L'abolition par l'Union cycliste internationale (UCI) de la commission indépendante sur laquelle elle misait pour balayer les accusations de complaisance dans l'affaire Armstrong vient retarder la grande explication censée remettre le cyclisme en selle.

Deux heures d'audience vendredi dernier à Londres et puis c'est tout, pour cette éphémère commission.

L'Agence américaine antidopage (Usada), celle qui a fait chuter l'ex-boss du peloton, et l'Agence mondiale antidopage (AMA) avaient déjà refusé catégoriquement d'y participer, ne voyant pas grand-chose d'indépendant dans son mode de fonctionnement. Mais en plus, les trois membres de cette commission sont entrés en conflit avec l'UCI et ont déploré mardi plus globalement le manque de coopération des parties intéressées.

Pressée de toute part de laisser quiconque venir s'exprimer sans crainte de sanction, l'UCI a fini par céder.

À contrecoeur, son président Pat McQuaid, qui compte bien briguer un troisième mandat fin septembre, s'est rallié à l'idée d'une commission de type «Vérité et réconciliation», à la manière du dispositif éprouvé dans des pays africains ou latino-américains traumatisés par une dictature.

Mais si la promesse est faite, un point essentiel reste à régler: qui va assurer son financement? «Bien que je m'engage dans la mise en place d'une Commission Vérité et Réconciliation, ce processus se doit de servir au mieux les intérêts de notre sport et de notre fédération, et ne doit pas causer sa faillite», a insisté lundi le président de l'UCI, dans un communiqué.

«Duperie»

Initialement, la Fédération internationale voulait une commission indépendante pour faire la lumière sur le rôle joué par ses dirigeants au temps de la splendeur d'Armstrong et surtout pas d'«un confessionnal pour dopés».

Car le rapport détaillé de l'Agence antidopage américaine sur le système Armstrong publié en octobre a bien jeté l'opprobre sur Pat McQuaid et son prédécesseur, Hein Verbruggen - encore président d'honneur - soupçonnés au mieux d'avoir fermé les yeux, au pire de complicité.

D'un contrôle antidopage présumément étouffé aux dons faits à la fédération par l'Américain, en passant par le refus obstiné de prêter crédit aux confessions de Floyd Landis quand l'ex-vainqueur du Tour de France 2006 et ancien équipier d'Armstrong fut prêt à soulager sa conscience, l'Usada a mis en cause la direction de l'UCI pour expliquer comment le survivant du cancer avait pu régner en maître pendant sept ans sur la Grande Boucle.

L'UCI a rejeté ces accusations mais a préféré suivre la décision de l'Usada et effacer ainsi le palmarès du Texan depuis le 1er août 1998.

Pour ne pas offrir une échappatoire à son ancien athlète vedette, la Fédération avait jugé que ces critiques ne constituaient pas un motif suffisant pour faire appel devant le Tribunal arbitral du sport (TAS).

Pour redorer son blason et donner une autre version de l'histoire, la Fédération comptait alors sur cette commission externe indépendante, qui avait pour mission de rendre son rapport avant juin, soit plus de trois mois avant l'élection à la présidence de l'UCI.

«Je ne veux pas qu'un nuage plane sur le sport encore une année ou deux», disait Pat McQuaid vendredi. Maintenant qu'un nouveau processus doit commencer, ce n'est pas gagné.

Surtout que les relations continuent à s'envenimer avec l'Agence mondiale antidopage. Son président John Fahey a accusé mardi l'UCI de «duperie», lui reprochant de faire croire que son Agence s'était engagée à participer à une commission «Vérité et réconciliation».

L'UCI a répliqué en dénonçant des «contre-vérités flagrantes et offensantes de l'AMA».

Mardi, l'éphémère commission indépendante a déploré, dans un communiqué, cette incapacité des différentes parties à s'entendre.

«Ni l'UCI, ni les autres parties intéressées n'ont coopéré suffisamment pour permettre à la commission d'accomplir son travail. Cette incapacité à coopérer rend notre tâche impossible», précise-t-elle.