Je conduis en ce moment une Mazda RX-8, la seule voiture du monde (à ma connaissance) mue par un moteur rotatif.

Si la marque d'Hiroshima mérite une accolade pour sa persévérance à tenter de mettre au point ce type de moteur passablement capricieux, je me demande vraiment quelle est sa motivation dans cet exercice.

Pourquoi un tel acharnement à développer un moteur devant lequel beaucoup d'autres constructeurs (dont Mercedes-Benz, General Motors, Citroën) ont capitulé?

Inventé par un ingénieur allemand du nom de Félix Wankel, le moteur rotatif n'a jamais répondu aux attentes qu'il fît naître dans les années 60 quand il a fait son apparition dans une berline allemande du nom de NSU RO 80, une marque aujourd'hui défunte. Compact, peu bruyant, d'une grande douceur et comptant un minimum de pièces comparativement à un moteur classique, il a eu le malheur de faire son apparition à une époque où le prix de l'essence atteignait des sommets jamais vus en Amérique. Or, une forte consommation était et est toujours le talon d'Achille de ce moteur pas comme les autres.

 

Avec un carter de forme ovale à l'intérieur duquel tourne un arbre moteur relié à un piston triangulaire, le moteur rotatif est passablement plus simple que celui qui s'en remet au mouvement alternatif. En ce qui a trait à la consommation, la RX-8 actuelle dotée de la version R3 du bi-rotor Mazda consomme en moyenne un bon 2 litres de plus que ses rivales à moteur conventionnel. Le rotatif n'est pas non plus un ami de la planète par ses émissions de gaz à effet de serre.

Et la fiabilité?

Si la fiabilité de cette mécanique a fait des progrès, elle laisse encore à désirer et la consommation d'huile (1 litre aux 5000 km) est toujours préoccupante, ce qui signifie que les joints d'étanchéité posent encore problème. Au vu de tous ces ennuis, les constructeurs ont quitté le bateau un à un, excepté Mazda.

La firme japonaise a offert toute une série de modèles sous la dénomination RX depuis la première RX2 jusqu'à la RX 8 en passant par les RX 4, RX 3 et RX 7, la populaire devancière de la RX-8 actuelle. Aucun de ces modèles n'a permis de consacrer l'oeuvre de Félix Wankel comme une mécanique sans faille. À chaque étape, Mazda débitait la même rengaine: «notre rotatif a subi de nombreuses améliorations, le rendant plus fiable et plus économique ». Malgré ces belles promesses, il y avait toujours un hic et la consommation était encore et toujours à un niveau élevé par rapport au moteur à essence.

La plus récente RX-8 en fait la preuve avec des chiffres à faire dresser les cheveux sur la tête de n'importe quel écologiste. Onze litres aux 100 sur autoroute contre 15 en ville traduisent assez éloquemment la gloutonnerie de ce moteur, capable de tourner à 9000 tours minute, mais dépourvu d'un couple suffisant pour rendre la conduite agréable à allure moyenne.

En plus de persister à conserver un moteur à piston rotatif dans sa gamme, Mazda a consacré des sommes importantes afin de clamer sa supériorité en course automobile. En 1991, ses efforts étaient récompensés et l'usine remportait les prestigieuses 24 Heures du Mans avec une voiture de course équipée d'un rotatif d'une cylindrée équivalente a 2,6 litres développant pas moins de 700 ch a 9000 tours-minute.

40 ans d'effort

Est-ce par orgueil, par obstination ou je ne sais quoi que Mazda continue à s'esquinter sur ce moteur et à l'offrir dans une voiture dont il ne s'est vendu que 166 exemplaires au Québec en 2007 ? C'est sûrement un bel exemple de l'acharnement des ingénieurs à vouloir extraire toutes les qualités du moteur rotatif tout en le débarrassant de ses faiblesses. Mais, il me semble qu'après 40 ans d'efforts, on devrait lancer la serviette. Or, c'est mal connaître le sens de la perfection des Japonais qui croient encore au potentiel de ce moteur ne comptant que 5 pièces en mouvement contre 85 pour un moteur classique à 4 cylindres.

C'est là le principal avantage du rotatif qui ne comporte ni bielles, ni d'arbres a cames, ni de soupapes. Pas étonnant que l'ont ait vu en lui le moteur de l'avenir dès son apparition sur le marché. Hélas, personne n'a voulu suivre Mazda et plancher sur la meilleure façon d'amener le rotatif a un stade de mise au point qui en ferait véritablement le moteur de demain. Sauf que la rumeur veut que le constructeur japonais soit en train de mettre au point un rotatif qui serait le moteur d'appoint d'une voiture électrique hybride. La RX-8 finira peut-être par avoir une petite cousine.

Photo Jacques Duval, Collaboration Spéciale

La Mazda RX 8 est probablement la seule voiture du monde à être animée par un moteur rotatif.