Avec sa pièce Baobab, le Théâtre Motus fait mouche. Depuis sa création l'été dernier au festival Petits bonheurs, ce conte musical africain - écrit et mis en scène par Hélène Ducharme - touche les bonnes cordes du jeune public, emballé par ce théâtre d'ombres et d'objets, de marionnettes et de masques. À voir absolument.

La genèse du projet Baobab vaut la peine d'être contée. Après avoir plongé plusieurs mois dans l'univers glacial des Inuits pour sa pièce Inuussia, la femme-phoque, présentée la semaine dernière au Festival Titirijai de Tolosa, en Espagne, la cofondatrice de Motus, Hélène Ducharme, avait envie d'un peu de chaleur.

«Mon ami Aboulaye Koné, m'a dit: tu dois aller à la rencontre de l'Afrique, raconte-t-elle. Oui, j'avais une idée de ce que je voulais écrire, mais je devais m'imprégner de la culture africaine et de ses traditions.»

L'auteure de Nombril et de Bulles s'est donc rendue au Mali et au Sénégal, dans une démarche de recherche. De ce périple en Afrique de l'Ouest, Hélène Ducharme fera deux rencontres déterminantes: Ismaïla Manga, artiste visuel sénégalais, qui a peint toutes les toiles de Baobab que l'on voit sur scène; et l'acteur Hamadoun Kassogué, le «Brad Pitt du Mali!» dixit l'auteure, qui a peaufiné la structure du texte, publié aux éditions de La bagnole, avec de magnifiques illustrations de Normand Cousineau.

À son retour au Québec, on peut dire que la mayonnaise a pris. Avec les musiciens Aboulaye Koné, issu d'une famille de griots du Burkina Faso et qui joue du balafon et du djembé, et Nathalie Cora (!), joueuse de kora (formée au Mali par Toumani Diabaté); ainsi qu'avec les comédiens Widemir Normil et Philippe Racine, Hélène Ducharme a réussi à donner vie à ce conte imagé qui met notamment en scène, un serpent, un marabout, un singe, une tortue et une grue.

L'histoire abracadabrante narrée par le griot du village, interprété avec beaucoup de panache par Widermir Normil - qui a une voix chaude et profonde -, débute par cette jolie entrée en matière: «Pour te raconter mon histoire, j'ai besoin de tes oreilles. Veux-tu me prêter tes oreilles?»

En quelques mots, il est question d'un baobab qui tombe amoureux de la terre. Y plonge ses racines (joli!) et a quatre enfants. Seul hic: le soleil, jaloux de cette histoire d'amour, refuse d'aller se coucher, brille à en brûler la terre, qui se met à craquer. Même son coeur se dessèche et se perd, raconte le griot.

De ce baobab, naîtra (dans un oeuf!), un petit garçon nommé Amondo, fils du village, qui aura pour mission de retrouver le coeur du soleil et de le plonger dans la terre pour retrouver la source d'eau. Et faire tomber la pluie. Pour cela, il doit voler la bosse de la sorcière du village; vaincre le gardien du baobab; déterrer l'os d'un vieux griot, etc.

Au fond, ce Baobab réunit, pardonnez la référence politique, toutes les «conditions gagnantes» pour séduire les tout-petits. Une quête; un héros; des méchants à vaincre (mais pas trop méchants non plus); des amis qui nous veulent du bien; des objets qui se transforment, comme le manche de la kora qui devient le cou d'une grue; le tout mêlé à des rythmes africains qui captent l'attention du jeune public. Qui dit mieux?

Le succès de Baobab tient plus à ses personnages colorés et à sa faune fantasque qu'à la performance de ses acteurs. N'empêche, le petit Amondo, marionnette en bois manipulée avec beaucoup de finesse par Philippe Racine, tient son bout. Mais les personnages les plus marquants sont sans conteste la sorcière, le singe, le marabout et la grue, interprétés avec des masques-costumes (appelés koteba) par des acteurs que l'on sait cachés, mais qui font un effet boeuf sur scène (surtout le singe, avec son popotin rouge!).

Un mot enfin sur le programme de Soutien à l'école montréalaise, qui a permis à des centaines d'enfants provenant d'une quinzaine d'écoles primaires de participer à des ateliers artistiques (musique, arts visuels et conte) avant d'assister à la représentation. De ce projet est née une petite expo menée par l'artiste visuel Michel Beaucage, que l'on peut voir à la Maison Théâtre. C'est ce qu'on appelle un projet bien ficelé.

Baobab, du Théâtre Motus. À la Maison Théâtre jusqu'au 3 janvier 2010. Pour les enfants de 3 à 8 ans.