La chorégraphe Deborah Dunn investit l'Agora de la danse avec Délire domestique, oeuvre-collage de sept solos déclinés autour de la thématique domestique. Un concept intimiste consacré à l'identité féminine ponctué de jolies idées, mais à l'intérêt variable.

Le délire domestique part d'une prémisse intéressante, voire intrigante, soit l'univers domestique, irrémédiablement associé à la femme. Une thématique qui ouvre la porte à une multitude d'interprétations et de déclinaisons, que ce soit les stéréotypes, l'aliénation de la femme au foyer, l'ennui domestique, la maternité, la folie et même la beauté cachée dans ces gestes banals associés aux tâches ménagères.

Un terrain fertile pour Deborah Dunn, qui danse ici avec six autres interprètes, des femmes (Delia Brett, Sara Hanley, Andrée Juteau, Louise Levacalier, Elise Vaderborght), mais aussi un homme (Dean Makarenko), dans sept solos entrecroisés. Les interprètes, sans jamais danser ensemble, vont se croiser furtivement sur scène d'un tableau à l'autre, assurant une transition généralement réussie entre les différents univers.

Utilisant à bon escient de simples éléments scénographiques qui permettent de changer rapidement d'atmosphère - un frigo, des fraises, de la vaisselle, un panneau de tapisserie -, Dunn nous transporte dans sept univers distincts, chacun accompagné par l'habillage sonore du bidouilleur et musicien Lukas Pearse, qui passe la majorité du spectacle à l'arrière-scène, visible à travers une toile voilée.

La gestuelle inspirée de différentes actions domestiques - faire la cuisine, la vaisselle, le ménage - se nourrit de clichés pour mieux les détourner. De banal, le mouvement devient intime, témoin d'un état intérieur.

Galerie de portraits

On y croise la ménagère parfaite (Elise Vaderborght), qui transforme la simple préparation d'un gâteau en ballet gracieux et sensuel, une femme dans sa maison bourgeoise consumée par l'ennui (Deborah Dunn) et un homme (Dean Makarenko) en pleine psychose culinaire. La toujours aussi électrique Louise Lecavalier, de son côté, n'en finit plus d'astiquer sa vaisselle, dans une séquence répétitive jusqu'à l'aliénation.

Audrée Juteau, en petit chaperon rouge pétillant totalement emporté dans sa bulle tourbillonnante, offre la meilleure performance de la soirée. On en aurait pris plus.

Certains passages donnent lieu, et c'est là que la pièce nous a semblé la plus réussie, à des tableaux décalés et surréalistes, teintés d'insolence et qui font sourire, alors que d'autres s'étirent et manquent de force de frappe, comme le solo final, qui évoque une forme de libération. Bref, un spectacle inégal, qui aurait peut-être gagné à réduire le nombre de solos présentés.

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À l'Agora de la danse ce soir, 20 h et demain, 16 h.