Christian Vézina n'en finit pas de nous étonner avec son théâtre poétique. Après ses hommages à Gaston Miron et Michel Garneau, le poète et dramaturge à la tête du Théâtre Barbare remonte sur scène pour nous présenter un pot-pourri de l'oeuvre poétique singulière de Jacques Prévert.

La courte représentation d'une heure commence par l'interprétation de Dans ma maison, tirée du premier recueil de poèmes de Prévert, Paroles (1945). Christian Vézina donne le ton. L'interprète maîtrise parfaitement les mots de Prévert, qu'il magnifie grâce à un jeu sobre et inspiré, qui révèle tout le talent de ce parolier et conteur hors pair, fin observateur du quotidien et faux naïf .

Sur scène, une quinzaine de chaises sont placées face au public, avec une toute petite estrade au centre, au-dessus de laquelle est accrochée une robe longue, qui devient un des rares éléments de cette scénographie à la fois dépouillée et très vivante. Christian Vézina enchaîne les textes avec le même aplomb, la même aisance, mais aussi la fantaisie et l'humour de l'auteur populaire.

Dans une langue claire, avec ses jeux de mots et ses calembours, Prévert met en scène un assassin, un chômeur et un chauffeur de taxi dans un montage de Sur le fleuve, extrait d'Histoires. Suivent les hirondelles, omniprésentes chez Prévert, qu'il fait parler dans Événements: «Restez ensemble hommes pauvres», disent-elles à l'unisson. À la fin, un très bel extrait fait le récit d'un amour passé.

«Cet amour tout entier/Si vivant encore/Et tout ensoleillé/C'est le tien/C'est le mien/Celui qui a été/Cette chose toujours nouvelle/Et qui n'a pas changé/Aussi vraie qu'une plante/Aussi tremblante qu'un oiseau/Aussi chaude aussi vivante que l'été/Nous pouvons tous les deux/Aller et revenir/Nous pouvons oublier/Et puis nous rendormir/Nous réveiller souffrir vieillir/Nous endormir encore/Rêver à la mort/Nous éveiller sourire et rire (...)»

C'est beau, c'est accessible et c'est plein d'esprit. Christian Vézina nous donne véritablement l'impression d'avoir passé une heure avec Jacques Prévert. On le remercie.

Tout Prévert, jusqu'au 8 octobre à la Salle Fred-Barry.