La matière de Wooden Arms, de Patrick Watson, se présente sur scène comme un continuum magnifique plutôt qu'un spectacle de pop indie ou rock indie. Idéal pour un amphithéâtre de taille moyenne. Dans le cadre d'un concert gratuit destiné à des dizaines de milliers de personnes? Pour l'un des trois plus importants événements extérieurs prévus sur la Place des Festivals? Risque d'anti-climax? Beau risque, on en convient.

Voilà l'entrée en matière de l'avocat du diable à cette rencontre fixée avec le groupe de Patrick Watson, à quelques jours du grand test. «On n'y pensait pas jusqu'à ce que tu nous en parles», réplique Simon Angell, avant d'échapper un rire contagieux. Plus sérieusement, le guitariste croit en ses moyens, en ceux de ses collègues.

 

«Je ne sais pas... Nous avons joué dans tellement de contextes différents, nous avons acquis l'expérience des scènes extérieures... Notre nouveau spectacle a beau être perçu comme un tableau comme tu le suggères, ça peut quand même fonctionner à grande échelle. Quelle que soit la forme qu'elle prenne sur scène, cette musique peut toucher beaucoup de monde.»

Et Patrick Watson s'empare de la rondelle.

«En spectacle, chaque membre de ce groupe se donne corps et âme. Il y a de la sueur, de l'intensité, de l'implication. Et je crois que n'importe quel public aime suivre la progression d'un spectacle, aussi différent soit-il. Si, bien sûr, ce que nous lui proposons est captivant, il sera prêt à nous accompagner dans le voyage.»

Cela étant, Patrick Watson sait les enjeux d'une telle entreprise... Tout un défi que d'identifier les ajouts originaux d'un spectacle de masse, et ainsi se montrer à la hauteur des attentes dans un tel cadre.

«Nous avons passé les trois dernières semaines à imaginer des procédés visuels originaux afin d'étoffer notre performance. Nous avons, par exemple, invité un spécialiste indien des ombres chinoises. Incroyable! De manière générale, nous voulons des idées modestes et inventives qui fonctionnent bien dans ce contexte.

«Oui, c'est tout un défi. C'est notre ville, c'est un honneur pour nous de jouer à Montréal, invités par le Festival de jazz. Plein de gens qui ne nous connaissent pas iront découvrir notre musique. Bien sûr, nous pourrons en conserver les meilleurs éléments pour notre tournée qui se poursuit par la suite.»

Soupçon de jazz

Les compléments d'orchestre, on s'en doute bien, ne seront pas que visuels. Au fait, peut-on même parler d'un angle jazz à ce spectacle spécial?

«Notre musique, répond Patrick Watson, implique l'improvisation, ça se vit chaque soir que nous montons sur scène. Pour cet événement, cependant, nous avons invité le saxophoniste Yannick Rieu afin qu'il joue sur la première chanson. Ti-Guy Nadon sera aussi parmi nous.»

Un soupçon de jazz, donc. Quant aux adaptations purement orchestrales, le chanteur estime qu'il ne fallait pas trop charger la facture: «Au quatuor à cordes qui nous accompagne déjà, nous avons ajouté quatre cuivres sous la direction de Jean-Nicolas Trottier - tuba, trompette, trombones. Lhasa sera aussi invitée.»

D'autres surprises, laisse-t-on entendre, sont à prévoir. Et puisque ce sont des surprises...

«En tout cas, assure Watson, ce ne sera certainement pas le spectacle auquel vous avez assisté à La Tulipe. D'ailleurs, je ne crois pas que nous étions tout à fait prêts pour ce concert. Même avant cette offre du Festival de jazz, nous avions déjà procédé à plusieurs changements depuis le début de la tournée.»

Le mot de la fin revient à Simon Angell: «Ça devient si gros cette affaire! Il y a tant de personnes qui courent autour de nous afin que l'événement soit une réussite. Je dois maintenant éviter de me questionner sur sa bonne marche, me concentrer sur ma propre contribution. Donner la meilleure performance possible, faire de mon mieux, et justifier tous ces efforts fournis.»

Événement gratuit mettant en vedette le groupe de Patrick Watson, demain, 21h, Place des Festivals.

EN UN MOT

Le groupe de Patrick Watson a créé un des grands albums de pop indie en 2009, le voilà prêt à prendre le risque d'un concert de masse qui déborde largement son rayonnement.

ALBUM ESSENTIEL

Wooden Arms. Ce grand album se veut un itinéraire poétique qui frôle le fantastique. Musique de chambre résolument contemporaine, arguments rock et folk, mélodies poignantes, diversité de références.