Dès le début de son spectacle présenté hier au Monument-National, Yves P Pelletier admet qu'il n'est pas évident de se lancer dans un premier one-man-show à 57 ans. «Ça prend beaucoup de courage... pour vous!»

Et il n'a pas tort, tant en ce qui concerne le public que lui-même. Intitulé Moi?, ce premier spectacle en solo, sans ses comparses de Rock et Belles Oreilles, est en quelque sorte l'occasion d'entrer un peu dans la tête de ce drôle d'oiseau qui, dirait-on, aura 10 ans pour toujours. Celui qu'on appelait autrefois «le maigre de RBO» propose un humour potache, parfois bébé, un peu absurde, avec quelques pointes délicates, le tout présenté dans un décor assez chouette, très «petit gars avec ses jouets», où l'on a parfois l'impression d'être devant une scène pour enfant. Bref, Yves P Pelletier nous invite à jouer avec lui, mais nous n'arrivons pas toujours à comprendre les règles de son univers particulier.

Si on rit par moments à l'apparition de ses personnages les plus célèbres (Stromgol, Cherze Siachon ou monsieur Caron), dans ses confessions comiques sur lui-même, notre réaction ressemble souvent à «Hein? Quoi? Quessé?». C'est que lui-même le dit: «On dirait que je ne m'intéresse pas. Je ne suis pas mon genre.» Et plutôt que de découvrir QUI il est, il nous invite à découvrir CE QU'il est. Vous suivez?

Parmi les plus «flyés»

Yves P Pelletier, c'est un curieux, un sensible, un naïf, un peureux et un grand voyageur qui a fui son Laval natal pour découvrir que le monde était rempli d'endroits comme Laval. C'est un comique, aussi, mais est-ce vraiment un stand-up? Ça, c'est moins sûr. Ses blagues tombent parfois à plat, ses numéros ressemblent plus par moments à de sympathiques conférences qu'à de l'humour pur et dur, comme s'il hésitait entre la confession et la livraison «punchée». Ce qui est certain, en revanche, c'est que son ADN est de la lignée des humoristes les plus «flyés» du milieu, les Denis Drolet, André Sauvé ou François Bellefeuille, qui ont, eux, plus d'expérience de la scène sans un groupe.

Pour les fans de Pelletier, qui était celui qui apportait la touche de folie et d'absurde à RBO, d'art et d'âme aussi, c'est l'occasion de renouer avec des personnages qu'il n'utilise malheureusement pas assez dans son spectacle.

Les numéros les plus réussis arrivent à la fin. Avec Cherze Siachon qui nous donne des cours de dyslexie vocale (on ne comprend toujours pas comment il parvient à torturer le langage comme ça sans pogner une crampe au cerveau), ou le bum Capharnaüm qui veut nous apprendre le «vive-ensambe». Pour celui-ci, qui aime son Jésus, peu importe que les policiers affichent des symboles religieux, «on s'en crisse, c'est des boeufs pareil!». Et ça se termine sur son fameux bulletin de nouvelles pour les sourds, toujours hilarant, impossible à décrire puisqu'une image vaut mille mots.

En fin de compte, on aura appris un peu ce qu'est Yves P Pelletier, qui, avec ce spectacle, ne brisera certainement pas son image de touchant excentrique.

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Moi? Yves P Pelletier. Jusqu'au 19 janvier au Monument-National. En supplémentaire le 20 avril.