Le premier acte de Norma fait habituellement entre 83 et 90 minutes. Au Festival Bel Canto de Knowlton dimanche après-midi, il totalisait deux heures. Parce que le concert - l'opéra de Bellini était donné en version concert, devant lutrins - a commencé avec 20 minutes de retard et qu'on a fait un premier entracte au beau milieu du célèbre air Casta Diva pour mettre au point le système de climatisation.

L'immense chapiteau tout blanc aménagé sur Tibbits Hill et dominant toute la région montagneuse du lac Brome est une réussite en soi: l'acoustique (contrôlée par Martin Léveillée) est très satisfaisante, les sièges sont confortables et il n'y fait pas trop chaud. (Que deux spectateurs aient été transportés au dehors par des ambulanciers, c'est une chose qu'on a déjà vue dans les églises de Lanaudière!) Les écrans latéraux de surtitres sont petits, mais on s'y fait. Bref, il n'y a pas de réel problème, sauf un: ces «commodités» ne servent pas le plus pur des messages.

Nous voici donc à Knowlton, c'est-à-dire, par l'imagination, en Gaule sous l'occupation romaine. La grande-prêtresse Norma est ici une jeune et belle inconnue dans la trentaine du nom de Micaela Carosi, avec l'allure d'une grande chanteuse et une voix assez ferme. Sa conduite vocale n'illustre hélas! pas précisément les vertus associées au bel canto: madame détonne avec une charmante inconscience et n'exécute pas trilles et gruppettos avec la précision requise.

Norma aime en secret l'ennemi de son peuple, le proconsul romain Pollione, dont elle a eu deux fils. Adalgisa, l'une des jeunes prêtresses de Norma, lui révèle qu'elle aime un «jeune homme»... qui n'est autre que Pollione. Ce qui provoque la colère de Norma et la surprise des 600 spectateurs de voir sortir des coulisses le très impressionnant profil d'un «jeune homme» qui pourrait être Falstaff. Francisco Casanova, inconnu lui aussi, projette une bonne voix de ténor, mais à l'aigu faible.

Kate Aldrich, qui incarnait Adalgisa dans la production de l'Opéra de Montréal de 2005, chante bien et joue avec vérité, dans les limites du concert. John Relyea possède la voix et l'autorité du grand-prêtre Oroveso, père de Norma, et Antonio Figueroa est excellent en Flavio, compagnon de Pollione. Kent Nagano, l'OSM (aux vents tous placés à droite) et le Choeur de l'OSM assurent un bon soutien aux chanteurs.

Mais l'ensemble reste d'un niveau assez ordinaire et n'offre rien qui incite à poursuivre l'exercice, surtout dans le présent contexte: les quelque quatre heures que représente le trajet Montréal-Knowlton-Montréal, le stationnement au milieu d'un champ de foin et la lente montée là-haut en autobus jaune, l'impossibilité de trouver un simple sandwich dans un endroit où trois heures de concert étaient prévues. Comme beaucoup d'autres, je suis parti après deux heures de premier acte.

Norma, opéra en deux actes, livret de Felice Romani, musique de Vincenzo Bellini (1831). Festival Bel Canto, Chapiteau de Tibbits Hill, Knowlton, dimanche après-midi. Reprise le dimanche 24 août, à 15h.