La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine s'est aggravée lundi avec l'entrée en vigueur de nouvelles taxes douanières américaines sur 200 milliards de dollars de biens chinois, Pékin dénonçant «les mesures d'intimidation» de Washington.

La dernière salve lancée contre Pékin par un Donald Trump qui fait fi des multiples mises en garde sur les risques pour la croissance mondiale, porte à plus de 250 milliards les marchandises chinoises frappées de nouvelles taxes, soit environ la moitié des exportations chinoises vers les États-Unis.

La Chine devait rétorquer immédiatement avec l'imposition de nouveaux droits de douane punitifs de 5 ou 10% sur des biens américains, représentant 60 milliards de dollars d'importations annuelles en Chine.

Les États-Unis ont «lancé une série de fausses accusations et utilisé les hausses de droits de douane et d'autres mesures d'intimidation économique pour imposer leurs propres intérêts à la Chine au travers de pressions extrêmes», s'est insurgé Pékin lundi.

Washington s'est tourné vers «l'unilatéralisme, le protectionnisme et l'hégémonisme économique» depuis l'arrivée au pouvoir de l'administration Trump et son slogan «L'Amérique d'abord», a accusé le gouvernement chinois.

Donald Trump intime depuis des mois à son partenaire chinois de mettre fin à des pratiques commerciales qu'il juge déloyales. Il déplore en particulier qu'en contrepartie d'un accès au marché chinois, les entreprises américaines soient contraintes de partager avec des partenaires locaux une partie de leur savoir-faire technologique, ce qu'il assimile à du «vol» de propriété intellectuelle.

«La guerre commerciale menée par la Chine contre les États-Unis dure depuis des années», a estimé dimanche Mike Pompeo, secrétaire d'État sur la chaîne Fox News. «Si on veut appeler ça une guerre commerciale, nous sommes déterminés à la gagner», «nous allons la gagner», a-t-il martelé.

«La guerre commerciale, une réalité»

Le président américain avait déjà infligé cet été des taxes de 25% sur 50 milliards de dollars de biens chinois. Et face aux représailles en tout point identiques de Pékin, il a décidé de taxer à 10% 200 milliards de dollars de biens supplémentaires chinois.

Washington taxe en outre depuis mars, au nom de «la sécurité nationale», l'acier et l'aluminium importé à hauteur de 25% et 10%.

«La guerre commerciale est désormais une réalité», a pris acte Brian Coulton, le chef économiste de l'agence de notation financière Fitch.

Rendant la situation plus difficile, le dialogue semble rompu. La visite d'une délégation de négociateurs chinois prévue pour les 27 et 28 septembre à Washington a été annulée par Pékin, a affirmé le Wall Street Journal.

Les mesures protectionnistes américaines ont atteint un niveau tel qu'elles affectent «sensiblement» la perspective de croissance économique mondiale, même si l'expansion reste encore solide, a estimé vendredi l'agence de notation. Elle table désormais sur une croissance économique en Chine de 6,1% cette année, soit 0,2 point de pourcentage en moins qu'anticipé en juin, et une croissance mondiale pour 2019 de 3,1% (-0,1 point).

Avant la publication début octobre de ses prévisions de croissance mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) a prévenu cette semaine que le conflit commercial entre la Chine et les États-Unis pourrait avoir un «impact significatif» sur l'économie des deux premières puissances mondiales et bien au-delà.

La croissance économique dans le monde est «moins équilibrée et moins synchronisée», observe Fitch.

Le Japon, prochaine cible?

L'expansion mondiale est d'autant plus menacée que Donald Trump a engagé un bras de fer commercial avec tous les principaux partenaires des États-Unis.

Pour l'heure, il a signé un armistice fragile avec l'Union européenne et le Mexique, mais son administration mène de délicates négociations avec le Canada.

En outre, le Japon avec lequel les États-Unis accusent un déficit commercial de 56,6 milliards de dollars, semble désormais être dans le viseur du locataire de la Maison-Blanche.

La politique protectionniste de Donald Trump ne suscite pas que les inquiétudes des économistes.

Dans une lettre envoyée récemment à l'administration Trump, le géant de la distribution Walmart a mis en garde sur les conséquences des hausses de prix pour les consommateurs américains: si de nouvelles taxes étaient imposées sur les marchandises chinoises, il pourrait augmenter ses prix sur un large éventail de produits allant de la nourriture (poissons, sauce soja, farine...) aux produits d'hygiène tels que le shampoing ou les détergents.

Ces taxes vont accroître les dépenses des ménages pour ces produits d'usage quotidien, a fait valoir Sarah Thorn, auteure de cette lettre et lobbyiste pour Walmart.

L'inquiétude du monde des affaires est d'autant plus grande que Donald Trump a menacé de taxer encore 267 milliards de dollars de marchandises chinoises si Pékin venait à répliquer aux 200 milliards taxés.