Qui a dit que Chris Bangle, le chef styliste de BMW, s'était calmé? À regarder le X6 de BMW, on se demande si, en cette ère riche en multisegments, le constructeur bavarois n'a pas mêlé les genres une fois de trop avec ce Sport Activity Coupé (tiens, un nouveau segment?). À côté de tout ce qui roule, le X6 détonne. Il choque aussi un peu. Chose certainel e X6 avance en terrain inconnu puisqu'on ne lui connaît pratiquement aucun concurrent direct.

Anguleux, insolite avec son épaulement latéral très prononcé et sa calandre incurvée, le style du X6 alimente bien des conversations. Mais BMW semble avoir atteint son objectif, à en juger par la réaction des consommateurs croisés sur la route.

En effet, il séduit l'amateur blasé par les formes figées des utilitaires actuels, qui, à quelques détails près, ressemblent tous à la juxtaposition de deux boîtes à chaussures. La proposition de BMW intrigue aussi et certains esprits caustiques se demandent si le X6 n'est pas le nouvel Aztek de Munich.

Qualifié de coupé par son constructeur malgré ses quatre portes, le X6 est un engin imposant. Son toit, fuyant vers l'arrière, donne toute la place à un immense pare-brise qui contraste avec la toute petite lunette arrière. Le galbe de ses ailes, ses voies très larges et ses roues de 19 pouces renforcent le côté athlétique de la bête.

Malgré son gabarit imposant, ses portes s'ouvrent sur un habitacle conçu pour quatre occupants seulement. Quant au hayon, comme tout le reste, il surplombe le sol de très haut, ce qui oblige à hisser les bagages dans le coffre. Ce dernier est très profond et capable d'emporter quatre sacs de golf sous un cache rigide, que l'on peut ranger sous le plancher. Pratique.

En revanche, BMW a prévu, pour les parkings au plafond bas, une double hauteur d'ouverture du hayon, réglable par les vérins de compensation. Ce hayon nous a d'ailleurs donné beaucoup de fil à retordre parce qu'il a en refusé de s'ouvrir une fois sur deux.

Un aménagement... BMW

L'aménagement intérieur ressemble au style BMW, au X5 surtout, dont dérive naturellement le X6. Avec un tableau de bord aux lignes épurées et une console centrale légèrement tournée vers le conducteur, comme dans le bon vieux temps, l'ensemble plaît.

À cela s'ajoute un équipement encore plus complet, à condition d'ouvrir son chéquier. Et c'est là que ça devient carrément abusif. Sur le plan de la qualité, il n'y a rien à redire, sinon que le levier de vitesse façon "joystick" paraît non seulement très fragile, mais aussi très dépareillé par rapport à l'habitacle très sobre. Il y a aussi le système iDrive qui pose problème, en raison de sa trop grande complexité. Mais ça, vous le saviez sans doute déjà puisque nous répétons le même message depuis 2001...

Enfin, il y a la visibilité vers l'arrière qui est également problématique et qui invite pratiquement à s'offrir, moyennant supplément toujours, une caméra de recul, même si celle-ci ne résout pas tous les maux.

Côté boulons et rondelles, rappelons que le X6 dérive techniquement de l'actuel X5, qui partage avec lui la même chaîne d'assemblage à Spartanburg, en Caroline-du-Sud. Le X6 est équipé de série de la transmission intégrale intelligente BMW xDrive, qui assure une répartition variable du couple entre l'essieu avant et l'essieu arrière. Elle applique, par exemple, plus de couple à la roue arrière à l'extérieur des virages. Même à vitesse modérée, ce système unique au monde augmente sensiblement la précision directionnelle, la motricité en virage et, par le fait même, l'agilité du véhicule. Dans les virages pris à vive allure, il améliore la stabilité, même lorsque le conducteur braque le volant de manière abrupte ou lève inopinément le pied. Il garantit en outre une motricité accrue, peu importe le coefficient d'adhérence de la chaussée.

Sous le capot, on trouve un moteur à six cylindres en ligne de 3 litres gavé par deux turbos dont la puissance s'établit à 300 chevaux. Selon les motoristes de BMW, cette mécanique met 6,9 secondes pour atteindre 100km/h. Cette mesure s'est révélée très modeste à en juger par nos temps, réalisés eux aussi avec un accéléromètre électronique. Cette rapidité d'exécution étonne d'autant plus que le X6 n'est pas exactement un maigrelet avec ses 2200kg.

Qu'à cela ne tienne, le six-cylindres répond toujours présent et la boîte semi-automatique à six rapports, la seule offerte, se charge de relayer en vitesse les immenses ressources de ce moteur. En revanche, le maniement de son levier devient agaçant et il faut plusieurs centaines de kilomètres de vie commune pour l'apprivoiser et savoir s'il faut ou non appuyer sur un bouton pour engager la marche arrière ou pour l'immobiliser.

Chose certaine, ce groupe motopropulseur tire plus calmement l'essence de son immense réservoir que le V8 4,4 litres «Twin Turbo» que BMW proposera de boulonner à bord du X6 d'ici à la fin de l'été. Ce moteur à huit cylindres n'impressionnera pas seulement par sa vivacité exceptionnelle, mais aussi par sa compacité. C'est le premier huit-cylindres à essence avec un turbocompresseur logé dans le V formé par les deux rangées de cylindres. Impressionnant? Pas autant que la rapidité à laquelle ce moteur est capable d'avaler tout le contenu de son réservoir.

Béquilles électroniques

Tout comme le X5, le X6 compte toujours sur plusieurs béquilles électroniques, dont le système de direction active, qui permet de faire varier la démultiplication en fonction de la vitesse. Tourner un volant, accélérer, freiner; c'est à peu près tout ce que demandera au conducteur le volumineux "Béhème", dont l'électronique embarquée se charge de trouver la meilleure solution de transmission et de recherche d'adhérence.

Au volant, l'aisance du X6 laisse songeur, car il ménage le confort (encore faut-il que la chaussée soit en bon état) et le silence si on observe une conduite coulée. Il va de soi que sa puissance peut être titillée; le BMW fait alors preuve d'une certaine agilité que son encombrement ne laissait pas supposer.

En fait, il ne reste à son pilote qu'à gérer une chose: les freinages. La hauteur du poste de pilotage masque un peu les sensations de vitesse, et l'optimisme est proscrit dans cet exercice. Malgré leur taille imposante, les quatre disques ont fort à faire; mais ils le font, avec énergie et détermination.

Rapide et agile compte tenu de sa taille, le X6 impressionne par sa ligne et ses bonnes manières sportives. En revanche son encombrement, sa consommation et le nombre de personnes invitées à son bord en font une offre anachronique en cette période où l'automobile est appelée à trouver des solutions collectives et individuelles de mobilité plus respectueuses de l'environnement. Hormis les «happy few» qui pourront se l'offrir, le X6 a pour seul intérêt un style plus décalé encore que le FX d'Infiniti -son concurrent le plus direct- qui, pour beaucoup moins cher, en offre autant sinon plus à plusieurs égards.