Près de six ans après avoir conclu un partenariat stratégique, le Cirque du Soleil et le Cirque Éloize mettent fin à leur association, a appris La Presse. Le directeur général et artistique d'Éloize, Jeannot Painchaud, a ainsi racheté la participation de 50 % du Cirque, devenant à nouveau seul maître à bord.

«Ce partenariat ne correspondait plus à la stratégie d'affaires du Cirque du Soleil, a confirmé la porte-parole du Cirque, Renée-Claude Ménard. On n'est plus dans la diversification de nos activités, ça ne correspond plus à notre réalité d'affaires. On veut se concentrer sur nos propres shows et ne pas se distraire dans d'autres compagnies.»

L'apport du Cirque consistait essentiellement à partager son carnet de contacts et à aider Éloize dans l'organisation de ses tournées internationales. Dès 2010, Éloize avait dit vouloir bénéficier de «l'expertise commerciale» du Cirque du Soleil. Ce qui a été fait dans la foulée de la création de son spectacle iD.

«C'était un partenariat qui visait à créer des synergies, précise René-Claude Ménard. On a toujours considéré Éloize comme un petit frère. On les a même logés chez nous pendant qu'ils rénovaient la gare Dalhousie. On les a mis en contact avec notre réseau de promoteurs, on les a aidés sur le plan des affaires et du marketing.»

Au Cirque Éloize, qui compte 35 employés permanents, la nouvelle n'a pas été mal reçue, bien au contraire.

«Ça mûrissait dans la tête de Jeannot depuis un certain temps.»

«Après plus de cinq ans, il [le directeur général et artistique Jeannot Painchaud] voulait reprendre le plein contrôle du Cirque, même si sur le plan artistique, on a toujours été indépendants, il y avait plus ou moins de projets qui venaient vers le Cirque Éloize...», affirme Maxime Charbonneau, directeur du développement des affaires et des communications au Cirque Éloize.

N'empêche, Maxime Charbonneau évalue positivement la participation du Cirque, qui a notamment permis à Éloize, dit-il, de «mettre en place un système de fonctionnement pour le booking, le financement, la comptabilité». «En étant sous la responsabilité du Cirque du Soleil, on a pu établir les meilleures pratiques dans la gestion de notre compagnie.»

Concrètement, Éloize a d'abord et avant tout eu accès aux contacts du Cirque. «C'est grâce à eux qu'on a pu organiser notre tournée de 98 représentations en Russie - la plus grande jamais réalisée par une compagnie occidentale, précise Maxime Charbonneau. Il y a aussi eu une tournée de six semaines au Japon menée par le producteur Fuji, partenaire du Cirque.»

Le retrait du Cirque du Soleil se traduira-t-il par un manque à gagner pour Éloize?

Le directeur du développement des affaires et des communications d'Éloize ne croit pas. «Le Cirque n'a jamais injecté de fonds dans le fonctionnement d'Éloize, précise-t-il. Il nous a aidés, par exemple, à assurer des prêts pour l'achat d'équipements. Aujourd'hui, on a plein de projets très prometteurs, notamment pour des événements spéciaux.»

Éloize, qui a annoncé il y a quelques jours une tournée en Chine, envisage aujourd'hui l'avenir avec optimisme. Ses deux spectacles de tournée, iD et Cirkopolis, sont toujours populaires. À tel point que deux nouvelles équipes d'iD et de Cirkopolis seront mises sur pied dans les prochains mois. Une nouvelle création verra également le jour cette année, au mois d'août.

Les choix du Cirque du Soleil

Du côté du Cirque du Soleil, la nouvelle direction du C.A. - présidé par l'homme d'affaires Mitch Garber à la suite de la vente du Cirque du Soleil au consortium mené par la firme d'investissement américaine TPG Capital - cherche à se défaire de toutes les activités du Cirque qui ne sont pas liées aux spectacles vivants, selon la porte-parole du Cirque.

Par exemple, le projet Heart, créé avec les chefs catalans Albert et Ferran Adrià dans l'île espagnole d'Ibiza, a été repris par Guy Laliberté (et sa compagnie Lune Rouge). Tous les projets d'investissement dans les bars - comme le Light de Las Vegas - ont également été abandonnés. La participation du Cirque dans l'agence Sid Lee avait elle aussi été retirée.

Malgré le désengagement du Cirque auprès de certains organismes communautaires du quartier Saint-Michel comme le Carrefour populaire, Renée-Claude Ménard affirme que le Cirque continue d'apporter sa contribution dans le quartier, mais différemment. 

«On ne crée plus des sites de Cirques du monde, il y en a déjà! Aujourd'hui, on aide les instructeurs de cirque social, mais on ne fait plus de démarchage.»

Elle donne également l'exemple d'Arts nomades, mis sur pied dans les écoles de Saint-Michel il y a 10 ans.

«C'est un projet qu'on a initié. On l'a développé, il fonctionne bien et il a été pris en charge par le réseau scolaire. On continue de le soutenir financièrement, mais pas de la même façon. Mon resto Saint-Michel, Vivre Saint-Michel en santé sont aussi des organismes qu'on aide, mais on ne s'investit pas de la même manière qu'il y a 30 ans, c'est sûr.»