Les années turbulentes ont l’avantage de nous fournir une matière féconde pour les revues de fin d’année. C’est peut-être ce petit plus dans l’actualité – qui nous a pourtant rendus fort anxieux – qui donne à cette 18cuvée de Revue et corrigée un petit peu plus de piquant qu’à l’habitude.

Avec pour toile de fond la crise climatique et la progression de l’intelligence artificielle (IA), les créateurs de la populaire revue théâtrale ont abordé une multitude de sujets, de la chute en popularité de la CAQ aux pépins vécus par le REM, en passant par les drags, la grève des enseignants et des travailleurs de la santé, et j’en passe !

Les cinq interprètes – Pierre Brassard, Benoît Paquette, Monika Pilon, Marie-Ève Sansfaçon et Marc St-Martin – ont ouvert la revue de l’année de belle manière avec un numéro musical qui visait justement à souligner la présence de plus en plus grande de l’IA dans nos vies. Ils ont chanté leur parti pris pour « l’humain » pendant que les erreurs techniques se multipliaient !

La suite de cette revue mise en scène par Natalie Lecompte a été un feu roulant de sketches à la fois sur scène et sur écran, avec de nombreux numéros chantés, faut-il souligner.

Revue et corrigée en quelques photos
  • Marie-Ève Sansfaçon, Benoît Paquette et Pierre Brassard dans un sketch où le premier ministre François Legaut se fait conseiller par ChatGPT.

    PHOTO DAVID OSPINA, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

    Marie-Ève Sansfaçon, Benoît Paquette et Pierre Brassard dans un sketch où le premier ministre François Legaut se fait conseiller par ChatGPT.

  • Les cinq interprètes de Revue et corrigée 2023 ont rendu hommage aux Cowboys Fringants.

    PHOTO DAVID OSPINA, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

    Les cinq interprètes de Revue et corrigée 2023 ont rendu hommage aux Cowboys Fringants.

  • Marie-Ève Sansfaçon et Monika Pilon incarnent ici les sœurs Boulay.

    PHOTO DAVID OSPINA, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

    Marie-Ève Sansfaçon et Monika Pilon incarnent ici les sœurs Boulay.

  • Marc St-Martin et Pierre Brassard dans une scène de La petite vie

    PHOTO DAVID OSPINA, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

    Marc St-Martin et Pierre Brassard dans une scène de La petite vie

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Mention spéciale à Marie-Ève Sansfaçon, qui a incarné avec virtuosité Ginette Reno, chantant dans les allées d’un Jean Coutu, mais aussi Ariane Moffatt et Mélanie Boulay (avec Monika Pilon, qui interprétait sa sœur Stéphanie) dans un duo hilarant où les sœurs Boulay ont chanté (par deux fois) des tounes de Noël déprimantes.

À la fin, c’est Diane Dufresne que Marie-Ève a incarnée de brillante manière, tandis que Monika Pilon y allait d’une interprétation enlevante de Marjo.

Dans l’arène politique, outre le sketch – efficace – du premier ministre François Legault (Pierre Brassard), qui s’en remet à ChatGPT pour relancer le troisième lien, on a eu droit à un running gag avec des apparitions répétées de Bernard Drainville (Benoit Paquette), qui tente de recruter des enseignants parmi le public. Notre ministre de l’Éducation a même menacé de chanter si personne ne se proposait.

Autres moments de bonheur : la pub de gouvernement du Québec sur le déclin du français, avec le fameux faucon pèlerin – qui aurait pu être diffusée telle quelle – enrichie par des scènes joliment absurdes. Mais aussi cette quête pour trouver un fax, façon Mission impossible, afin d’envoyer un document dans un centre hospitalier.

Du côté télévisuel, quelques émissions ont été parodiées ou gentiment écorchées, comme Martin Matte en direct, dont les cotes d’écoute ont chuté de moitié depuis son lancement. Ici, Martin Matte (Pierre Brassard) est consolé par Christian Bégin (Benoit Paquette) qui lui propose de faire des exercices d’acteur pour s’améliorer. Un moment assez divertissant.

On a aussi droit à des parodies de La petite vie, Un gars, une fille, Survivor et Indéfendable, qui accueille un Donald Trump se réjouissant des poursuites qui s’accumulent.

L’actualité internationale est peut-être l’enfant pauvre de cette revue de fin d’année autrement assez réussie. Outre cette parenthèse sur Trump et un gag sur M. Niet, mettant en scène un Vladimir Poutine qui efface ses opposants un à un, pas un mot sur la guerre Israël-Hamas (l’éléphant dans la pièce) ou sur l’élection de l’ultralibéral d’extrême droite Javier Milei en Argentine, par exemple.

Impossible de vous parler de tous les gags ou vignettes qui passent en coup de vent – il y en a vraiment beaucoup, et pas toujours d’égale qualité.

L’équipe de la Revue a quand même fait un joli hommage aux Cowboys Fringants dans le dernier tiers du spectacle en chantant à cinq une pièce sur l’air de L’Amérique pleure en réécrivant les paroles. Une belle petite respiration dans une revue qui défile à la vitesse grand V, qui reprend aussitôt après, et qui se conclut par un medley où chanteurs populaires se passent le témoin, avant d’entonner Oxygène, de Diane Dufresne, dans une finale en apothéose.

2023 Revue et corrigée

2023 Revue et corrigée

Avec : Pierre Brassard, Benoit Paquette, Monika Pilon, Marie-Ève Sansfaçon et Marc St-Martin. Mise en scène : Natalie Lecompte.

Au Rideau Vert, Jusqu’au 7 janvier 2024

7,5/10