Cela fait quatre décennies que Cuba domine la boxe aux jeux Olympiques et forme des athlètes de qualité, mais l'île caraïbe, privée de ses champions olympiques de 2004 à la suite de défections, n'a toujours pas trouvé le digne successeur de Teofilo Stevenson et Felix Savon.

Désormais vice-président de la fédération cubaine de boxe, Stevenson a enlevé l'or en super-lourds (+ de 91 kg) aux Jeux de 1972, 1976 et 1980, devenant le premier pugiliste à faire la passe de trois.

Après deux boycotts de Cuba aux JO, Savon a signé le même exploit en lourds (91 kg), en 1992, 1996 et 2000. Les deux figures emblématiques du Noble art à Cuba ont en outre engrangé de nombreux titres de champion du monde (3 pour le premier, 6 pour le second).

Présent dans la délégation cubaine à Pékin, Stevenson préfère parler d'héritage: «Mon successeur, c'est le mouvement sportif cubain, le développement du sport, la manière de pratiquer la boxe et les autres sports, a-t-il confié à l'AFP. Voilà mon principal héritage, qui n'aurait pas été possible sans l'appui de l'État et du peuple».

L'entraîneur de la sélection caribéenne à Pékin, Pedro Roque, souligne son dévouement à l'olympisme et rappelle cet épisode de 1972, lorsque Stevenson avait refusé une offre d'un million de dollars pour combattre contre l'espoir des États-Unis Duane Bobbick, comme professionnel, ce qui aurait compromis la suite de sa carrière olympique.

32 médailles d'or

Fidel Castro a toujours rejeté la professionnalisation de ce sport, sous le motif qu'il était préférable de remporter des médailles prestigieuses pour le bien de la nation plutôt que de chercher une fortune personnelle.

Depuis 1972 et son premier sacre olympique en boxe, Cuba domine donc le ring olympique avec 32 médailles d'or (soit près de la moitié des 65 délivrées au total de son histoire !), 15 d'argent et 8 de bronze. À Pékin, Cuba sera présent dans 10 des 11 catégories.

Malgré les défections, Stevenson se montre optimiste: la boxe de l'île a «un très bon niveau». Et peu importe qu'aucun des qualifiés n'ait d'expérience olympique: «Quand j'ai été à mes premiers Jeux, moi non plus je n'en avais aucune et nous avons gagné. Les noms se font à l'entraînement et dans la compétition».

Les défections de ces dernières années ont plombé la boxe cubaine. «Psychologiquement, nos boxeurs n'en sont pas affectés, assure Roque. Dans la boxe cubaine il y a une grande concurrence et chacun veut être le meilleur pour le pays. Nos boxeurs n'ont pas l'impression d'être juste les remplaçants des fuyards. Ils sentent qu'ils ont désormais l'occasion de briller aux Jeux».

Cinq champions olympiques absents

Médaillé d'or chez les super-lourds en 2004, Odlanier Solis avait le profil pour succéder aux glorieux Stevenson et Savon (retraité en 2000). Il avait même battu ce dernier deux fois (contre une défaite) et glané trois titres de champion du monde (deux en lourds, en 2001 et 2003, et un en super-lourds en 2005).

Mais en décembre 2006, alors qu'il s'entraînait au Venezuela pour préparer les Jeux panaméricains de Rio de Janeiro, Solis se faisait la belle en compagnie d'autres champions olympiques, Yan Bartelemy (48 kg) et Yuriorkis Gamboa (51 kg), partis tous trois signer des contrats pro à Miami.

Six mois plus tard, Guillermo Rigondeaux (double champion olympique 2000 et 2004 et champion du monde 2001, 54 kg) et Erislandy Lara (champion du monde des welters, 69 kg) en faisaient de même, après les Jeux panaméricains. Tous deux furent livrés par la police brésilienne à Cuba et interdits de boxe dans leur pays.

Le Lider Maximo, craignant sans doute de nouvelles défections, avait refusé d'envoyer une sélection aux Mondiaux-2007 à Chicago.

Cuba se retrouve ainsi sans ses cinq champions olympiques de 2004 - le 5e, (60 kg) Mario Kindelan, ayant pris sa retraite. La jeune génération aura la lourde tâche de faire oublier ses glorieux devanciers.