(Las Vegas) Le cauchemar est passé. La page est tournée. Après le retour de Mystère en début de semaine, c’était au tour d’O, jeudi soir, de lever le rideau. Un spectacle aquatique et acrobatique unique sur la Strip, relancé ici par le Cirque du Soleil avec panache, et une sacrée montagne d’émotions.

Le président du Cirque du Soleil, Daniel Lamarre, n’a d’ailleurs pas été capable de retenir ses larmes, peu avant la « première ». « C’est très émotif, et c’est normal », a-t-il lancé, les yeux rougis et la voix un brin étranglée, devant un parterre de journalistes réunis joyeusement pour l’évènement. « Célébrer le retour du Cirque du Soleil dans la ville de Las Vegas, la capitale du divertissement, c’est très symbolique. »

Tout un changement de décor, après le retour de Mystère, franchement plus discret, médiatiquement parlant, en début de semaine. Disons que cette fois-ci, on avait mis le paquet.

Toujours est-il que c’est un fait : après une longue année d’arrêt forcé, le Cirque du Soleil revient de loin. Mais il ne s’est visiblement pas trop ankylosé. Et pour marquer le retour attendu d’O, un des flambeaux de Las Vegas, un défilé avait été organisé dans l’hôtel-casino Bellagio, hôte du spectacle et de ses quelque 10 000 représentations en plus de 20 ans.

Sous une tempête d’applaudissements, artistes et dirigeants ont défilé entre les machines à sous du casino, jusque dans le majestueux et coloré hall d’entrée. « Je suis tellement heureux de vous revoir », a soufflé aux artistes leur président, en les serrant tour à tour bien fort. Et à voir leurs yeux briller au-dessus de leurs masques, on devine que c’était réciproque.

« Las Vegas est la ville du divertissement, c’est l’essence même de la ville », a renchéri en marge de ce défilé Bill Hornbuckle, président de MGM Resorts International (propriétaire, entre autres grands hôtels, du Bellagio). Le message ici pour lui est très clair : « Nous sommes en train de dire au monde : nous sommes de retour ! »

PHOTO DENISE TRUSCELLO, GETTY IMAGES POUR LE CIRQUE DU SOLEIL

Les 77 artistes d’O s’en sont donné à cœur joie, avec des numéros hauts en couleur, défiant tantôt les lois de la respiration (numéros aquatiques), tantôt celles de l’équilibre (numéros aériens).

Un retour célébré avec le même enthousiasme par les artistes, dont trois Québécois, rencontrés peu avant le spectacle, jeudi. « Je suis tellement heureuse d’être de retour, a confirmé, le sourire fendu jusqu’aux oreilles, la nageuse artistique Gabrielle Lepage. Ça fait tellement longtemps que je pense à ça ! » « C’est notre passion, la scène, a renchéri David Poirier, artiste aérien. Et là, c’est pas juste O, on rouvre le Cirque du Soleil ! J’ai des frissons juste à y penser ! »

Ils sont prêts. Ils sont plus que prêts ! Ils ont hâte ! […] C’est un trip de gang !

Pierre Parisien, directeur artistique

Et soyons francs : ça paraît. Devant une salle pleine à craquer (et ses 1806 sièges occupés par des spectateurs pour la plupart non masqués, faut-il le répéter), les 77 artistes (dont beaucoup, à l’inverse, sont masqués), pourtant arrêtés pendant plus de 400 jours, s’en sont donné à cœur joie, avec des numéros hauts en couleur, défiant tantôt les lois de la respiration (numéros aquatiques), tantôt celles de l’équilibre (numéros aériens). Le tout, entrecoupé d’applaudissements et de sifflements d’un public soufflé, justement. On peine à croire qu’ils ne sont pas montés sur une scène (ou n’ont pas plongé dans une piscine !) pendant un an.

Il faut dire qu’on ne sait plus trop où donner de la tête, pendant ces 90 minutes de tableaux tous plus esthétiques et physiques les uns que les autres, originaux et créatifs, oscillant entre humour et émotions (fortes), jouant avec l’eau et le feu, plongeons et acrobaties, sur terre, dans la piscine (amovible !) comme dans les airs.

Ovation amplement méritée, d’ailleurs. « Adoré ! », « au-delà de mes attentes », « fantastique », « merveilleux », les touristes (tous américains, il va sans dire !) croisés à la sortie n’avaient que de bons et beaux mots pour le spectacle. La plupart tout sourire. Mais certains carrément aux larmes, notamment Rachel Johnson, du Texas : « C’est tellement beau après tout ce qu’on vient de traverser, a-t-elle confirmé. C’est très émouvant. »

Croisée par hasard, l’ex-directrice artistique du spectacle Krista Monson (années 2000) était aussi très émue de sa soirée. « C’est vraiment une soirée spéciale, c’est vraiment touchant. C’était un moment remarquable de connexion. Et ça démontre à quel point ce spectacle est intemporel, il parle à la planète, il parle à notre humanité ! »

À noter : à peine relancé, le spectacle affiche déjà quasi complet pour les semaines à venir.

En bref de Las Vegas

Enfin ouvert !

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE L’HÔTEL

Le Resorts World Las Vegas, qui accueillera Céline Dion à l’automne, a enfin ouvert.

Le tout nouvel hôtel-casino Resorts World Las Vegas, lequel doit accueillir Céline Dion en novembre, a enfin ouvert ! Inauguré le 24 juin dernier (tandis qu’au Québec, tous les yeux étaient rivés on sait où), il s’agirait ici de l’hôtel le plus cher de l’histoire de Las Vegas (« jusqu’au prochain », disent ici cyniquement les observateurs). Un projet de 4,3 milliards de dollars américains, aux dimensions vertigineuses : on parle de 3500 chambres, d’un théâtre de 5000 places, de 117 000 pi2 d’espace de jeu, de 40 restaurants, de 7 piscines, etc. À noter, outre la diva, le Resorts World accueillera Katy Perry, Carrie Underwood, Luke Bryan, Zedd et Tiësto. Et c’est nulle autre que Miley Cyrus qui y lancera les festivités du 4 juillet, un spectacle qui s’annonce grandiose, culminant, promet-on, avec des feux d’artifice de circonstance.

La ménopause, version Vegas

PHOTO SILVIA GALIPEAU, LA PRESSE

Menopause – The Musical est la doyenne des comédies musicales à Las Vegas.

Le saviez-vous ? Véronique Cloutier (et sa pétition, rassemblant 110 000 signatures, faut-il le rappeler, revendiquant une hormonothérapie bio-identique gratuite et universelle) n’est pas seule à lever le voile sur la réalité des femmes ménopausées. Dans un tout autre registre, disons plus léger, mais pareillement truffé de vérités, Menopause – The Musical attire ici les foules depuis 15 ans maintenant, ce qui en fait aussi la doyenne des comédies musicales à l’affiche (sans jeu de mots !) dans la ville du vice. Après plus de 5000 représentations et un entracte pandémique, le spectacle (qui rend en prime hommage à des classiques musicaux des années 1960, 1970 et 1980) doit reprendre d’ici trois semaines, à l’hôtel-casino Harrah’s.

Le spectacle qui ne reviendra pas

PHOTO SILVIA GALIPEAU, LA PRESSE

Jean-François Blais, saxophoniste québécois, membre de l’équipe de Zumanity depuis ses débuts

On a beaucoup parlé de la renaissance du Cirque du Soleil sur la Strip cette semaine. Pourtant, tous ses spectacles à Las Vegas ne reviendront pas – et non les moindres. On se souvient que le rideau est définitivement tombé sur Zumanity, cabaret érotique créé par René-Richard Cyr et Dominic Champagne, une annonce qui en a surpris beaucoup, en novembre dernier. Parmi ceux-ci, Jean-François Blais, saxophoniste québécois, membre de l’équipe de Zumanity depuis ses débuts, il y a 17 ans. « On faisait 10 shows par semaine, 476 shows par année, c’est quelque chose, quand même ! », dit-il en souriant, attablé dans une sympathique microbrasserie de l’Arts District. Et la relance de cette semaine le lui rappelle douloureusement. « C’est difficile, avoue-t-il. La gang me manque ! Je suis envieux, ben oui ! » N’empêche qu’il a trouvé le moyen de s’occuper. Entre autres boulots (il fait de l’immobilier, organise des tournois de tennis et compose à droite et à gauche !), il se produit aussi dans des restos et autres pool parties. Merci, reprise. « N’importe quoi, dit-il en riant. I’m all for it ! »