(Québec) Plusieurs parlementaires des quatre partis représentés à l’Assemblée nationale ont exhorté, jeudi, la Commission de la représentation électorale à revenir sur sa décision de fusionner des circonscriptions dans la région de la Gaspésie.

La députée caquiste de Bonaventure, Catherine Blouin, a souligné que la fusion de sa circonscription avec une partie de celle de Gaspé ferait en sorte qu’elle se retrouverait à représenter 57 000 électeurs alors que la moyenne à Montréal se situe plutôt à 50 000.

« Alors nous, pour encore plus de personnes à servir, il faudrait faire sept heures de char. Est-ce que vous trouvez ça normal ? » a-t-elle demandé.

« Est-ce qu’on devrait comprendre avec ça qu’un électeur de la Gaspésie vaut moins qu’un électeur de Montréal ? Je me pose la question », a ajouté la députée.

« Aussi grand qu’un pays »

La proposition de la commission ferait aussi en sorte que l’autre partie de la circonscription de Gaspé serait fusionnée avec celle de Matane-Matapédia, ce qui en augmenterait la superficie.

Le député de ce nouveau comté se retrouverait donc à représenter une cinquantaine de municipalités, estime Maïté Blanchette Vézina, ministre responsable des régions du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine. « Un territoire qui, disons-le, serait aussi grand qu’un pays », a-t-elle affirmé.

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Maïté Blanchette Vézina, ministre responsable des régions du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine

Les deux élues caquistes ont remis en question le déclin de la population de la région qui justifie ce redécoupage électoral. Or, le rapport sommaire de la commission indique que dans « la région du Bas-Saint-Laurent – Gaspésie – Îles-de-la-Madeleine, la faible croissance de la population électorale accentue les écarts par rapport à la moyenne des circonscriptions depuis quelques décennies ».

Le député caquiste de Gaspé, Stéphane Sainte-Croix, s’était quant à lui vêtu de noir pour souligner une « journée préoccupante pour la démocratie de notre nation ».

« Préoccupante pour les régions du Québec et particulièrement préoccupante pour ma Gaspésie », a-t-il dit.

« Notre recommandation est simple, retirez cette proposition de fusion pour la région et favorisez le maintien du statu quo », a ajouté l’élu de Gaspé

« Laissez la Gaspésie tranquille ! »

Le député libéral Enrico Ciccone – qui représente Marquette, dans la région de Montréal – s’est aussi porté à la défense de la région. « J’aimerais que vous receviez tout ce qu’on a à vous dire aujourd’hui et tout ce qui a été dit avant, durant les auditions, comme un cri du cœur », a-t-il dit.

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Enrico Ciccone, député libéral de Marquette

« Je vous demande de reculer. […] Laissez la Gaspésie tranquille ! » a ajouté M. Ciccone.

Le député péquiste de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé, et le député solidaire de Jean-Lesage, Sol Zanetti, ont réaffirmé leur proposition d’augmenter le nombre de députés québécois pour le faire passer de 125 à 129.

« Une mine d’information »

Face au concert de critiques, les membres de la commission présents pour l’étude de leur rapport préliminaire ont assuré avoir l’esprit ouvert et que tous les arguments allaient être pris en considération.

« Depuis le dépôt du rapport préliminaire en septembre 2023, nous avons recueilli une mine d’information qui nous permettra d’approfondir notre réflexion sur notre proposition de notre second rapport », a indiqué le président de la commission, Jean-François Blanchet.

L’étude du rapport préliminaire de la Commission de la représentation électorale s’est terminée jeudi. Son deuxième rapport devrait être déposé à l’automne.

La révision de la carte est effectuée pour que le nombre d’électeurs dans une circonscription ne soit ni supérieur ni inférieur de plus de 25 % à un quotient d’une moyenne déterminée à 50 694 électeurs. Une seule exception : la circonscription des Îles-de-la-Madeleine, protégée dans la loi. La loi prévoit toutefois que la commission peut s’écarter de la règle avec une décision motivée.

Le projet de révision présenté en septembre par la Commission de la représentation électorale fait notamment disparaître deux circonscriptions, en raison de la baisse du nombre d’électeurs : une partie de Bonaventure serait fusionnée avec Gaspé, et dans l’est de Montréal, Rosemont et Anjou–Louis-Riel deviendraient une seule circonscription, Rosemont-Louis-Riel.

Par contre, deux autres circonscriptions verraient le jour : Marie-Lacoste-Gérin-Lajoie, dans le Centre-du-Québec, et Bellefeuille, dans les Laurentides.

La commission détermine les limites des circonscriptions en se fondant sur « des considérations d’ordre démographique, géographique et sociologique, telles que la densité de la population, le taux relatif de croissance de la population, l’accessibilité, la superficie et la configuration de la région, les frontières naturelles du milieu, ainsi que les limites des municipalités », prévoit le texte législatif.