Trois ans après son tout premier spectacle solo, François Bellefeuille était de retour sur scène, hier soir au Théâtre Maisonneuve, pour présenter Le plus fort au monde, une nouvelle mouture où l'on retrouve bien sûr le personnage de scène colérique qui a fait son succès, avec cette fois une touche beaucoup plus personnelle.

Bien des destins d'humoristes se précisent lors d'un deuxième spectacle. Poursuivra-t-il exactement dans la même veine? Fera-t-il un virage à 180 degrés ? N'était-il que la saveur du mois? On avait bien hâte de découvrir où s'en irait François Bellefeuille avec son personnage irascible et sans filtre. Et on espérait secrètement qu'il s'efface juste un tout petit peu pour laisser plus de place au curieux humoriste.

Pour Le plus fort au monde, François Bellefeuille a, à notre grand bonheur, choisi de puiser dans sa vie de famille pour alimenter les délires de son personnage, avec lequel il renoue dès les premières secondes, à travers le récit de sa haine des soirées vins et fromages. «C'est pas pour rien que les couteaux ont un bout arrondi, c'est pour pas que je me les plante dans la gorge!», lance-t-il, tout aussi irrité que quand il parle des cartes de fidélité. «Tous ceux qui ont la carte Air Miles, sacrez votre camp! Avez-vous la carte François? Avec la carte François, vous gagnez un tour... dans le coffre de mon char!» Toujours aussi efficace, le personnage colérique s'adoucit quelque peu en parlant de sa blonde «rencontrée sur Kijiji». Une relation qui le pousse à bien des compromis qui ont le don de le faire enrager, comme une visite au Centre d'interprétation de la courge ou les convictions environnementales de sa conjointe.

La seconde moitié du spectacle est de loin la plus réussie. François Bellefeuille y présente sur un tableau une série de dessins qu'il a réalisés à l'âge de 8 ans, et que sa mère a retrouvés.

Un segment hilarant où l'on découvre notamment «Superman, l'homme le plus fort au monde avec son pénis». Les divagations de François Bellefeuille, qui s'ajoutent au caractère comique des dessins eux-mêmes, laissent les spectateurs presque en larmes à force de rire.

L'humoriste aborde avec originalité sa paternité, évoquant avec le sarcasme qu'on lui connaît les concours de comparaisons entre parents des prouesses de leurs enfants.

«Mon enfant a conduit à 14 mois et il est mort dans un accident de char. Ça a mis un frette au parc!», grogne-t-il avant de digresser sur sa propre enfance et son adolescence, tout en projetant une série de photos plutôt cocasses.

Le public hilare découvre un François Bellefeuille aux prises avec un surplus de poids qui a perdu 60 livres à l'âge de 25 ans. Puisant dans l'intime, l'humoriste a concocté des textes efficaces qui, conjugués à son sens aiguisé de l'observation, ne manquent presque jamais leur cible.

Seul petit bémol de la soirée: le numéro consacré à un livre sur les insultes à travers le monde dont l'humoriste a sélectionné les pages les plus insolites. On a un peu de mal à embarquer dans ce tableau qui semble arriver comme un cheveu sur la soupe.

La plus grande qualité de François Bellefeuille est sans aucun doute son originalité, qu'il doit en grande partie à sa livraison et à sa gestuelle. Pour son deuxième spectacle, il passe le test haut la main. Il ne se répète pas, fait évoluer son personnage grâce à un ton plus personnel, plus rassembleur. Au cours des six dernières années, l'humoriste sera ainsi passé de découverte de l'année à poids lourd de l'humour.

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Le plus fort au monde. François Bellefeuille. Les 2 et 3 février à L'Olympia.

Photo André Pichette, La Presse