Le ministre des Transports américain Ray LaHood a accentué sa pression mercredi sur Toyota, au risque de s'attirer des critiques sur la vigueur de ses propos, le gouvernement américain étant actionnaire de GM et Chrysler, deux concurrents du constructeur japonais.

«J'ai l'intention d'appeler (Akio) Toyoda», le président de Toyota, pour lui exprimer les «préoccupations» du gouvernement américain, a déclaré M. LaHood à la presse à l'issue d'une audition au Congrès sur les rappels de millions de voitures Toyota depuis l'automne.

«Nous ne lâcherons pas Toyota d'une semelle pour nous assurer que (le constructeur) a fait tout ce qu'il a promis pour rendre ses véhicules sûrs», a insisté le ministre.

Mardi, M. LaHood avait déclenché l'offensive par un communiqué cinglant: «Toyota prend certes des mesures responsables maintenant, mais il est malheureux qu'il ait fallu tant d'efforts pour en arriver là».

Il rappelait que son ministère (DoT) avait averti à maintes reprises le constructeur japonais de l'urgence de son problème de pédales d'accélération, allant jusqu'à se rendre au Japon pour rencontrer la direction du premier constructeur mondial et convoquer ses dirigeants aux États-Unis en janvier.

«Nous n'en avons pas fini avec Toyota», ajoutait le ministre tandis que le DoT menaçait le constructeur de sanctions financières à cause de la lenteur de sa réponse au problème.

Pour Rebecca Lindland, analyste d'IHS Global Insight, les dirigeants de «Toyota n'ont cessé de dire qu'ils avaient été très pro-actifs, qu'ils avaient réagi rapidement. Le DoT a voulu signifier clairement que c'est lui qui a forcé Toyota à suspendre ses ventes».

Le constructeur japonais, qui avait annoncé le 21 janvier le rappel de plus de 4 millions de véhicules aux États-Unis à cause de problèmes de pédales d'accélération, a fini par suspendre le 26 janvier la vente et la production de huit modèles en Amérique du Nord.

À cela s'ajoute un autre rappel datant de fin septembre portant sur 5,3 millions de voitures équipées d'un tapis de sol pouvant lui aussi coincer l'accélérateur.

La NHTSA, l'agence américaine de sécurité routière, qui dépend du ministère de M. LaHood, a annoncé mercredi enquêter également sur d'éventuels dysfonctionnements du système électronique qui pourraient avoir causé des problèmes de pédales d'accélération.

Elle a précisé à l'AFP étudier en outre une série de plaintes reçues sur les freins des modèles de véhicules hybrides Prius.

Dans sa démonstration de fermeté, M. Lahood a affirmé au Congrès: «Si vous possédez un véhicule (Toyota), cessez de le conduire, apportez-le chez un concessionnaire pour le faire réparer». Des déclarations qui ont sur le moment accéléré le déclin du titre du constructeur, entamé par l'annonce de problèmes sur les freins de la Prius.

Plusieurs médias américains, dont la chaîne financière CNBC, ont accusé le ministre de conflit d'intérêt. L'État américain possède en effet 60% de General Motors, le premier constructeur américain, et est l'un des principaux actionnaires de Chrysler.

Le ministre a dû tempérer ses propos: «Je pensais avoir dit que si vous possédiez l'une des voitures (concernées par les rappels) et si vous aviez un doute, vous deviez l'apporter chez un concessionnaire».

Cela n'a pas convaincu Jeremy Anwyl, analyste du site spécialisé Edmunds.com, pour qui «cette volte-face n'aide pas les automobilistes qui reçoivent des informations contradictoires».

«Nous apprécions les clarifications du secrétaire LaHood», a sobrement commenté Toyota, rappelant au passage qu'il employait 172 000 personnes en Amérique du Nord.