Le compositeur montréalais et directeur artistique Louis Dufort voit dans la proposition du neuvième festival Akousma «une tendance vers le parcellaire, l'infiniment petit, l'étincelle du feu, vers ces particules de son transportant une énergie qui leur est propre».

Euh... Pouvez-vous expliquer davantage ? Le compositeur montréalais et directeur artistique d'Akousma s'exécute:

«Les nouvelles technologies numériques (par exemple les logiciels Max/MSP, C-Sound ou Super Collider) permettent aux créateurs de disséquer le son en temps réel, d'aller au coeur de la particule sonore, d'en dévoiler les caractéristiques insoupçonnées, d'en faire la synthèse granulaire comme les physiciens vont au coeur de l'atome et les microbiologistes au coeur de la cellule. Ainsi, ces outils nous permettent de nous retrouver à l'intérieur du son et de jouer avec son code génétique, si je peux utiliser cette image.»

Louis Dufort y voit donc une tendance, et cette tendance colore la programmation de ce festival des musiques numériques immersives présenté à l'Usine C, de mercredi à samedi inclusivement.

«L'électroacoustique, poursuit-il, sort d'une phase classique, phase où l'articulation du phrasé et la qualité narrative créaient un cinéma pour l'oreille. Plusieurs compositeurs d'aujourd'hui délaissent la trame narrative et explore le son de l'intérieur. Ils en aménagent l'infiniment petit et la beauté de leurs oeuvres se dégage de la structure interne du son. En ressort une écriture plus neutre qui se renvoie à elle-même.»

Pour bien illustrer ce courant esthétique, l'Usine C sera pourvue d'un «acousmonium», soit un «orchestre de  haut-parleurs» pas piqué des vers : pas moins de 42 enceintes acoustiques de marque D & B seront mises à la disposition des compositeurs invités à diffuser leurs oeuvres devant public. Avis au sceptiques: l'usage d'un tel attirail est un événement en soi pour quiconque aime la haute définition sonore. Trop rares sont les occasions d'accéder à de telles immersions, Akousma en est une de choix.

Compositeurs issus du milieu montréalais ou de l'étranger seront invités à illustrer cette tendance «articulatoire» au festival Akousma. Louis Dufort fournit des exemples:

«Le Québécois Maxime Corbeil-Perron et  la Britannique Manuella Blackburn utilisent ces données sonores particulaires et les esthétisent dans un contexte poétique. Le Montréalais Martin Tétreault, lui, explore le parcellaire via le signal électrique que lui fournissent les cartouches de ses tables tournantes. Quant à l'Américain Keith Fullerton Whitman, il travaille sur des microstructures à partir de synthétiseurs analogiques; ça part d'un signal électrique qui déclenche des ondes que le musicien ensuite modèle et filtre à sa façon. D'une manière plus bruitiste, l'Espagnol Francisco Lopez et l'Américain Daniel Menche créent des murs de sons, opaques, denses apparemment uniformes, et témoignent d'une approche maximaliste.»

Prêts à pénétrer à l'intérieur du son?

Akousma est présenté à l'Usine C, du mercredi 24 au samedi 27 octobre. Infos: https://www.akousma.ca/

Photo archives La Presse

Louis Dufort