Les hommes les plus âgés souffrant d'un cancer de la prostate débutant n'ont pas toujours besoin de traitement. Dans la majorité des cas, la surveillance de leur maladie est suffisante, selon une étude américaine qui précise que, l'an dernier, seuls 10% des 9000 Américains concernés sont morts de leur cancer.

La grande majorité d'entre eux était toujours vivants et sans aggravation des symptômes ou étaient morts d'une autre affection.

Grace Lu-Yao, de l'école de médecine Robert Wood Johnson dans le New Jersey, a conduit l'étude et présente les résultats cette semaine à San Francisco, lors d'une conférence.

«Ce sont des nouvelles importantes», a déclaré le Dr Otis Brawley, directeur médical de la société américaine du cancer. Ces résultats «peuvent convaincre les indécis que nous en faisons trop avec cette maladie» et les persuader que le dosage de PSA (prostat specific antigen) peut rendre le problème encore plus difficile, a-t-il ajouté. Le dépistage du cancer de la prostate par le dosage sanguin de PSA est un test largement utilisé depuis les années 1990.

Traiter le cancer de la prostate est un des plus grands dilemmes de la médecine actuelle. C'est un des cancers masculins les plus fréquents aux États-Unis, environ 220.000 cas seront diagnostiqués cette année, mais la plupart des tumeurs grossissent si lentement qu'elles ne menacent pas la vie des malades. Et il n'existe aucun moyen pour dépister les tumeurs qui seront véritablement dangereuses.

Le dosage de PSA peut aider à détecter une tumeur, bien avant l'apparition de symptômes, mais le dépistage systématique des hommes n'est pas recommandé, car rien ne prouve que cet examen puisse sauver des vies.

Les traitements du cancer de la prostate sont pénibles, notamment chez les hommes les plus âgés. Beaucoup d'entre eux conservent des problèmes sexuels et urinaires. C'est pourquoi de nombreux médecins recommandent une surveillance attentive des premiers signes de la maladie, bien que des études précédentes aient mis en garde contre une telle attitude thérapeutique.

La nouvelle étude se penche sur l'évolution naturelle de la maladie chez les hommes ayant choisi la surveillance. Il s'agit de la première étude incluant autant d'hommes très âgés, la moitié ayant plus de 75 ans, et autant d'hommes dont la tumeur a été révélée par un dosage de PSA.

Utilisant les données du gouvernement, les chercheurs ont étudié 9.018 hommes diagnostiqués entre 1992 et 2002 à un stade précoce de leur cancer, qui n'ont ni été opérés, ni traités par radiothérapie ou hormonothérapie pendant au moins six mois. La plupart n'ont pas été soignés.

Au bout de dix ans, 3 à 7% de ceux qui présentaient une forme légère ou modérée de cancer de la prostate, selon l'agressivité de la tumeur, en étaient morts, contre 23% de ceux ayant une tumeur plus agressive. Au total, le cancer de la prostate avait tué 10% d'entre eux.

«La grande majorité des patients (...) mourra de quelque chose d'autre», en conséquence la plupart des hommes très âgés dont la tumeur est détectée à un stade précoce, pourraient retarder le traitement, a estimé Grace Lu-Yao.

En revanche, «si les patients sont plus jeunes ou présentent une pathologie plus avancée, ce n'est plus un choix sans risque», mais la plupart des cas sont détectés chez des hommes de 68 ans et plus et la plupart du temps à un stade précoce, a-t-elle ajouté.

Ces résultats ne permettent pas de clore définitivement le débat, mais ils soulignent qu'«un grand nombre d'hommes vivent bien sans traitement initial, et même sans traitement à long terme», conclut Otis Brawley.