Les fans de Philippe Bond étaient manifestement heureux de retrouver l'humoriste sur scène hier, pour la première de son deuxième spectacle solo au St-Denis, et ce bonheur était partagé. On a surtout vu Bond à la télé, ces dernières années, où son talent comique le sert, bien sûr, mais dans un cadre plus strict. Il était évident que l'animateur avait rangé son costume et qu'il remettait avec plaisir son habit d'humoriste, renouant avec un univers plus décontracté et plus près de sa vraie nature.

Philippe Bond appartient à cette catégorie d'humoristes qui sont plus près du «chum de brosse» que de l'éveilleur de conscience ou de l'excentrique de l'absurde. Son immaturité assumée (ainsi que celle de ses propres amis) est une source inépuisable d'anecdotes.

C'est précisément ce qui rend son show très sympathique, mais aussi sans grandes surprises. Disons que l'humoriste n'est pas allé chercher très loin dans son imagination pour meubler son spectacle. Comme beaucoup de ses collègues, il puise dans sa propre vie et dans son entourage la matière première de ses textes, sans trop exagérer, le côté comique étant justement le fait que tout ce qu'il raconte, dit-il, est passablement vrai. Mais serait-ce justement cette crise de la trentaine chez Bond qui le rend aussi attaché à ses bourdes d'une jeunesse qu'il étire? Il ne se gêne pas pour souligner son célibat, son irresponsabilité et son absence de paternité. Cela ressemble souvent à ces soirées entre trentenaires où on se raconte pour la centième fois ses conneries de la vingtaine, parce que même si on radote, on aime ces histoires drôles qui tissent nos mythologies personnelles.

Et, au fond, c'est le spectacle d'un gars qui a beaucoup travaillé depuis son premier spectacle solo. D'ailleurs, il commence celui-ci avec ce que l'expérience lui a appris comme humoriste, établissant une liste de règles pour les spectateurs qui lui en ont fait voir de toutes les couleurs par le passé. Le téléphone cellulaire dans les salles, les selfies douteux, les commentaires à voix haute, les groupies... À peu près tous les humoristes peuvent se reconnaître dans ces aléas inévitables du métier. Philippe Bond repasse aussi par les petits boulots d'avant la vraie carrière d'humoriste, par ses vieux amis avec qui il persiste à faire les quatre cents coups (ce qui irrite leurs copines, pour qui Bond est surtout une mauvaise influence), jusqu'à rendre hommage à Jean-Luc, improbable gaillard irrésistible, sorte d'ami indispensable qui mériterait une part des droits d'auteur.

Bref, un retour agréable, perfectionné par l'expérience - Bond a une aisance sur scène qui lui permet presque tout, même de faire des blagues scatologiques en présence de très jeunes spectateurs et leurs parents -, mais on dirait qu'il lui manque ce petit soupçon de vécu qui lui offrirait l'occasion d'approfondir ses thèmes. Ce qui nous rend curieux de voir son troisième spectacle, quand il traversera la crise de la quarantaine.

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Philippe Bond 2, jusqu'au 25 octobre au Théâtre St-Denis. Supplémentaires les 5 et 6 décembre et les 24 et 25 avril.