Un responsable du recrutement de l'organisation La Meute a été suspendu du groupe ultranationaliste mardi soir pour s'être joint aux manifestants de la droite radicale américaine samedi dernier lors des violentes manifestations de Charlottesville, en Virginie. Un autre militant québécois d'extrême droite qui se trouvait au coeur des événements samedi dernier se défend d'avoir eu recours à la violence et accuse les contre-manifestants d'avoir été à l'origine des violences.

Au moins trois Québécois ont manifesté samedi dernier aux côtés de suprémacistes blancs et de néonazis américains, à l'invitation d'un leader suprémaciste. Ces événements qui se sont soldés par la mort d'une manifestante antiraciste, happée par James Fields, sympathisant néonazi, ont provoqué une tempête politique aux États-Unis. Dans un reportage de la télé américaine, on peut d'ailleurs voir le Montréalais Vincent Bélanger-Mercure à quelques mètres de James Fields, à l'avant du cortège des manifestants.

Ces militants d'extrême droite québécois apparaissent brièvement dans un épisode viral de Vice News Tonight sur les coulisses du rassemblement. L'un d'eux est Shawn Beauvais-MacDonald, membre important du groupe La Meute, a appris La Presse. Jusqu'à ces événements, Shawn Beauvais-MacDonald était modérateur de la page anglophone du groupe sur Facebook. Les nouvelles recrues devaient lui envoyer une demande formelle pour rejoindre la page privée de l'organisation, qui tiendra d'ailleurs une manifestation sous haute surveillance dimanche à Québec.

Or, Shawn Beauvais-MacDonald a été écarté de La Meute d'un «commun accord» mardi soir, le temps qu'une enquête soit menée sur sa présence en Virginie, a indiqué à La Presse Sylvain Brouillette, porte-parole de La Meute. «Il dit qu'il était présent, mais pas avec un groupe de suprémacistes blancs. Il dit qu'il était tout simplement avec un groupe de patriotes américains qui parlent de politique», soutient Sylvain Brouillette.

Le groupe, qui se targue d'avoir 55 000 membres au Québec, refuse d'être associé à des suprémacistes blancs. «Il a le droit de faire ce qu'il veut, mais on ne veut pas que ça déteigne sur notre groupe. Si notre enquête démontre qu'il était effectivement avec un groupe de suprémacistes blancs, c'est sûr qu'on ne veut pas l'avoir au sein de La Meute», soutient le porte-parole du groupe. La Presse n'a pas été en mesure de joindre Shawn Beauvais-MacDonald hier. Selon Sylvain Brouillette, il aurait «décidé de disparaître de la circulation» en raison des menaces de mort qu'il aurait reçues.

En plein coeur

Casque noir sur la tête, bouclier circulaire à la main, Vincent Bélanger-Mercure était en plein coeur de la manifestation samedi dernier à Charlottesville. Le biologiste de 30 ans avait fait le trajet de 12 heures en solitaire la semaine dernière pour se joindre aux manifestants de la droite radicale américaine à la suite d'un appel lancé sur l'internet par le leader suprémaciste blanc Christopher Cantwell. «Je suis seulement quelqu'un qui est allé assister à une manifestation de manière pacifique. Je me suis mis un casque parce que tu te faisais pitcher des briques. Je suis juste contre le fait qu'on détruise des monuments», s'est-il défendu en entrevue avec La Presse.

Même s'il a croisé des Québécois sur place, dont Shawn Beauvais-MacDonald, Vincent Bélanger-Mercure affirme n'avoir aucun lien avec La Meute ou tout autre groupe ultranationaliste québécois. «J'y suis allé tout seul et je les ai rencontrés là-bas. J'avais vu sur les forums qu'il y aurait d'autres Québécois. Je ne représente personne, sauf moi», assure-t-il.

Vincent Bélanger-Mercure se défend fermement d'avoir participé aux violences samedi dernier. Il condamne d'ailleurs «fortement» ces violences et dénonce le crime commis par James Fields. Il martèle n'avoir aucun lien avec ce militant néonazi maintenant accusé de meurtre, même s'il a marché à ses côtés pendant la manifestation. «Ces gens essaient de m'associer avec ce dude-là parce que sur une image je passe proche de lui!», dénonce-t-il. Néanmoins, le Québécois dit être très conscient qu'il «avait des chances de [s]e faire associer» aux nazis en participant à cette manifestation.

En entrevue, le Québécois déverse son fiel sur les manifestants antiracistes qui s'opposaient à leur rassemblement à Charlottesville. 

«Les antifas [antifascistes], ce sont des fucking déchets de la société ! C'est un groupe terroriste qui devrait être criminalisé», a dit Vincent Bélanger-Mercure.

Reprenant les arguments des ténors de l'«alt-right» américaine, et même du président Donald Trump, Vincent Bélanger-Mercure soutient que les contre-manifestants étaient très violents samedi dernier. «C'est les antifas qui sont venus agresser! C'est eux qui pitchaient de la pisse et de la marde et des morceaux de béton. C'est pour ça qu'on avait des boucliers», explique-t-il.

Bien qu'il se défende d'être un adepte du suprémacisme, Vincent Bélanger-Mercure affirme en entrevue que l'on doit les plus «belles idéologies et les plus belles créations» à des hommes blancs. Bouillant, il s'enflamme en parlant des adeptes de l'extrême gauche, des femmes et des immigrants. «Quand tu es un Blanc et que tu te fais dire par des immigrants pleins de cash que tu devrais avoir honte d'être blanc, et qu'ils te regardent avec de la haine, le bout de la bouche retroussé... Eux, ils te détestent parce que tu es blanc! Eux, ils t'haïssent! Et ils utilisent ta race pour te frapper dessus!», s'emporte-t-il.

PHOTO EDU BAYER, THE NEW YORK TIMES

Vincent Bélanger-Mercure (à gauche) a manifesté samedi dernier aux côtés de suprémacistes blancs et de néonazis américains à Charlottesville.