Son appellation scientifique ne donne aucun indice sur sa personnalité: Cerastium tomentosum. Le premier terme fait allusion à ses graines qui semblent avoir des cornes, le second, assez répandu dans le domaine botanique, rappelle qu'elle est laineuse ou que ses feuilles sont poilues. En termes courants, on parle d'une plante pubescente.

Pelage délicat, en effet, que celui du céraiste, mais c'est surtout sa couleur argentée et ses nombreuses petites fleurs blanc pur, vers la mi-juin, qui retiennent l'attention. Parfois appelé corbeille d'argent en français, le cerastium porte un nom, beaucoup plus joli dans la langue de Shakespeare: neige d'été (snow in summer), un nom qui lui va à merveille.

Originaire d'Italie et naturalisé dans plusieurs pays en Europe, Cerastium tomentosum est considéré comme une plante rampante au feuillage blanchâtre qui ne dépasse guère les 15 cm de hauteur même si les hampes florales atteignent facilement le double. Elle est parfois considérée comme envahissante, car un plant peut s'étaler sur un mètre mais ses emportements se contrôlent facilement. Si on lui donne les conditions appropriées, un sol pauvre, très bien drainé et une position ensoleillée, elle sera prolifique. Mieux encore, elle deviendra alors extrêmement résistante à nos hivers.

Installées entre les pierres de mon jardin alpin, un milieu plutôt sablonneux et extrêmement aride (peu protégé par la neige l'hiver, exposé aux vents et à la sécheresse), les touffes de céraistes sont magnifiques actuellement et prennent de l'ampleur année après année. La plante est considérée rustique en zone 3 et vraisemblablement en zone 2. Au point d'ailleurs qu'il faut en transplanter, sans quoi elles prendraient volontiers tout le territoire disponible. La plante convient évidemment aux premiers rangs d'une platebande à la condition de vouloir la contrôler de temps à autre.

On compte une centaine d'espèce de cerastium dans le monde, surtout dans les zones tempérée et arctiques de l'Europe et de l'Amérique du Nord. C'est le cas notamment de Cerastium alpinum lanatum, qu'on retrouve même sur la Côte-Nord, et qui est commercialisée par au moins deux importants grossistes québécois. Cette espèce naine ne dépasse guère les 10 cm de hauteur et convient particulièrement bien aux rocailles. Mais la plus populaire demeure C. tomentosum. Toutefois les hybrides de l'espèce originale, comme «Yoyo», aussi offert chez un grossiste, sont considérés comme plus florifères et plus envahissants. Une autre espèce est aussi offerte au Québec, Cerastium biebersteinii, au feuillage très argenté, mais il est considéré comme moins florifère et envahissant lui aussi. Si l'on veut un tapis qui mérite son nom, il faut évidemment un minimum d'espace.

L'arbre à neige

Eh oui! c'est de temps des tempêtes de neige végétale dans la grande région de Montréal, une période particulièrement propice aux chicanes de voisins, le moment de l'année où ceux qui n'aiment guère les arbres les détestent davantage.

Le peuplier deltoïde, puisqu'il faut l'appeler par son nom, est un arbre indigène à croissance très rapide qui atteint 30 m et vit une cinquantaine d'années. Même si on a cessé d'en planter il y a vingtaine d'années, notamment à Montréal, le peuplier deltoïde prend racines un peu partout, notamment sur les terrains vagues. Attirés par cet arbre majestueux, des propriétaires ont même choisi leur terrain à cause de sa présence, ignorant ses petits méfaits.

Mais à ce temps-ci, les arbres portant des fleurs femelles produisent une infinité de chatons, cotonneux, longs, très denses. Comme le pissenlit, ces innombrables mais minuscules fruits se détachent et volent au vent sur de grandes distances. Leur densité est telle qu'on dirait parfois une vraie tempête de neige, ce qui est fort joli. Sauf que dans ce cas, la neige ne fond pas. Et cette saison, les arbres semblent plus productifs que dans le passé, du moins si je me fie à ceux qui sont près de mes platebandes.

Les minous reposent donc en couche épaisse sur le sol, dans les rues, sur les piscines, partout, à vrai dire. Et la chose n'est guère appréciée. Plusieurs propriétaires se sont donc retrouvés devant un juge parce qu'un voisin voulait que la cour ordonne de couper l'arbre à neige. Habituellement, c'est le peuplier qui a gain de cause. Incitation donc à la patience. Le phénomène dure une quinzaine de jours, parfois un peu moins.

Je vous rappelle par ailleurs cet extrait d'un jugement rendu à Joliette par le juge Jean Guilbault, de la Cour supérieure à ce sujet: «...la perte des fleurs et des chatons cotonneux au printemps, tout comme la chute des aiguilles de pin et des feuilles l'automne, ainsi que la présence des oiseaux en groupes importants vers la fin de l'été, sont des phénomènes naturels qui rencontrent le seuil de tolérance qui doit exister entre voisins.»

Photo: André Tremblay, La Presse

Amas de fruits d'un seul chaton de peuplier deltoïde.