Le musicien Gregory Charles s’attaque cet hiver au grand classique La mélodie du bonheur, production pour laquelle il signe la mise en scène. Éric Paulhus y tient le rôle du capitaine von Trapp et Klara Martel-Laroche, celui de Maria Rainer. Quatre questions au trio de cette comédie musicale intemporelle.

Quel est votre souvenir le plus vivace de La mélodie du bonheur ?

Gregory Charles : Le premier film que mes parents ont vu ensemble, c’était La mélodie du bonheur en 1965 ! On l’a regardé en famille un nombre incalculable de fois. J’ai aussi vu la pièce sur scène à New York, Chicago, Toronto, Londres, Montréal. Lorsque j’ai fait ma première audition pour entrer dans la chorale du village, j’ai chanté Edelweiss ! En plus, j’ai enseigné à répétition ce répertoire pendant 25 ans. Pour moi, c’est un grand opéra du XXe siècle !

Éric Paulhus : Mes souvenirs se rapportent tous au film que j’ai vu enfant et que je n’avais pas revu depuis. C’est un souvenir empreint de nostalgie. Je viens du milieu de la musique ; j’ai d’ailleurs fait partie des Petits chanteurs de Laval avec Gregory de 6 à 10 ans ! J’ai découvert le théâtre par des comédies musicales comme La mélodie du bonheur. Ces personnages qui racontaient une histoire m’ont donné envie de faire du théâtre.

Klara Martel-Laroche : Je me souviens d’avoir vu ce film très jeune. J’étais assise dans le salon chez nous et dès que le film s’est terminé, j’ai instantanément demandé que mes parents le remettent. Je l’ai vu trois fois d’affilée ! J’ai toujours adoré les vieilles comédies musicales de ce genre ; ça fait tellement de bien à écouter, même si l’histoire n’est pas légère quand on y pense bien.

Quelle est votre chanson préférée ?

GC : C’est une chanson qui n’existait pas dans le spectacle sur Broadway en 1959, mais qui a été ajoutée dans le film : Something Good (Une bonne action en version française). Elle est dans la même famille que plusieurs autres chansons, mais elle est meilleure encore. L’enchaînement d’accords est brillant. C’est beau. Les paroles disent : j’ai dû faire quelque chose de bien pour qu’il m’arrive quelque chose d’aussi heureux.

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Éric Paulhus endosse les habits du capitaine von Trapp dans la version française de La mélodie du bonheur.

EP : La chanson que j’adore interpréter reste Chanson des collines. C’est un tournant pour mon personnage. Le capitaine, qui se chicane avec Maria, entend ses enfants chanter cette pièce et décide d’embarquer avec eux. C’est tellement fort ! Il a occulté la musique de sa vie à cause de la mort de sa femme, mais à ce moment, on voit son armure craquer. Chaque fois, ça me fait de l’effet !

KM-L : J’ai toujours eu un gros faible pour la pièce J’ai confiance (I have confidence en anglais). Je l’avais un peu oubliée, mais en vieillissant, j’ai appris à mieux la connaître. C’est un texte fort, qui arrive dans un moment intéressant pour mon personnage. Maria dit que malgré la peur qu’elle a de quitter le couvent, elle le fait. Elle se fait confiance, elle prend des risques. C’est inspirant.

Quel est votre plus grand bonheur de participer à cette production ?

GC : Je réalise que j’ai acquis une expérience — de vie, mais aussi de jeu — que je peux partager. C’est ce que je fais sur ce projet, le plus gros que je dirige sans être moi-même sur scène. Je suis content de ça. Travailler avec des enfants est aussi un grand bonheur. Toutefois, c’est plus souffrant de ne pas être sur scène. J’ai davantage le trac maintenant que lorsque je fais partie du spectacle. Il y a un lâcher-prise à acquérir !

EP : Jouer avec cette équipe est un grand bonheur. Il y a beaucoup de relève dans la distribution, des jeunes qui arrivent avec un désir immense de faire ce dont ils rêvent depuis des années, ce pour quoi ils ont étudié. Et ils ont tellement de talent vocalement, c’en est presque intimidant ! L’équipe est vraiment très soudée.

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Klara Martel-Laroche incarne Maria Rainer.

KM-L : Jouer cette pièce est un rêve pour moi. L’équipe est fantastique et les enfants… ils sont tellement inspirants dans leur spontanéité ! C’est le plus gros projet auquel j’ai participé dans ma carrière. C’est un immense bateau. J’aime aussi la version renouvelée qu’on propose. Par exemple, les décors sont magnifiques, très vivants ; ils apportent une autre dimension que ce qu’on voit d’habitude.

Qu’est-ce que La mélodie du bonheur a encore à nous dire en 2022 ?

GC : La mélodie du bonheur charrie des valeurs universelles : la compassion, la famille, la bonté, la beauté, l’écoute… Les religieuses se mettent ensemble pour aider Maria à trouver sa voie. Et le capitaine, le personnage principal à mes yeux, passe de l’obscurité à la lumière, beaucoup grâce à la musique. Cette pièce nous rappelle qu’ensemble, avec passion, on peut toujours s’en sortir.

EP : Cette pièce n’est pas moralisatrice. Elle nous dit qu’on a tous le droit d’accéder au bonheur. Oui, il y a en filigrane un contexte historique riche, avec la présence des nazis, mais c’est la liberté d’être soi-même qui prédomine à mes yeux. La mélodie du bonheur rappelle qu’on a le droit de faire des choix et d’aller au bout de ses sentiments pour pouvoir être heureux.

KM-L : Ce qui me touche le plus dans cette œuvre, c’est l’authenticité des personnages. C’est une grande leçon. Maria ne sait pas mentir et cette authenticité a un effet autour d’elle. À son contact, le capitaine devient de plus en plus honnête avec lui-même. Parfois, il faut partager tout ce qu’on vit avec les autres pour pouvoir aller plus loin. Et ça, ça ne se démode pas.

La mélodie du bonheur, version 2022

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Gregory Charles a choisi une approche lyrique pour cette nouvelle mouture de La mélodie du bonheur.

Ce n’est pas la première fois que La mélodie du bonheur est montée à Montréal. Denise Filiatrault a dirigé ce classique en 2010 (repris en 2013). Cette fois, la pièce est présentée en anglais et en français (avec deux distributions différentes). De son propre aveu, Gregory Charles a voulu donner à l’œuvre un caractère lyrique, confiant la partition à un orchestre d’une dizaine de musiciens, qu’on pourra voir sur scène. Quant à la distribution, elle compte plus de 25 chanteurs et danseurs, dont 6 enfants.

Du 3 au 30 décembre, au Théâtre St-Denis

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