Après avoir donné la parole à huit auteurs américains, le Théâtre de l'Opsis conclut son cycle états-unien en se tournant vers huit auteurs et auteurs-compositeurs québécois. Ceux-ci signent le dernier volet de cette aventure américaine imaginée par la directrice artistique et metteure en scène, Luce Pelletier.

Entamé en 2006 avec la création de la pièce Under Construction de Charles Mee (mise en scène par Serge Denoncourt), le cycle états-unien n'avait pas vraiment de ligne directrice. Les sept pièces qui ont suivi n'ont d'ailleurs pas été choisies au début du cycle, mais s'y sont ajoutées au fil des mois. Tout comme les acteurs et les metteurs en scène qui se sont succédé.

«Mon objectif, nous dit Luce Pelletier, qui a signé la mise en scène de quatre productions, était de trouver des dramaturges américains engagés, des beaux fous de différentes générations. Au-delà des pièces lisses et gentilles de Broadway et des théâtres institutionnels, je voulais savoir ce que les auteurs américains avaient dans le ventre! Je cherchais les Botho Strauss américains...»

Résultat: la recherche a été difficile. Selon la directrice artistique de l'Opsis, les voix originales, audacieuses ou critiques sont confinées à la scène underground. Elle a quand même réussi à dénicher quatre jeunes auteurs «passionnants», dont Sheila Callaghan (Ruines) et Lisa D'Amour (Anna Bella), et quatre auteurs plus âgés ou disparus, dont William Faulkner et Clifford Odets.

En rétrospective, le lien entre ces huit pièces paraît évident: chaque fois, on parle de la famille américaine. «Je n'ai pas fait mon choix de pièces en fonction d'un thème, mais c'est vrai que le dénominateur commun, c'est la famille. Ce n'est pas vraiment surprenant, puisque la famille nous permet de mieux connaître une société», nous dit-elle.

Des voix québécoises

Pour conclure le cycle, Luce Pelletier ne voulait pas d'un neuvième auteur américain. Elle a préféré entrer en contact avec des auteurs québécois pour savoir comment les États-Unis les ont marqués. Pour savoir aussi où en est le rêve américain. François Archambault, Michel-Marc Bouchard, Jasmine Dubé, Catherine Léger et Pierre-Yves Lemieux ont donc accouché de cinq courts textes.

Parallèlement à cela, trois auteurs-compositeurs ont signé les chansons de la pièce: Martin Léon, Émilie Proulx et Richard Séguin. Pour une création à petit budget, on peut difficilement faire mieux! Toute cette matière dramaturgique et sonore a été mêlée et fusionnée pour former: Les États-Unis vus par... dans un décor minimaliste dont seul l'Opsis a le secret, en l'occurrence: trois chaises recouvertes des couleurs du drapeau américain et quelques panneaux de bois.

Pour interpréter ces cinq histoires qui se chevauchent, les quatre acteurs ont dû travailler fort, puisque chacun doit interpréter cinq rôles différents, dans le désordre. Sans changement de costume. Catherine De Léan, Jean-François Nadeau, Benoît Rousseau et Marie-Hélène Thibault sont les interprètes de cette fin de cycle.

Luce Pelletier se garde de nous donner trop de détails, mais nous assure que le résultat est cohérent, même si les histoires sont très différentes les unes des autres. Par exemple, le texte de François Archambault est une parodie de la série Batman; Pierre-Yves Lemieux propose un vox pop où toutes les personnes interrogées affirment que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes; Michel-Marc Bouchard propose une comédie inspirée de la crise économique, etc.

Après la conclusion de ce troisième cycle - il y a eu le cycle Tchekhov en 1998, le cycle d'Oreste en 2002 -, l'Opsis annoncera le nouveau projet de la compagnie pour l'automne. Que restera-t-il de ce cycle états-unien? Des extraits vidéo, un recueil qui regroupera les textes qui ont été joués et, peut-être, nous glisse Luce Pelletier, une série de représentations à Washington.

L'Alliance française de Washington s'est en effet montrée intéressée à présenter Les États-Unis vus par... dans la capitale américaine au mois de mai. La directrice artistique de l'Opsis lui a d'abord conseillé de voir la pièce, «parce que c'est quand même un peu osé, et qu'on ne montre pas le côté le plus reluisant des États-Unis...»

N'empêche. Comme cadeau de fin de cycle, elle ne pouvait espérer mieux. Il faudra quand même attendre la première de mardi pour savoir si la délégation de Washington ira de l'avant!

Les États-Unis vus par... du Théâtre de l'Opsis, au Prospero du 23 février au 13 mars.