Mitch Garber est certainement le contribuable le plus imposé du pays. L'homme d'affaires montréalais versera « plus de 100 millions de dollars » aux fiscs canadien et américain, après avoir encaissé « des centaines de millions » à la suite d'une transaction, conclue la semaine dernière.

« La plus grande partie des impôts ira au Québec, puis au Canada, précise-t-il, en entrevue dans ses bureaux de la rue Peel. Il y a très peu de gens dans notre histoire qui ont payé un tel montant. »

Celui qui est connu du grand public pour sa participation à l'émission télévisée Dans l'oeil du dragon sait qu'il a réussi un très grand coup. « Dans une carrière, une telle transaction n'arrive pas deux fois », dit l'homme de 52 ans.

Cet été, un consortium chinois a acheté Playtika pour 4,4 milliards US. M. Garber dirigeait cette division de jeux mobiles sur téléphones portables et sur Facebook.

VIVRE ICI

Du coup, le gestionnaire paiera l'impôt, essentiellement en gains de capital, sur la plus-value réalisée sur ses actions et ses options d'achat.

En 2009, quand il est devenu PDG de l'américaine Caesars Acquisition Company (CAC), il a installé ses bureaux à Montréal.

Mitch Garber a grandi à Hampstead et il est marié à l'avocate Anne-Marie Boucher, fondatrice du cabinet BCF. Ils ont deux fils, Dylan et Ryan. « J'aime le Québec, dit-il. Je veux que nos enfants soient élevés ici. Et je veux payer mes impôts ici. »

En plus de M. Garber, une quarantaine de Canadiens et d'Américains ont gagné des millions avec cette transaction. Du nombre, six travaillent au bureau de Montréal où se trouvent Caesars Acquisition Company et sa filiale Caesars Interactive Entertainment, propriétaires de Playtika. « En fait, plusieurs sont devenus multimillionnaires », précise-t-il.

UN SCÉNARIO DE FILM

La conclusion de la transaction semble sortir tout droit d'un scénario de film.

« Je la raconte pour la première fois, mais je sais que ce ne sera pas la dernière », dit le dragon, encore incrédule.

Jeudi dernier, le hasard fait qu'il participe à l'enregistrement de Tout le monde en parle. « C'était une journée vraiment importante pour moi et il se passait beaucoup de choses, dit-il. Pendant l'émission, j'avais ça en tête. Je me disais qu'on allait conclure la transaction plus tard dans la soirée. »

En raison du décalage horaire avec la Chine, la conférence téléphonique a lieu tout juste après minuit. Et comme si ce n'était pas assez, l'homme d'affaires est en chemin pour se rendre à une fête pour célébrer des amis.

C'est donc au volant de son auto qu'il a conclu la transaction la plus importante de sa vie.

« À l'heure convenue, tout le monde était en ligne, dit-il. Il y avait au moins 25 personnes, y compris des avocats et des comptables. Mais deux minutes plus tard, c'était réglé. » 

Puis, le téléphone sonne de nouveau. Cette fois, c'est un appel FaceTime. « Ça m'a surpris, car je n'en reçois jamais », dit-il. Il se range sur le bord de la route. « C'était le milliardaire Dan Gilbert [Quicken Loans, Cavaliers de Cleveland], qui avait une participation de 10 % dans Playtika. Il venait de faire 400 millions US ! Il était dans un bar de Detroit avec ses partenaires, bières à la main. Ils m'ont chanté Ô Canada pour me remercier. Je ne le croyais pas », dit M. Garber en riant.

LA SUITE

Tout porte à croire que la vente de Playtika a donné un sérieux coup de main à Caesars Entertainment Corporation, aux prises avec des problèmes financiers.

Ce géant du divertissement possède 50 hôtels-casinos dans six pays. Il a annoncé cette semaine qu'il avait conclu une entente de 5 milliards US avec des créanciers.

Ce groupe partage des actionnaires avec Caesars Acquisition Company, mais leurs opérations sont distinctes. La vente de Playtika ne change rien aux activités des autres entités de la filiale montréalaise. Parmi elles, on retrouve le championnat mondial de poker World Series of Poker et six hôtels-casinos à Las Vegas, Baltimore et La Nouvelle-Orléans.

Et quels sont les prochains projets de Mitch Garber ?

« Au cours de la prochaine année, je vais avoir à prendre une décision sur ce que je veux faire », répond-il.

Chose certaine, il pourra passer plus de temps au Cirque du Soleil, dont il est président du conseil. « Je pense qu'on peut tripler sa valeur », avance-t-il.

Il veut aussi investir davantage dans les entreprises israéliennes, comme ce fut le cas pour Playtika.

Et il donnera de son temps, et de ses sous, pour la philanthropie. Il est d'ailleurs coprésident de la campagne 2016 de Centraide du Grand Montréal.