Dire que Rod Stewart est un vieux routier relève de l'euphémisme. Il fait carrière depuis plus de 40 ans. Il ne défie pas vraiment les modes, mais trouve le moyen de s'y adapter. Avec succès, le plus souvent, comme en fait foi ses American Songbook, sa populaire série d'album consacrés aux grandes chansons américaines du XXe siècle. Hier, devant un peu plus de 11 000 fans, il a toutefois délaissé ces standards pour interpréter ses classiques à lui.

La façon la plus simple de décrire ce spectacle serait de dire qu'il a offert un concert de type best of. Juste durant la première demi-heure, il a interprété des chansons du début des années 70 au tournant des années 90. La foule lui a réservé un accueil chaleureux lorsqu'il a entonné Some Guys Have All the Luck et n'a vraiment pas changé d'humeur en entendant It's A Heartache, The First Cut Is the Deepest, Forever Young et You Wear It Well, écrite avec Ron Wood des Rolling Stones en 1971.

Rod Stewart, qui arborait un veston argent sur une chemise blanche et une cravate noire, n'a pas semblé en bonne forme vocale au tout début du spectacle. Sa voix rauque a eu du mal à s'imposer dans l'amphithéâtre. Deux ou trois chansons plus tard, c'était déjà beaucoup mieux. Il ne possède pas un organe d'une puissance extraordinaire et le son n'était pas nickel, mais son charme - heureusement doublé d'un minimum d'autodérision - opérait.

La foule, décidément heureuse de l'entendre faire ses plus grands succès, ne s'est pas gênée pour l'accompagner. Des milliers de voix se sont élevées dans le Centre Bell au refrain de You're In My Heart et de Have You Ever Seen the Rain. Et quand elle ne chantait pas, une partie de la foule, au parterre surtout, dansait. Sur Loveshack et This Old Heart, son hommage d'hier au son Motown, en l'absence de sa chanson The Motown Song.

Sa version de Father And Son, bien que très moyenne (et accompagnée d'une vidéo cliché au possible où on le voyait avec son père et puis ses fils) a aussi suscité une petite émotion dans le Centre Bell. Rod Stewart n'a toutefois pas trop versé dans ce genre mièvrerie, même s'il avait clairement décidé de prendre le chemin facile pour plaire à ses fans. Ses nombreux hits et leurs refrains accrocheurs faisaient presque le travail tout seul.

Après avoir passé plus d'une heure sur scène, le grand charmeur a retrouvé sa fibre rock le temps de Hot Legs, livrée avec une énergie qu'on ne le savait pas encore capable de déployer. Vu le titre de cette chanson trempée dans le rock bluesy des années 70, c'est sans doute le bon moment pour signaler que le chanteur écossais était accompagné hier d'un orchestre de six musiciens, de trois choristes et aussi de trois musiciennes invitées (dont une violoniste et une saxophoniste) qui avaient justement de longues jambes...

Rod Stewart n'a évidemment pas omis de reprendre Stay With Me des Faces. Confronté à des guitares passablement brûlantes, sa voix n'a pas fléchi. Ne manquait plus que Have I Told You Lately et Maggie May pour qu'il ait fait le tour de la question. Ce qu'il a fait en fin de spectacle. Et au rappel? Da Ya Think I'm Sexy. Si on se fie à l'applaudimètre, la réponse est oui.