Ce soir, Alfa Rococo prépare une version plus groovy et plus électro de ses petits refrains pop. Et plus rodée. Rencontre avec des «complices» musicaux.

L'été dernier aux FrancoFolies, Alfa Rococo se demandait comme remplir ses 60 minutes de concert.

«Ça nous paraissait long, raconte Justine Laberge, moitié du duo. Comme l'album venait tout juste de sortir (en mai), on avait seulement fait deux ou trois spectacles. On s'en tenait vraiment à ce qu'on connaissait.»

Une année plus tard, c'est le contraire. Car depuis qu'Alfa Rococo parcourt le Québec en Econoline, ses chansons ont passablement changé. Le duo, qui produit ses concerts, se transforme sur scène en groupe de six musiciens. Parmi eux, le guitariste de DJ Champion, le percussionniste des Tireux d'roches et un claviériste recruté au spectacle des finissants du cégep Saint-Laurent.

«Après quelque 80 concerts, les chansons sont devenues plus rock et électro. Et plus longues aussi, explique David Bussières, complice de Justine. On ajoute souvent des sections, comme un jam psychédélique dans Paradis artificiel. Notre défi cette année aux Francos, ce sera de condenser tout ça en une heure.»

Un septième musicien se joindra à eux ce soir: Jules, le DJ de Misteur Valaire. «On va en profiter, assure David. Avec lui, on mettra encore plus l'accent sur le groove électro. Deux ou trois ballades devront être laissées de côté.»

Du soleil à l'ancre

«Les gens qualifient souvent notre musique d'ensoleillée. C'est normal, quand on pense à sa naissance», raconte Justine, avec son indéracinable sourire en coin.

L'album Lever l'ancre a été composé en Europe. David travaillait alors comme musicien pour Dralion, un spectacle du Cirque du Soleil. Justine l'a suivi. Leur itinéraire passait par Barcelone, Séville, Zurich, Rotterdam et une ou deux autres métropoles européennes. Dans chaque chambre d'hôtel, un petit studio maison était installé.

Après la journée de travail au Cirque, il composait et jouait avec Justine. Et il épargnait patiemment pour produire leur premier disque.

«On vivait à deux sur un salaire, se souvient-elle. Fallait vraiment se serrer les coudes. Pendant que les gens autour de nous s'achetaient des iPod, on comptait nos sous. Mais on réussissait quand même à voyager un peu. Je me souviens d'un trip incroyable en bateau et en train de nuit pour se rendre à Marrakech. (...) Tout notre temps, on le passait comme ça en mode découverte. Je pense que ça s'entend dans les textes.»

Après quelques mois, le duo a dû choisir: poursuivre la tournée avec le Cirque et sa petite stabilité financière, ou retourner à Montréal enregistrer un disque.

«On a levé l'ancre pour revenir à Montréal. Le titre du disque renvoie à cela. Notre famille nous trouvait un peu cinglés, explique le guitariste de 31 ans. Ils craignaient presque qu'on crève de faim.»

Couple d'équipiers

Après 30 minutes d'interview, la question nous tracasse: vous êtes un couple, non?

«Oui, répond David. On ne s'en cache pas, mais on ne s'affiche pas non plus. Après tout, la base de nos chansons n'a rien à voir avec notre relation.»

«Je ne veux pas qu'on se minouche sur scène ou devant le groupe, poursuit Justine. Ça me mettrait mal à l'aise. Certains artistes le font, et ça leur va super bien. Mais pas nous.»

Au début, écrire à deux stylos était laborieux. Les influences de Justine sont franco - Gainsbourg, Leloup, M., Diane Tell et Souchon, un artiste qu'elle «n'a pas le droit de mettre chez nous», blague David. Ses références à lui viennent davantage de l'instrumental et de l'anglo, comme Beck, Ratatat, Gorillaz et les Beatles.

«Je haïssais certaines de nos premières compositions, et vice-versa, se souvient David. Mais aujourd'hui, ça fonctionne très bien. Il n'y a plus de compromis ou de médiation. On travaille en équipe, ce qui est très différent.»

Ce travail, les Français, Belges et Suisses le découvrent depuis ce printemps. En mai, le duo a été sacré «découverte» des Radios francophones publiques (Radio-Canada, Radio France, RTBF et Radio Suisse Romande). Les jours de pluie y tournait donc quatre fois par jour en mai et juin.

«On donnera quelques concerts en Europe cet automne. Certains prétendent que les aspects «pop légère» et «français international» nous aideront à percer là-bas. Honnêtement, je ne sais pas, indique David. Disons que je ne m'imagine pas encore riche avec un gros appart' à Paris. J'ai juste hâte de me rendre à l'aéroport avec ma guitare, mon ampli et mes pédales.»

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En concert ce soir à 22 h à la Zone Molson Dry. Gratuit.