(Québec) Pascal Bérubé ne cache pas sa colère. Retirer une circonscription dans la péninsule gaspésienne aurait pour effet d’augmenter sensiblement le territoire des autres élus de la région et serait ni plus ni moins dangereux. « Ça n’a aucun sens ! », clame-t-il.

Au premier jour mardi d’une commission parlementaire qui entendra cette semaine des députés de toutes les formations politiques venir commenter la proposition d’une mise à jour la carte électorale, le ton était alarmant.

Comme le prévoit la Loi électorale, la Commission de la représentation électorale a présenté, l’automne dernier, une carte électorale révisée, qui serait mise en place pour la prochaine élection générale, en 2026. La proposition retire une circonscription à la Gaspésie et une autre à Montréal. Elle ajoute aussi une circonscription dans les Laurentides et une autre au Centre-du-Québec, afin de tenir compte de la démographie et des mouvements de population.

En Gaspésie, la Commission propose de fusionner les circonscriptions de Gaspé et de Bonaventure. Matane-Matapédia aurait également un pied dans le Bas-Saint-Laurent et l’autre dans la péninsule.

Pour l’actuel député péquiste Pascal Bérubé, cette proposition ne fait « aucun sens ». Il a rappelé que les routes de sa circonscription – l’hiver, entre autres – peuvent être dangereuses. Certains secteurs ne sont pas desservis par une connexion cellulaire. Un député qui souhaiterait être présent pour ses citoyens, dans différentes activités, devrait parcourir des centaines de kilomètres au péril de sa santé.

« On met notre sécurité en jeu sur les routes, notre santé en jeu. […] Ça va devenir intenable si ça se concrétise », a-t-il dit.

« La proposition actuelle […] est inacceptable pour la Gaspésie », a affirmé la députée de Bonaventure, Catherine Blouin.

Faut-il changer la loi ?

Pascal Bérubé a rappelé mardi que le gouvernement pouvait proposer une modification à la Loi électorale afin d’accorder un statut d’exception à la Gaspésie, comme il en existe pour les Îles-de-la-Madeleine. En entrevue au média local MaGaspésie. ca, le député caquiste de Gaspé, Stéphane Sainte-Croix, a également affirmé que Québec pourrait ultimement modifier la loi.

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Le député caquiste de Gaspé, Stéphane Sainte-Croix.

« Ceci dit, c’est un des scénarios potentiels, mais on va compléter le processus administratif. On va faire des représentations qui s’imposent dans la prochaine semaine. On va attendre le dépôt du rapport. En même temps, on va discuter au niveau du caucus de stratégies pour arriver avec la solution la plus pérenne possible pour l’ensemble de la représentativité. Aujourd’hui, on parle de la Gaspésie. Demain, on va parler d’autres régions du Québec », a dit M. Sainte-Croix.

Lors de ses remarques préliminaires en commission parlementaire, mardi, le ministre responsable des Institutions démocratiques, Jean-François Roberge, a toutefois nuancé ces propos.

« Plusieurs appels à modifier la Loi électorale ont été lancés. […] Je les ai entendus, et je les comprends. Cependant, je suis convaincu que nous devons à ce stade-ci aller au bout du processus actuel », a-t-il dit.

« Quoiqu’il advienne, à la fin, il y aura des critiques », a ajouté M. Roberge.

Les députés unis pour la Gaspésie

Dans son mot d’introduction, Pascal Bérubé a également interpellé le président de la Commission de la représentation électorale, Jean-François Blanchet, pour lui rappeler une motion unanime adoptée en octobre dernier au Salon bleu.

Le texte de la motion indique que « toute perte de poids politique que subissent nos régions québécoises met en péril la santé démocratique » et que la commission doit « [réviser] sa recommandation de fusionner les circonscriptions de Gaspé et Bonaventure ». « Je vous trouverais bien téméraire de ne pas en tenir compte », a-t-il dit.

Pour sa part, M. Blanchet a rappelé aux parlementaires que la commission était à l’écoute des critiques formulées par les élus et les citoyens. Elle a notamment tenu au cours des derniers mois des consultations publiques, aux quatre coins du Québec, où plus de 600 personnes ont témoigné.

Au terme de la commission parlementaire, un second rapport sera déposé au parlement, au mois de septembre 2024. Celui-ci tranchera sur les enjeux soulevés depuis le dépôt du rapport préliminaire et établira, dans les semaines suivant son dépôt, la prochaine carte électorale du Québec.

Si la commission ne modifie pas sa proposition initiale, Montréal perdra une fois de plus circonscription – comme c’était le cas lors de la dernière révision de la carte, en 2017 – alors que la circonscription d’Anjou–Louis-Riel sera supprimée et que son territoire sera réparti entre les circonscriptions actuelles de Camille-Laurin, d’Hochelaga-Maisonneuve et de Rosemont, qui deviendrait Rosemont–Louis-Riel.

Au nord de Montréal, dans les Basses-Laurentides, la Commission propose de créer une nouvelle circonscription, Bellefeuille, tout près de Mirabel et de Saint-Jérôme. Dans le Centre-du-Québec, la nouvelle circonscription de Marie-Lacoste–Gérin-Lajoie serait créée près des actuelles circonscriptions de Saint-Hyacinthe et de Drummond–Bois-Francs.