Le terme «mauvaise herbe» existe sans doute depuis que les premiers êtres humains ont tenté la culture des céréales pendant le néolithique. À cette époque, toute plante qui ne produisait pas des graines comestibles était indésirable, donc «mauvaise», surtout si elle accaparait les ressources des plantes désirables. Mais ce qui constitue une mauvaise herbe a parfois changé radicalement au cours de l'histoire.

Le terme «mauvaise herbe» existe sans doute depuis que les premiers êtres humains ont tenté la culture des céréales pendant le néolithique. À cette époque, toute plante qui ne produisait pas des graines comestibles était indésirable, donc «mauvaise», surtout si elle accaparait les ressources des plantes désirables. Mais ce qui constitue une mauvaise herbe a parfois changé radicalement au cours de l'histoire.

En effet, plusieurs des plantes aujourd'hui considérées comme des mauvaises herbes ont été importées volontairement de la France aux débuts de la colonisation, dans les années 1600. C'est qu'on leur avait trouvé des utilités médicinales et ces plantes faisaient partie du traditionnel «jardin de simples» (jardin de plantes médicinales), un concept de jardin importé pour les premiers hôpitaux de la Nouvelle-France, comme l'Hôtel-Dieu de Québec.

Le pissenlit (Taraxacum officinale), par exemple, était utilisé pour ses effets diurétiques, le plantain (Plantago major) pour les pansements, la bardane (Arctium lappa) pour ses effets antiseptiques, etc. Le pissenlit est parti à la conquête de l'Amérique entière à partir de la Nouvelle-France; la bardane aussi. Le plantain s'est si rapidement établi partout où les colons européens passaient que les Amérindiens l'appelèrent «pied du Blanc».

La liste des «mauvaises herbes» du Québec est d'ailleurs bourrée de simples égarées. Mais ce ne sont pas toutes les plantes médicinales introduites qui ont pris aussi efficacement la clé des champs. On trouve encore parfois la digitale (Digitalis purpurea), plante pourtant très toxique, mais utilisée dans plusieurs traitements à l'époque, autour des vieux jardins, mais elle n'est jamais vraiment devenue mauvaise herbe. La pulmonaire officinale (Pulmonaria officinalis), utilisée pour traiter les bronches et les poumons, est bien établie dans la région de Québec, mais rarement ailleurs sur le continent.

Pourquoi si peu?

La vaste majorité des mauvaises herbes courantes dans nos jardins sont des importées originaires d'Europe ou d'Asie, apportées en Amérique exprès (comme plantes médicinales, fourragères, potagères, ornementales, etc.) ou par accident (des graines voyageant dans une livraison de blé, par exemple). Pourquoi si peu de plantes indigènes ont-elles atteint le statut de «mauvaises herbes»? Cela est en bonne partie attribuable à l'écosystème naturel de notre région, soit celui de la forêt coniférienne, mixte ou décidue, selon l'endroit.

Quand les premiers colons européens sont arrivés ici, ils ont découvert une forêt presque infinie et les plantes indigènes étaient, pour la plupart, acclimatées à un milieu ombragé et très stable, avec peu de dérangements. Or les Européens ont vite fait de couper la forêt pour établir des champs de culture, un milieu nouveau dominé par le soleil et des labourages annuels.

Nos plantes indigènes, ombrophiles et à croissance lente, ne faisaient pas le poids dans ce nouvel «écosystème»... mais les plantes d'Europe et d'Asie, où les forêts pour la plupart avaient été coupées depuis longtemps, avaient eu des millénaires pour s'adapter à un milieu ouvert et fréquemment dérangé. En arrivant en Amérique, ces «plantes des champs» ont trouvé un milieu presque identique à leur milieu d'origine et ont proliféré. D'ailleurs, même la majorité des rares plantes nord-américaines qui ont acquis la réputation d'être des mauvaises herbes sont originaires, non pas des forêts sombres de l'Est, mais des Prairies, où le soleil plombe. Ainsi, l'herbe à poux (Ambrosia artemisiifolia), maintenant bien établie chez nous, vient des Prairies. Elle a immigré peu à peu vers l'Est à la suite de la coupe des forêts.

Des mauvaises herbes bien de chez nous

Il ne faut pas croire que toutes nos mauvaises herbes viennent d'ailleurs. La très jolie et aussi très envahissante verge d'or (Solidago canadensis) et l'asclépiade commune ou «petit cochon» (Asclepias syriaca) sont bien indigènes, mais étaient plus rares autrefois, poussant uniquement dans les aires exposées (même la forêt vierge avait ses clairières et autres ouvertures et les incendies de forêt causés par la foudre, qui exposaient le sol au soleil, ne datent pas d'hier). La forêt disparue, elles ont proliféré, au grand dam des agriculteurs et jardiniers.

La prêle des champs (Equisetum arvense) est une autre plante indigène qui a profité de la présence des champs cultivés. Cette plante cosmopolite (elle est indigène presque partout dans l'hémisphère nord, autant en Asie et en Europe qu'en Amérique) est beaucoup plus commune depuis que l'être humain la multiplie en passant sa charrue et sa binette, car chaque rhizome coupé donne une profusion de nouvelles tiges.

Une pensée avant d'agir

Avant d'arracher une mauvaise herbe, il peut être intéressant de penser au chemin qu'elle a fait avant d'arriver dans votre cour, à ses origines lointaines et aux nombreux obstacles qu'elle a dû franchir. Mais après y avoir songé un peu, arrachez-la: une plante indésirable est une plante non désirée et vous n'êtes pas obligé de tolérer sa présence!