La construction d'une résidence pour personnes âgées dans une petite municipalité bouleverse inévitablement le marché immobilier, en provoquant une arrivée massive de propriétés à vendre, une baisse des prix et un allongement des délais de vente. C'est le cas à Amqui, une ville de 7000 habitants où ouvrira l'an prochain le Château Bellevue, doté de 177 logements.

Le courtier immobilier Benoit Fournier prévoit travailler 10 heures de plus par semaine au cours de la prochaine année, en raison de l'afflux massif de propriétés à vendre. «On va avoir plus d'ouvrage, car les gens auront beaucoup plus de maisons à visiter, dit-il. Les acheteurs ont le beau jeu.»

Pierre D'Amours, maire d'Amqui, est conscient que la nouvelle résidence fera fléchir le marché de sa ville. «On ne peut pas nier que ça va avoir un effet à la baisse sur la valeur des propriétés, mais ça va se résorber à l'intérieur de trois à cinq ans», affirme-t-il.

Bien que chaque transaction soit unique, M. Fournier estime qu'une maison qui vaut 180 000 $ pourrait être vendue 165 000 $ dans un contexte favorisant les acheteurs. «On baisse de 5 à 10 % en comparaison avec un marché en équilibre.»

Le courtier ne nie pas la baisse de prix et l'augmentation des délais de vente, mais il ne s'en fait pas outre mesure.

«On s'y attendait et les gens se préparent. Toutes les maisons ne sortent pas sur le marché en même temps. En y allant graduellement, ça stabilise un peu le choc immobilier.»

En date du 29 mai, 70 % des logements au Château Bellevue d'Amqui étaient loués. 

Au cours de la prochaine année, plusieurs petites et moyennes municipalités du Québec devront composer avec une situation semblable. À la fin de l'été 2018, une résidence de 158 logements ouvrira à Château-Richer. L'automne prochain, un immeuble de 305 logements sera terminé à Shawinigan. À Salaberry-de-Valleyfield, un projet de 180 à 246 logements s'ajoutera bientôt au paysage.

Aussi une bonne nouvelle

Pour le maire d'Amqui, l'arrivée d'une imposante résidence est plus positive qu'inquiétante. «Dans la région de Matapédia, on est aux prises avec un exode de nos retraités actifs, explique-t-il. Ce projet-là va nous permettre de garder ceux qui auraient quitté la région pour les grands centres, parce que nous n'avions pas ce type de résidence. Au-delà de l'impact de leur départ sur notre économie, on perdait leur implication dans la communauté.»

Il souhaite d'ailleurs que la grande quantité de maisons mises en vente convainque de nouvelles personnes de s'établir dans sa ville. «Le monde rural a besoin de main-d'oeuvre, souligne-t-il. On a un défi d'immigration et de rétention. Il faut s'assurer que les gens qui viennent travailler chez nous y habitent également, en leur donnant accès à un marché immobilier à prix raisonnable.»

À l'hiver 2018, il a d'ailleurs réuni plusieurs courtiers, notaires et intervenants du monde bancaire pour réfléchir à des solutions. «D'ici à décembre prochain, on va établir un programme pour favoriser l'accès à la propriété.»