Pittsburgh, Boston, Montréal, Toronto, Denver… Si Connor Bedard était un chanteur, le gaminet officiel de sa tournée de début de carrière se dessinerait tout seul.

Puisque les Blackhawks de Chicago amorcent leur saison avec cinq matchs sur la route, chacune de leurs rencontres est jusqu’ici précédée par une frénésie qui détonne avec la relative indifférence que l’organisation inspirait au cours des deux dernières années.

Pas besoin de chercher très loin. Quand un joueur comme Bedard atteint la LNH, il suscite la curiosité. Le talent du tout premier choix du plus récent repêchage est décrit comme « générationnel », et ses débuts laissent croire qu’il n’aura pas trop de mal à s’adapter à la meilleure ligue du monde.

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Connor Bedard discute avec Corey Perry lors de la séance d'entraînement des Blackhawks de Chicago, vendredi

Une mention d’aide à son premier match, un but à son deuxième. Plus de 21 minutes d’utilisation chaque fois. Et des indicateurs offensifs franchement positifs à cinq contre cinq.

À la veille d’un duel entre les Hawks et le Canadien, le marché médiatique montréalais a fait honneur à sa réputation. Une bonne vingtaine de journalistes se sont entassés dans un vestiaire du centre d’entraînement du Tricolore pour attendre le jeune prodige.

Avant lui, Luke Richardson, entraîneur-chef des visiteurs, a été le premier à arriver devant les caméras. Celui qui a passé quatre saisons comme adjoint à Montréal n’en est pas à son premier rodéo. On peut donc le croire sur parole lorsqu’il avance que son poulain est « très bon » pour composer avec l’attention qu’il reçoit.

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Luke Richardson, entraîneur-chef des Blackhawks de Chicago

C’est ce qu’il vit depuis qu’il est tout jeune. Il a beaucoup de soutien de sa famille, et son agence l’a bien préparé. Il est très calme, il gère bien ça.

Luke Richardson

Surtout, a poursuivi l’entraîneur, la direction du club s’est assurée de créer, autour de Bedard, un « système de soutien » à même le vestiaire. Au cours de la saison morte, les Hawks ont notamment acquis Taylor Hall, tout premier choix au repêchage de 2010 et gagnant du trophée Hart en 2018. On a aussi offert des salaires élevés à Corey Perry et à Nick Foligno, deux attaquants en fin de carrière qu’on ne paie pas tant pour leur apport offensif que pour leur réputation irréprochable.

« Tout le nécessaire a été fait, assure Richardson. Il peut poser des questions à beaucoup de gars. » Le pilote a d’ailleurs précisé qu’il n’avait pas cherché à s’occuper de Bedard de trop près. Il préfère laisser ses vétérans s’occuper de lui.

Du reste, « pourquoi on n’aimerait pas cette attention ? », a-t-il lancé.

« On essaie de bâtir notre équipe et d’avancer ; si on peut avoir de l’attention positive, c’est super pour [Bedard] et pour la franchise. On va en profiter et voir jusqu’où ça peut nous mener. »

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Connor Bedard (98) a marqué son premier but dans la LNH, mercredi contre les Bruins à Boston.

Pas intimidé

Il est vrai qu’il n’y a rien de neuf, pour Bedard, à évoluer dans l’œil du public.

Il entrait dans l’adolescence lorsqu’on a commencé à parler de lui comme du futur premier choix de 2023. Chaque année qui passait, l’intérêt à son endroit grandissait. Les derniers mois ont été un inarrêtable crescendo.

« C’est amusant, a d’entrée de jeu noté le principal intéressé. Je me concentre sur le hockey, sur l’environnement de l’équipe. […] Je ne veux pas me laisser distraire par ça. Je veux être un bon coéquipier. »

Il faut savoir que Bedard, aussi talentueux soit-il, n’est pas doté d’un grand charisme. Il se fait ainsi l’héritier de Connor McDavid, qui n’est pas lui non plus un fin tribun.

Qu’à cela ne tienne, il est manifeste que, du haut de ses 18 ans et 4 mois, il n’est déjà plus intimidé par les mêlées de presse.

Sur la glace, il constate à quel point « tout le monde est bon ». Ses camarades comme ses opposants sont « plus rapides et plus forts » que tout ce qu’il avait connu auparavant.

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Connor Bedard

Les premiers matchs ont bien été. J’espère pouvoir continuer à m’améliorer. Contre les meilleurs joueurs du monde, ce n’est pas facile du tout.

Connor Bedard

Il a reconnu que l’apport des vétérans du club était « surréel » pour les nombreux jeunes joueurs de la formation.

« Il y a un bon équilibre entre les jeunes et les vieux. Enfin, pas les vieux… », s’est-il corrigé, provoquant un éclat de rire.

« Plutôt les gars qui sont là depuis longtemps. Ils nous enseignent beaucoup. »

Après avoir disputé deux matchs au centre de Ryan Donato et de Taylor Hall, Bedard apprivoisera déjà un nouveau compagnon de trio, samedi soir, puisque Hall s’est blessé mercredi à Boston. On craignait a priori une absence de quelques semaines, mais l’ailier était déjà sur la glace pour l’entraînement de vendredi. Il n’affrontera toutefois pas le Canadien. Taylor Raddysh prendra sa place sur la principale unité.

Connor Bedard renouera aussi, d’une certaine façon, avec Martin St-Louis. Une photo a circulé sur les réseaux sociaux montrant un tout petit Bedard avec l’ex-gloire du Lightning, à l’époque où le Québécois était l’entraîneur de son fils au hockey mineur.

« On avait gagné contre leur équipe en demi-finale et j’étais allé lui demander de prendre une photo tout de suite après », s’est rappelé le jeune homme.

« Je ne pense pas qu’il était enchanté, a-t-il ajouté en souriant. C’est quand même incroyable, comment on boucle la boucle. »

On se doute que Bedard n’ira pas demander à St-Louis une photo après la rencontre de ce samedi. Mais on peut aussi présumer que l’entraîneur du Tricolore fera tout pour, cette fois, avoir des raisons de sourire.