De nombreuses cultures commerciales de tomates et de pommes de terre sont affectées par le mildiou au Québec. Grâce à l'application soutenue de fongicides, la maladie semble cependant contrôlée, souligne Christine Villeneuve, agronome et conseillère horticole au bureau du ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Pêcheries à Saint-Rémi, au sud-ouest de Montréal. Rien à voir avec l'attaque de mildiou survenue en 2000 et qui avait provoqué des pertes de centaines de milliers de dollars chez les maraîchers.

La situation est plus difficile toutefois dans les potagers domestiques, où la tomate reste encore la plante la plus cultivée. Les jardiniers amateurs ne peuvent compter sur la panoplie de fongicides qui étaient autorisés il y a quelques années.

 

Le temps frais, humide et pluvieux, de même que l'absence de soleil sont autant de conditions favorisant l'apparition de la maladie. Le fongus en cause est le Phytopthoras infestans. Il produit des millions de spores qui peuvent voyager sur une distance de 80 km grâce au vent. Si bien que nul n'est vraiment à l'abri du fléau.

Taches brunes ou lésions sur le bord des feuilles et présence de duvet blanc à l'endos de celles-ci, au petit matin, quand il y a eu une rosée, sont les premiers symptômes de la maladie. À ce stade, si la tige principale est contaminée, il est conseillé d'éliminer immédiatement le plant et de le jeter aux ordures. Si c'est seulement une partie du feuillage qui est affectée, il faut couper les feuilles malades. Les tissus végétaux affectés doivent absolument être mis aux ordures. Si on les laisse sur le tas de compost, on ne fait que favoriser la dispersion des spores. Le mildiou progresse souvent de façon spectaculaire. Parlez-en à Manon Collard, qui a un gigantesque jardin dans le coin d'Ormstown, et qui est une experte en plantes potagères dont je vous parle à l'occasion (www.jardinpotager.com). Elle avait pourtant fait des traitements préventifs avec une solution d'eau et de poudre à pâte (bicarbonate de soude), une méthode toutefois inefficace pour contrer ce mal. Le mildiou a donc progressé à son insu durant quelques jours, au début du mois. Puis en l'espace de 48 heures, ce fut l'explosion. Ses 195 plants de tomates (de 185 variétés) ont flétri, comme s'ils avaient brûlé. La plupart des fruits ont bruni pour ensuite virer au noir. Une saison de travail ruinée, car Mme Collard fait ses propre semis en plus de cueillir elle-même ses semences.

Les pommes de terre

Antoine et France Cloutier, qui possèdent un immense potager en Mauricie, ont vécu le même problème mais cette fois, dans les pommes de terre. En une quinzaine de jours, une grande partie de leurs 250 plants ont séché sur place. Quant aux tubercules, ils ont noirci. Ils craignent, et avec raison, que tout leur champ y passe. Les tubercules qui semblent sains devraient se dégrader ultérieurement. C'est le même Phytopthoras infestans qui est à l'origine de la grande famine en Irlande, en 1845; il a entraîné la destruction de la récolte de pommes de terre, la base de l'alimentation des paysans à cette époque. L'attaque de mildiou qui frappe actuellement la pomme de terre au Québec est la plus importante de la dernière décennie.

Selon Christine Villeneuve, il n'existe pas vraiment de traitements préventifs à la disposition des jardiniers amateurs. Les solutions à base de sulfate de cuivre souvent recommandées sont parfois polluantes. Certains traitements biologiques comme le purin d'ortie semblent efficaces, du moins si on se fie à des forums de discussion horticole sur l'internet. Par contre, il est pratiquement impossible de traiter la maladie une fois qu'elle a fait son apparition. Il reste à espérer que les autres plants du potager soient épargnés.

Attention: certaines autres maladies assez courantes de la tomate peuvent être confondues avec le mildiou par les jardiniers amateurs, notamment l'alternariose, le botryctis et plusieurs autres. En cas de doute, faites identifier la maladie chez un bon pépiniériste. Dans le cas de l'alternariose, une maladie qui sévit actuellement dans mes plants de tomates et caractérisée notamment par une multitude de points grisâtres sur les feuilles, j'ai dû consulter un agronome pour éviter toute confusion avec le mildiou, et cela en dépit des photos que j'avais examinées sur les sites internet de divers ministères de l'Agriculture.

Comment savoir si votre potager est envahi par le mildiou? Coupez une feuille qui semble contaminée, vaporisez des deux côtés (le champignon ne peut se développer si les feuilles sont sèches), déposez dans un sac de plastique (genre Ziploc) et laissez reposer une nuit. Le lendemain, l'endos de la feuille devrait être recouvert d'un léger duvet blanc.

Un dernier mot: le terme mildiou porte souvent à confusion au Québec. La maladie ne doit pas être confondue avec le blanc ou oïdium, qui produit une substance blanche sur les feuilles d'une foule de plantes du jardin, notamment chez les phlox. L'oïdium affecte la beauté de la plante, mais provoque très rarement sa disparition.