Le phénomène serait anecdotique s'il n'était pas singulier et potentiellement dramatique. Le vol d'automobile chez les concessionnaires lors d'essais routiers est un problème récurrent. Cela ne fait rire personne. Même si des vols sont astucieux et audacieux.

En août dernier, c'est à la pointe d'un couteau qu'une vendeuse d'un concessionnaire Honda est descendue de voiture. Lors d'un banal essai routier dans la région de Montréal, le client est ainsi parti avec un Honda Pilot EX 2011.

Un autre homme a fait preuve d'un peu plus de tact et de politesse dans les mêmes circonstances. Assis au volant d'un Toyota RAV4 dont le moteur tournait sous l'oeil bienveillant du vendeur qui se tenait debout auprès de la portière ouverte, le voleur a poussé le représentant pour s'enfuir avec le véhicule en le gratifiant d'un... «merci».

Ces deux exemples de vol rapportés à trois ans d'intervalle sont encore déplorés occasionnellement, affirme la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec (CCAQ). «On fait de la sensibilisation à chaque fois qu'un concessionnaire est victime d'un tel sinistre. Cela se produit souvent, trop souvent», soutient son président, Jacques Béchard.

Ne vous étonnez donc plus si votre concessionnaire Ford ou Toyota monte systématiquement avec vous pour faire le tour du quartier. Ou si celui-ci vous fait signer une autorisation d'essai routier avec photocopie de votre permis de conduire à la clé (même si cette mesure ne permet pas de déceler un vol d'identité).

Ces précautions sont d'autant plus importantes que les enjeux se résument en espèces sonnantes et trébuchantes. Certaines assurances peuvent carrément refuser de couvrir le vol si aucun employé n'était à bord du véhicule au moment des faits. «Il n'y a pas vraiment d'exclusion de couverture mis à part dans le cas où c'est un employé qui vole, précise Julie Bellemare, conseillère aux affaires publiques au Bureau d'assurances du Canada (BAC). Mais la compagnie d'assurance peut exiger un engagement formel du concessionnaire à assurer la présence d'un représentant dans la voiture avec le client à chaque essai.»

Le BAC et la corporation ignorent l'ampleur du phénomène. Tout comme ils ne savent pas si toutes les voitures sont retrouvées. Les services de police ne comptabilisent pas les vols d'autos de manière aussi précise.

Si les concessionnaires ne rechignent pas à faire essayer la voiture convoitée, les essais ne sont plus tout à fait ce qu'ils étaient.