Depuis 2005, Revue et corrigée est à la scène ce que le Bye bye est à la télévision : l’occasion d’un grand défoulement collectif pour boucler notre année en beauté. Après avoir sauté une édition en 2020, le spectacle de 2021 boucle donc deux années en une ; ainsi que l’une des périodes les plus chargées de l’actualité, de triste mémoire.

Alors, elle est bonne, cette cuvée 2021 ? Oui, ce spectacle est jouissif, sans temps morts, et juste assez baveux pour nous faire oublier le déluge de mauvaises nouvelles qui nous tombent sur la tête.

Cette revue humoristique sera éditoriale ou ne sera pas. Tous les sujets (ou presque) y passent et les sketchs sont défendus par un (très) solide quintette – Véronique Claveau, Tommy Joubert, Joëlle Lanctôt, Benoit Paquette et Marc St-Martin –, sous la direction enlevée de Natalie Lecompte. On revient sur les complotistes, les wokes, la masculinité toxique, les artistes, les journalistes et les politiciens… sans oublier les antivaccins (les absents ont toujours tort, hi, hi).

La vraie et la fausse Céline

L’un des moments forts de la soirée, c’est la bataille des tubes entre les deux Céline : la « vraie » (Véronique Claveau, très en voix !) et la version de Valérie Lemercier (excellente Joëlle Lanctôt). Avec en prime une Maman Dion (Tommy Joubert, tordant !) qui apparaît pour exécuter sa note. Certes, Céline Dion est souvent présente dans les revues du Rideau Vert. Or, avec l’interminable feuilleton à propos du film Aline, le délire collectif des Québécois autour de leur mythe national a atteint des sommets himalayens ! Mieux vaut en rire.

PHOTO FRANÇOIS LAPLANTE DELAGRAVE, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

Les sketchs sont défendus par un (très) solide quintette.

Parmi les autres temps forts, la parodie de Si on s’aimait, dans laquelle Louise Sigouin (hilarante Joëlle Lanctôt) tente de sauver la relation entre François Legault et Gabriel Nadeau-Dubois : « Lequel de vous deux est le codépendant dans le couple ? », dit la sexologue. Mentionnons le numéro sur Damien Robitaille, l’homme-orchestre du confinement ; la savoureuse imitation de l’animatrice Pénélope McQuade ; le sketch des deux Denis (l’ancien et le nouveau Coderre) à la sauce Abbott & Costello ; les désopilants clins d’œil à la désopilante chanson G. A. F. A. de Nicolas Ciccone…

Julie Snyder (une personnalité faite sur mesure pour le talent du comédien Marc St-Martin) arrive sur scène en planche à roulettes pour animer La semaine des 4 Julie, et reviendra pour son face-à-face surréaliste avec Anne Dorval (Claveau, d’une grande ressemblance). La revue souligne aussi l’omniprésence de Rita Baga en 2021. La reine des drags se voit ici offrir une nouvelle collaboration à… TVA Sports (un numéro toutefois moins réussi).

PHOTO FRANÇOIS LAPLANTE DELAGRAVE, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

Tommy Joubert et Marc St-Martin dans 2021 revue et corrigée

Les années COVID

De COVID-19, il sera bien sûr question, mais sous l’angle révélateur des dérives que le virus provoque chez les mortels. Dans le grand théâtre de la vie, le vaudeville n’est jamais très loin du drame humain. Dans une parodie de Découverte, l’animateur Charles Tisseyre (Benoit Paquette) observe avec détachement les gestes de complotistes. Dans un autre, les théories cryptoscientifiques de Didier Raoult sont exposées (mais sans Stéphan Bureau, hélas). On souligne au passage le « manque de jugement » d’Anne Casabonne, ainsi que les errements de Guillaume Lemay-Thivierge. Grosse année pour les membres de l’UDA…

Bref, ce n’est pas parce que notre époque est opaque qu’on ne vaut pas une grande risée collective.

Consultez le site web du Rideau Vert

2021 revue et corrigée

Mise en scène : Natalie Lecompte. Script-édition : Luc Michaud

Théâtre du Rideau Vert, Jusqu’au 31 décembre

7/10