Les grandes compagnies aériennes à bas coût européennes ont le vent en poupe en ces temps de morosité économique, défiant les grands transporteurs traditionnels, comme l'illustrent les dernières performances divergentes d'easyJet et d'Air France-KLM.

Jeudi, la compagnie à rabais britannique a annoncé une envolée de 32 % de son chiffre d'affaires entre octobre et décembre, avec un nombre de passagers en hausse de 10,1 %. Sur la même période, le groupe franco-néerlandais est passé dans le rouge avec une perte d'exploitation de 200 millions d'euros, selon des chiffres diffusés mercredi soir.

«Les grandes compagnies à rabais, telles easyJet et l'irlandaise Ryanair, profitent du fait que les passagers font désormais de plus en plus attention aux prix», observe une analyste sous couvert d'anonymat. Elles attirent le passager à coups de promotion, tout en ouvrant de nouvelles lignes, parfois délaissées par les compagnies classiques.

Tel est le cas pour easyJet en Espagne et en Italie, deux marchés porteurs en Europe. «Ils se sont montrés très agressifs sur les prix et ont gagné des parts de marché», constate la même analyste. D'autant qu'Alitalia, ancienne compagnie publique italienne dans laquelle Air France-KLM vient de prendre une participation, avait réduit son offre pour limiter ses coûts très élevés, notamment à cause de sa flotte obsolète.

Coutumière des campagnes choc, Ryanair avait de son côté lancé une offre avant Noël, proposant durant 12 jours un million de sièges à partir d'un euro pour ses vols de janvier et février. En décembre, le nombre de ses passagers a progressé de 11 %, celui de British Airways a reculé de 4,5 %.

Pour contrer ces offensives sur les prix, Air France-KLM a annoncé mardi qu'elle baisserait ses tarifs dès le 3 février de 2 à 60 euros pour tout vol aller-retour dans l'Hexagone.

Les compagnies à rabais profitent également du souci d'économies des entreprises qui rognent sur les déplacements des hommes d'affaires. Ces passagers, plus lucratifs pour les compagnies aériennes que les touristes car ils sont prêts à payer plus cher, s'avèrent de plus en plus séduits par easyJet.

En outre, victime du ralentissement du commerce mondial, les transporteurs traditionnels voient leur activité cargo se réduire comme peau de chagrin. En décembre, mois traditionnellement dynamique à l'approche de Noël, le transport de marchandises et courrier de Lufthansa a chuté de 21,4 %. Le trafic de British Airways pour le seul fret a dégringolé de 14,3 %, celui d'Air France-KLM de 20,4 %.

Des déboires que ne connaissent pas les compagnies à rabais, puisque le fret n'est pas leur métier. Présentes sur le moyen-courrier avec de petits avions, elles ne desservent pas les grandes routes commerciales reliant l'Europe à l'Asie ou l'Amérique.

Elles profitent aussi d'un pétrole moins cher qu'avant car elles pratiquent très peu les «couvertures» sur le carburant (une compagnie achète le kérosène à un prix fixé à l'avance pour se prémunir des hausses), contrairement aux transporteurs traditionnels, comme Air France-KLM qui a ainsi payé son kérosène à un prix plus élevé qu'il ne l'est actuellement.

L'avenir reste cependant incertain pour tous: jeudi, easyJet a «maintenu sa prévision d'être bénéficiaire sur l'ensemble de son exercice» mais «aux taux de changes et prix de carburant actuels».

Et mercredi, Air France-KLM a dit vouloir dégager un résultat d'exploitation annuel positif «mais dont le niveau dépendra de la situation économique».