Les bâtons de golf ont-ils atteint leurs limites? Pas du tout, répond Benoît Vincent, directeur de la technologie chez TaylorMade. Nous l'avons rencontré lors de son récent passage à Montréal.

«La principale bataille de la United States Golf Association (USGA), c'est de limiter la vitesse de la balle. Mais elle a complètement ouvert un autre champ, celui de l'ajustement des bâtons. Cela permet de modifier les performances de façon draconienne. Et on ne fait que commencer. Nous sommes à l'enfance de l'ajustement», explique l'ingénieur.

 

Le Français d'Alsace-Lorraine travaille chez TaylorMade depuis 1989. Après avoir mis au point la tige Bubble, il a lancé la division balle. Il dirige aujourd'hui la division bâton et balle, établie à Carlsbad, en Californie.

L'ajustement des bâtons s'est récemment mis au point avec les plaquettes amovibles qu'on place sous les semelles (R7), ou avec la tête qu'on ajuste pour en changer l'angle (R9). Deux façons de modifier la trajectoire.

Les bâtons continueront de s'ajuster, estime-t-il. Et leur performance absolue s'améliorera aussi. «Pour la vitesse de la balle, nous sommes limités. Les percées viendront plutôt de l'optimisation de la rotation et de l'angle de départ de la balle. Grâce à la meilleure forme physique des joueurs et à l'équipement, la distance moyenne a augmenté de 20 verges depuis 20 ans. Et je pense qu'elle pourrait augmenter d'encore 20 verges au cours des 20 prochaines années.»

Le Dr Vincent raconte cette anecdote au sujet de Nick Faldo. «En novembre 2008, il nous a visités à Carlsbad. Notre fer 4 frappait environ 14-15 verges de plus que le sien.»

Avec de tels gains, les vieux parcours deviendront-ils trop faciles? Il ne s'en inquiète pas. «En 2000, j'entendais dire qu'on rendait le golf trop facile. Mais regardez le handicap moyen des amateurs. Il n'a pas changé, il reste encore à 18.»

Le Dr Vincent rappelle aussi que les tournois de la PGA se gagnent encore avec des pointages semblables et qu'on peut modifier les parcours (herbe longue, largeur des allées...), comme à l'Omnium des États-Unis.

En Espagne chez Sergio Garcia

La USGA change la réglementation des rainures des fers. Dès janvier 2010, elles devront être moins profondes et moins larges. Le but: diminuer l'effet rétro, surtout de l'herbe longue, afin que la précision des coups de départ devienne plus importante.

La conséquence? De 10 à 15% en perte d'effet rétro à partir de l'allée et de 20 à 25% de l'herbe longue. «Nous pourrons peut être compenser cela en partie avec les balles, mais seulement en partie.»

En février dernier, le Dr Vincent testait de nouveaux modèles de fers avec quelques pros en marge de l'Omnium Northern Trust. Les pros sont beaucoup sollicités dans la conception des produits. Surtout les meilleurs joueurs, comme Sergio Garcia et Justin Rose.

«Leur sensibilité est extraordinaire, au-delà même de ce qu'on pourrait imaginer. Pour mettre au point nos balles TP, nous sommes allés chez Sergio en Espagne. On avait 10 prototypes. Il a frappé un coup de wedge avec les six premiers.Ça ne marche pas, ça ne marche pas, a-t-il dit. Après seulement un coup, il savait qu'il n'aimait pas. Puis avec les quatre derniers modèles, il n'était pas certain. Il les a évalués pendant 10 heures avec tous ses bâtons avant de nous formuler ses recommandations précises. Six mois plus tard, on avait un produit à son goût.»

Garcia n'est toutefois pas utilisé pour améliorer les bois du manufacturier. «Sergio nous sert seulement pour les balles et les fers, explique le Dr Vincent. C'est parce qu'il frappe comme les anciens joueurs. Avec son bois 1, l'angle de départ se limite à 8-9 degrés et il génère beaucoup d'effet rétro. Son bois 1 ne conviendrait pas à beaucoup de golfeurs. Pour développer un modèle, on préfère plutôt travailler avec Justin Rose.»

En terminant, le Dr Vincent offre un précieux conseil aux amateurs qui ignorent quelle balle choisir. «Essayer une 2-pièces (peu dispendieuse) et une 3-pièces ou une 4-pièces (utilisées par les pros). Si vous ne voyez pas de différence après neuf trous, achetez la moins chère.»