«Chaque jour, 4% des passagers d'Air France-KLM voyagent avec des billets gratuits. C'est comme si nous faisions voler treize Airbus A380 ou quarante A320 avec uniquement des billets prime», explique Patrick Roux, directeur du marketing de la compagnie française.

Les programmes de fidélité des passagers, permettant d'accumuler des «miles» et de voyager gratuitement (hors taxes aéroportuaires et surcharge carburant), sont devenus un outil puissant de la stratégie commerciale des transporteurs aériens qui rivalisent pour séduire les passagers.

En Europe, «Miles & More» de la compagnie allemande Lufthansa revendique la première place avec plus de 19 millions d'adhérents devant «Flying Blue» d'Air France-KLM (18 millions) et «Executive Club» de British Airways (6 millions).

Leur ampleur est telle qu'il y a plus de miles aériens en circulation à travers le monde que de dollars, soulignent les analystes financiers qui peinent pourtant à mesurer leur valeur réelle.

«La valorisation reste difficile compte tenu du peu de transparence sur ce sujet de la part des compagnies aériennes. (...) Nous estimons que le programme de fidélisation d'Air France-KLM représente environ 20% de la capitalisation actuelle» (soit environ 620 millions d'euros) du groupe, avance toutefois Yan Derocles, spécialiste chez Oddo Securities.

Sans dévoiler de chiffres, Air France-KLM comme British Airways et Lufthansa relèvent que ces programmes sont d'autant plus précieux qu'ils reposent sur une connaissance fine de leurs clients.

«Le programme de fidélisation de British Airways permet de sécuriser nos clients et d'en conquérir de nouveaux», résume Gilles Marigliano, directeur des ventes France au sein de la compagnie britannique.

Selon lui, en période de crise et de chute de trafic, Executive Club a «joué à plein son rôle» pour garder les clients.

Lorsque la compagnie lance, en outre, des opérations commerciales -- à l'instar du triplement du nombre de miles sur les Paris-Londres cet été -- cela attire systématiquement de nouveaux clients.

Plébiscité comme meilleur programme de fidélisation, dans une enquête de satisfaction des compagnies aériennes publiée dans le numéro de mai du mensuel Que Choisir, Flying Blue a pourtant durci, depuis l'an passé, sa politique d'attribution des miles.

«Les modifications apportées visaient à être plus en adéquation avec le tarif acquitté, et donc de donner plus de miles aux clients qui paient les tarifs les plus élevés», rétorque Patrick Roux.

«Plus on devient fidèle et actif, plus on gagne des miles, c'est quelque chose d'assumé. Mais dès le premier niveau de tarif, on en gagne aussi», dit-il. Et contrairement aux concurrents, les miles Flying Blue sont valables à vie à condition de consommer un billet tous les vingt mois.

Pour Yan Derocles, les compagnies maîtrisent parfaitement la rétribution des miles. «La limite de ce système est qu'elles ne fidélisent pas tous les clients de la même façon», dit-il, les voyageurs des entreprises internationales étant les principaux bénéficiaires.

Sur le moyen-courrier, les passagers occasionnels sont enfin tentés de se tourner vers les low cost, qui, à défaut de programme de fidélisation, proposent des billets à des prix parfois très inférieurs à ceux pratiqués par les compagnies traditionnelles.

«Un programme de fidélité se doit de proposer par essence le plus d'avantages à ceux et celles qui voyagent le plus. Un passager qui ne vole qu'une fois ou deux fois par an, a en effet peu d'intérêt à participer à ce programme», reconnaît un porte-parole de Lufthansa.