Mes platebandes ont alors accueilli une bonne dizaine de variétés de bruyère commune, la seule espèce qui soit vraiment vivace au Québec. Mais en deux ou trois ans seulement, mes plants ont dégénéré et sont finalement tous morts.

Mes platebandes ont alors accueilli une bonne dizaine de variétés de bruyère commune, la seule espèce qui soit vraiment vivace au Québec. Mais en deux ou trois ans seulement, mes plants ont dégénéré et sont finalement tous morts.

Incompétence et négligence. Je n'ai tout simplement pas su en prendre soin. Mea culpa! On apprend toujours de ses erreurs.

Le feuillage de la bruyère «Firefly» se pare d'une teinte dorée ou orangée au cours de l'automne.

Quand arrive septembre, la plupart des variétés de bruyères sont en fleurs et une visite dans une bonne pépinière vous fera probablement succomber à la tentation vous aussi. Si vous ne suivez pas mon exemple et respectez leurs exigences, elles feront bon ménage dans votre jardin durant des années, notamment dans les rocailles. Et vous ne regretterez pas le temps consacré à les dorloter.

Les bruyères m'ont toujours fasciné. Parce que leur feuillage est persistant, parce qu'elles ressemblent à de minuscules conifères qui donnent une profusion de fleurs. De plus, cette floraison de fin d'été dure habituellement jusqu'au gel, et leurs petites fleurs rosâtres en forme de clochette restent accrochées au feuillage même après les premières neiges, souvent jusqu'à la fin décembre. Étonnant! Et par surcroît, au cours de l'automne, le feuillage vert de certaines variétés tourne au rouge ou se pare d'une teinte orange pour se couvrir de vert tendre au printemps suivant. Magnifique.

Plus de 1000 variétés

La bruyère «Silver Knight» nous offre un joli feuillage argenté et une profusion de fleurs bleu pâle.

Originaires des landes du nord de l'Europe, de la Sibérie, du Maroc ou encore de l'archipel des Açores, les bruyères à floraison estivale et automnale ne forment qu'une seule et même espèce, Calluna vulgaris. On en compte toutefois des centaines de variétés, plus de 1000, affirment certains auteurs. Il ne faut pas les confondre par ailleurs avec les autres espèces de bruyères, celles qui répondent au nom scientifique d'Erica, des plantes à floraison printanière qui survivent très difficilement au Québec.

Les calluna sont des plantes de petite taille, certaines sont même rampantes, et les plus grandes offertes chez nous ne dépassent guère les 60 cm. La floraison débute habituellement vers la mi-juillet pour les cultivars les plus hâtifs et elle s'étale sur une période de 6 à 10 semaines. Les bruyères produisent des fleurs en divers tons de rose, mais aussi de rouge et de blanc. Rustiques en zone 4 et parfois même jusqu'en zone 2, certaines petites populations se sont même adaptées à la vie sauvage en Gaspésie, sur la Côte-Nord et dans les Maritimes. Dans son volume Les Arbustes, (éd. Broquet), l'auteur Larry Hodgson indique que ces plantes sont issues de graines importées accidentellement dans les eaux de ballast des navires, il y a de cela des décennies.

La bruyère Calluna «Yvette Gold»

Producteur de plantes acidophiles à Saint-Jean-Port-Joli, Yves Dubé, de la pépinière Les Farfadets, raconte avoir découvert dans un coin de la côte acadienne, au Nouveau-Brunswick, plusieurs plants échappés de culture, des arbustes qui poussaient dans un climat très rigoureux soumis aux embruns salins de la mer. M. Dubé signale aussi qu'une fois, il s'était débarrassé de plants qui semblaient morts à la suite d'un hiver très difficile. Plusieurs années plus tard, il a découvert que ces mêmes plants étaient tous en fleurs à l'orée du bois, là où il avait laissé les mottes de racines à nu sur le sol. «Voilà qui démontre que lorsque la bruyère se retrouve dans des conditions qui lui conviennent, elle peut vivre durant des années», fait-il valoir. M. Dubé produit une quinzaine de cultivars, dont «Boskoop», mon préféré, qui donne un feuillage rougeâtre l'automne.

Plus près de Montréal, c'est à la Pépinière Villeneuve, de L'Assomption, que la passion pour les bruyères est la plus vive. L'entreprise de gros et de détail offre actuellement une trentaine de cultivars, la plupart en montre dans ses jardins d'exposition. Elle en vend même dans le Vermont. Comme chez Les Farfadets, l'horticulteur de l'entreprise et responsable des ventes en gros, Denis Bernard, reconnaît que les bruyères ne sont pas des plantes faciles dans la grande région de Montréal. Les hivers en dents de scie, surtout avec leurs redoux de février et de mars, peuvent être très dommageables sinon dévastateurs si on n'a pas pris les précautions qui s'imposent pour protéger ses plants. Sans oublier non plus les étés torrides et secs qui peuvent déshydrater un plant en quelques jours ou presque. Voici donc les conseils de Denis Bernard pour que les bruyères puissent enjoliver votre jardin longtemps, du moins dans la grande région de Montréal. D'ailleurs, on pourra les planter immédiatement dans la platebande même si elles sont fleurs.

Un dernier mot: originaires de la Californie, les bruyères vendues en pot dans les grandes surfaces au cours du temps des Fêtes ne sont pas vivaces au Québec. À la maison, elles sèchent très rapidement à moins de les installer dans un coin frais, si possible humide, et de les arroser régulièrement.