardi matin. Sa présence change le visage de notre équipe. Tous les gars l’adorent, on s’est ennuyés de lui. C’était seulement un premier match, mais il a déjà un gros impact pour nous. »

Rappelons les circonstances de l’absence de Pinto, pour celles et ceux qui auraient passé les six derniers mois sur une île déserte, qui écoutent les matchs sans le son ou qui doivent encore appuyer deux fois sur la touche 6 pour écrire la lettre N dans un échange de textos.

L’Américain de 23 ans vient de purger une suspension de 41 rencontres, la plus longue jamais imposée par la ligue, après avoir été trouvé coupable d’« activités liées au pari sportif ». Peu de détails ont, encore à ce jour, été révélés au public. Dans son unique communication à ce sujet, en octobre, la LNH avait indiqué que le jeune homme n’avait pas misé spécifiquement sur des matchs du circuit Bettman.

Revenu dans l’entourage de l’équipe une dizaine de jours avant son premier match, le joueur de centre s’est assuré de faire acte de contrition auprès d’un peu tout le monde, à commencer par ses coéquipiers.

« Je devais m’excuser aux gars pour ces 41 matchs ratés, a confirmé Pinto. J’aurais préféré être là. C’était difficile pour tout le monde. J’ai abordé la question, je leur ai dit que j’espérais qu’on puisse aller de l’avant, que je voulais les aider à gagner des matchs. Et ils m’ont accueilli à bras ouverts. Ils ont été incroyables. »

Tout au long de sa suspension, ses camarades lui ont écrit. Il a pu les croiser lors d’une visite du club à New York, lieu de résidence de Pinto, où il a passé les derniers mois.

« On a fait tout ce qu’on pouvait pour s’assurer qu’il allait bien, a souligné Chychrun. On voulait qu’il soit emballé de revenir et de nous rejoindre. Et on est vraiment heureux de le revoir. »

Persiste-t-il, malgré tout, un certain malaise dans le vestiaire ?

« Aucun, a tranché Mathieu Joseph. Il a commis une erreur de jeunesse, et c’est tout. Il n’a jamais voulu faire quelque chose de mal. Il n’y a vraiment aucun malaise. »

Il n’y en avait pas, en tout cas, lorsque Pinto a donné l’avance 3-0 aux Sénateurs en deuxième période, mardi. Au banc des joueurs, l’explosion de joie a été sincère. À l’évidence, la page est tournée sur cette histoire.

Profondeur

PHOTO DERIK HAMILTON, ASSOCIATED PRESS

« Je devais m’excuser aux gars pour ces 41 matchs ratés. J’aurais préféré être là. C’était difficile pour tout le monde. J’ai abordé la question, je leur ai dit que j’espérais qu’on puisse aller de l’avant, que je voulais les aider à gagner des matchs. Et ils m’ont accueilli à bras ouverts. Ils ont été incroyables », a déclaré Shane Pinto à propos de sa suspension de 41 rencontres après avoir été trouvé coupable d’« activités liées au pari sportif ».

Ces considérations mises de côté, une chose est claire : les Sénateurs rapatrient dans leur giron un attaquant de grand talent. Dimanche dernier, il a animé le troisième trio, derrière ceux de Tim Stützle et de Josh Norris. On peut sans doute avancer qu’il s’agit, sur papier en tout cas, de l’une des meilleures lignes de centre de la ligue.

« Il amène un élément de vitesse et une bonne compréhension du jeu, a noté l’entraîneur-chef Jacques Martin. Il joue de la bonne façon, autant avec la rondelle que sans elle, et il nous donne de la profondeur au centre. C’est sûr que d’avoir ces deux joueurs-là [avec Norris, guéri d’une blessure], ça me donne plus de flexibilité comme entraîneur. »

« Quand on ajoute des gars comme ça à une équipe, c’est une formule gagnante », a résumé Mathieu Joseph, qui sera encore jumelé à Pinto et à Vladimir Tarasenko mardi soir au Centre Bell.

Il règne une réelle fébrilité dans le vestiaire des Sénateurs, ce qui tranche avec sa position pour le moins inconfortable au classement. Coincés au dernier rang de l’Association de l’est, les hommes de Jacques Martin ne peuvent littéralement qu’améliorer leur rendement. Avec 40 matchs à disputer et 18 points de retard sur le dernier rang disponible pour les séries éliminatoires, l’idée du hockey de printemps ressemble, au mieux, à une utopie.

« Je sais qu’on a beaucoup de rattrapage à faire, mais il ne faut pas regarder trop loin, a insisté Pinto. On va bien sûr perdre des matchs ici et là, mais on doit garder notre concentration et aligner des victoires. »

« On n’a pas eu un groupe aussi complet depuis la saison de la COVID », a fait remarquer Josh Norris, en référence au calendrier écourté de 2020-2021.

« On joue du très bon hockey depuis quelques matchs, a-t-il ajouté. On a une bonne équipe. »

Croit-il vraiment que tout peut arriver ?

« Pourquoi pas ! On ne doit jamais s’avouer vaincus. Il reste beaucoup de hockey devant nous, c’est un bon test pour savoir de quoi on est faits. »