Radio-Canada redemande au CRTC que toutes les télévisions généralistes aient accès aux revenus d'abonnement au câble, comme les chaînes spécialisées, et ce dès janvier.

Plaidant l'urgence de la situation et la «crise» qui frappe présentement la télévision généraliste au pays, Radio-Canada a invité le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) à donner accès à ces revenus d'abonnement non seulement aux télévisions généralistes privées, comme TVA et TQS, mais aussi au diffuseur public généraliste.

Comparaissant devant le CRTC mercredi, à Gatineau, la direction de Radio-Canada a soutenu que la situation était si urgente qu'il fallait dès maintenant établir un «tarif intérimaire» pour toutes les télévisions généralistes, lequel entrerait en vigueur dès le mois de janvier 2010. Après, le tarif pourrait être ajusté, le cas échéant.

Le vice-président principal des services français de Radio-Canada, Sylvain Lafrance, a fait valoir que c'était la télévision généraliste qui diffusait les grandes séries, si coûteuses à produire, ainsi que les bulletins d'information et les émissions d'affaires publiques, et non les chaînes spécialisées. Et ce sont les généralistes, aussi, qui sont présentes dans les régions, pas les spécialisées, a plaidé M. Lafrance.

«Il faut créer un équilibre actuellement entre les spécialisées et les conventionnelles pour être sûr que les conventionnelles continuent de jouer leur rôle de catalyseur dans le monde de la télévision. Et si on ne le fait pas, on va affaiblir l'ensemble de notre télévision», a prévenu M. Lafrance.

Le temps presse et c'est pourquoi le grand patron des services français de Radio-Canada voudrait avoir accès à ces revenus provenant des abonnés au câble et au satellite dès janvier 2010. «Il y a urgence actuellement parce que le problème, il est tout de suite; il n'est pas dans deux ans», a-t-il lancé en entrevue après sa comparution.

«Ça n'a pas de bon sens que, quand vous êtes un abonné du câble, vous payez pour tout un paquet de chaînes que vous n'écoutez pas, mais vous ne payez ni pour TVA, ni pour Radio-Canada, ni pour TQS à travers l'abonnement au câble. Ça me semble complètement anormal et ça vient aujourd'hui totalement déséquilibrer le système», s'est plaint M. Lafrance.

Lundi, le CRTC a lui-même fait état d'une étude qu'il a commandée et qui indiquait qu'en imposant un tarif de distribution - aussi appelé redevance d'abonnement - de 50 cents par abonné par mois par chaîne généraliste, une somme de 352 millions $ serait ainsi générée, soit 260 millions $ pour les chaînes privées généralistes et 92 millions $ pour Radio-Canada et CBC.

Interrogé à savoir si, selon lui, les abonnés du câble et du satellite seraient prêts à voir leur facture augmenter de 50 cents par chaîne généraliste par mois, M. Lafrance a répondu que ce ne serait pas nécessairement le cas.

«Il faudrait voir sur la facture totale du câble, parce que moi, comme abonné du câble, je paie pour beaucoup de chaînes que je n'écoute pas. Alors comment va être réparti l'argent des abonnés du câble? Je ne sais pas. Est-ce que ça va provoquer une augmentation? C'est ce qu'il faut voir. Moi, je pense qu'il est anormal, actuellement, que les gens ne paient pas une partie de leurs frais d'abonnement aux chaînes qu'ils écoutent le plus», a répliqué M. Lafrance.

Fait à noter, ces audiences sur le renouvellement des licences des télévisions privées ne devaient pas porter sur les fameuses redevances d'abonnement au câble, le CRTC ayant rejeté récemment l'idée d'accorder le même accès à ces redevances aux chaînes généralistes.

Mais celles-ci reviennent à la charge, estimant qu'elles ne sont pas sur un pied d'égalité avec les chaînes spécialisées, surtout dans le contexte où leurs autres revenus, ceux provenant de la publicité, sont en baisse, pendant que les revenus des entreprises de distribution des signaux (satellite et câble) grimpent.

En après-midi, le câblodistributeur Cogeco, présent au Québec et en Ontario, s'est opposé à cette idée que des redevances d'abonnement soient versées aux chaînes généralistes comme elles le sont aux chaînes spécialisées.

Selon son vice-président aux affaires corporatives, Yves Mayrand, les télés généralistes ne font que ressasser le même discours que l'an dernier, parce qu'elles n'acceptent pas la décision du CRTC.

M. Mayrand s'est demandé à voix haute si les difficultés financières des télés généralistes étaient vraiment d'origine structurelle, comme elles le prétendent, ou bien conjoncturelle ou si elles ne provenaient tout simplement pas de leurs décisions d'entreprises.

M. Mayrand a qualifié de véritables «paiements de péréquation» ce que demandent les télévisions généralistes, à savoir une redistribution des revenus entre les entreprises de distribution des signaux (satellite et câble) et les chaînes de télévision.