En décembre, au moment de rappeler pour une autre fois Nathan Beaulieu de Hamilton, Michel Therrien avait choisi de jouer la carte de la franchise. «On veut qu'il progresse», avait averti l'entraîneur du Canadien, sans mettre de petits gants blancs pour l'occasion.

Un mois plus tard, le souhait de la direction montréalaise semble être en voie de se réaliser. Enfin, serait-on tenté d'ajouter.

Depuis son premier match à la suite de ce rappel de Hamilton, Nathan Beaulieu joue comme le premier choix au repêchage qu'il a jadis été, en 2011. Le match de ce soir contre les Blue Jackets à Columbus sera son 13e consécutif avec le Canadien depuis ce purgatoire de 6 matchs chez les Bulldogs, et s'il faut en juger par ce temps d'utilisation qui grimpe assez vite, la direction montréalaise est satisfaite. Samedi soir au Centre Bell, contre les Penguins de Pittsburgh, Beaulieu a passé 22 minutes et 3 secondes sur la glace, un sommet cette saison pour lui.

On appelle ça du progrès, surtout si l'on considère qu'à son premier match depuis ce dernier rappel, le 9 décembre, le défenseur de 22 ans n'avait joué que pendant 11 minutes et 24 secondes.

Confiance... et constance

Quand on lui demande d'expliquer tout ça, quand on lui demande ce qui a changé chez lui, Nathan Beaulieu n'hésite pas une seconde. «La confiance. L'équipe m'a offert une belle occasion en me donnant plus de temps de glace. Mes quatre premiers matchs depuis le rappel, je les ai abordés en me disant qu'il fallait que je joue à ma manière. Ça s'est mis à bien aller après ça.»

Il y a la confiance, mais il y a aussi la constance. Beaulieu le reconnaît: les paroles de Michel Therrien à son endroit ont frappé la cible. Quand l'entraîneur s'est mis à parler d'un problème de constance pour Nathan Beaulieu, le principal intéressé s'est mis à écouter.

«Je suis parfaitement d'accord avec ce qu'il a dit à propos de moi le mois dernier. Je n'avais aucune excuse. Je ne donnais pas le meilleur de moi-même, et le manque de constance est un parfait exemple; je disputais deux bons matchs, puis deux mauvais. Ce n'était pas suffisant. Je savais que je devais être meilleur que ça, et quand je suis retourné à Hamilton [en novembre], je me suis concentré sur ce qui allait faire de moi un meilleur joueur.»

Il y a aussi que Nathan Beaulieu a dû avaler quelques bonnes tasses d'humilité. «Quand le Canadien m'a repêché, j'ai cru que j'allais être capable de jouer immédiatement dans la LNH... On finit par apprendre avec le temps. Ça a pris plus de temps que je ne l'espérais, mais je crois être capable d'être un joueur régulier dans cette ligue et je pense que les dirigeants de l'équipe sont d'accord. C'est pourquoi ils m'offrent cette chance.»

Comprendre...

Nathan Beaulieu aura fini par comprendre, en effet. Comprendre que pour gagner une place dans ce vestiaire, il allait devoir changer un peu. Dans les rangs juniors, on l'appelait Nate The Great, et cela faisait partie de lui, de son personnage si on veut; même l'entreprise Bauer avait cru bon lui fabriquer des bâtons avec ce fameux surnom écrit en grosses lettres.

«C'était mon surnom dans les rangs juniors et j'ai utilisé les bâtons pendant une saison, explique-t-il. Les bâtons, je croyais que c'était cool, tous mes coéquipiers ont bien rigolé... c'est le genre de personne que je suis. J'aime avoir du plaisir, faire des blagues. Les bâtons, le surnom, je ne le regrette pas. C'est qui j'étais en tant que jeune joueur. Ce côté-là de ma personnalité, je l'ai encore; la confiance, c'est nécessaire. Il y a une limite entre la confiance et l'arrogance, il faut trouver le juste milieu.

«Le Canadien ne m'a jamais parlé de ça, mais je sais qu'il y a une question de respect dans les rangs professionnels; au hockey junior, j'étais l'un des plus vieux, l'un des vétérans, alors je pouvais m'en tirer. Ici, c'est différent.»

Oui, c'est différent, et Nathan Beaulieu le réalise pleinement à sa troisième saison chez les pros. Le match de ce soir à Columbus sera son 27e dans le maillot du Canadien en 2014-2015, son plus haut total dans une saison depuis qu'il est un membre de l'organisation montréalaise.

Mais il refuse de s'emporter avec ça, sachant fort bien qu'il y a encore des échelons à grimper.

«J'ai eu un peu de chance depuis mon rappel, et jouer avec Sergei Gonchar, ça m'a beaucoup aidé. Mais le plus grand changement chez moi, c'est la constance. Je sais que dans cette ligue, on ne peut pas se permettre de pause, même pas pour une seule présence. Une pause, ça peut te sortir de la formation.»