Le cinéaste Rodrigue Jean et le comédien Gaétan Nadeau revisitent l'idée du zoo humain avec un spectacle conceptuel où il n'y aura «rien à voir», que des gens «à rencontrer»...

Il arrive qu'on joue au chat et à la souris avec les artistes. Le journaliste doit récolter un maximum d'informations et les créateurs, eux, veulent garder l'effet de surprise... Rencontrer Rodrigue Jean et Gaétan Nadeau à propos de Zoo 2011 a donné lieu à l'une de ces séances de «tournage autour du pot».

Pour la petite histoire, rappelons qu'en 1977, l'ancêtre du NTE (le Théâtre expérimental de Montréal) a présenté un spectacle déambulatoire basé sur l'idée du zoo humain avec entre autres un couple nu (Jean-Pierre Ronfard et Marie Cardinal), une femme accidentée (Anne-Marie Provencher), un homme-grenouille (Jean-Pierre Gravel) et... trois petits cochons. Des vrais.

Il n'y aura pas d'animaux dans la version 2011. Pas d'acteurs non plus. Rodrigue Jean et Gaétan Nadeau ont invité des citoyens ordinaires à présenter des «pratiques occultées» qui «échappent au contrôle de l'État». Par exemple? Le duo ne veut pas en donner, seulement préciser le contexte de cette oeuvre qu'ils qualifient de «machine à créer de la communauté».

Radiographie de la société

Ce contexte, il est d'abord social: disparition progressive de la classe moyenne, vent de droite qui s'exprime en politique comme dans les médias, désolidarisation avec les moins nantis, etc. À cet «air du temps», les créateurs opposent une chose qui, à leurs yeux, est en passe de devenir subversive: une simple rencontre.

«C'est comme une radiographie de la société, de gens auxquels on ne s'attarde pas en général», dit Gaétan Nadeau à propos du spectacle. «Ce n'est pas un focus sur la marginalité ou le Montréal underground, précise toutefois Rodrigue Jean. On n'est pas dans le spectaculaire du tout. Il y a des gens à rencontrer, mais il n'y a rien à voir au sens strict du terme.»

Zoo 2011 se veut d'abord un «espace de réflexion» que le visiteur pourra parcourir à son rythme. «On espère trouver une forme d'expression artistique qui reprenne contact avec la vie comme elle est», résume le cinéaste. Pas clair, mais intrigant.

Jusqu'au 29 octobre à Espace libre