Le Triathlon international de Montréal se tiendra les 25 et 26 août, dans le Vieux-Port. Ce sport peut sembler intimidant en raison de sa grande intensité, mais ses adeptes le considèrent comme plus accessible qu'il ne semble l'être. D'ailleurs, la liste des participants de la prochaine épreuve offre un éventail de profils d'athlètes très varié. En voici quatre.

Retour en force

Yvon Robichaud, 73 ans (il est un des participants les plus âgés du Triathlon de Montréal)

Expérience: Yvon a commencé le triathlon en 2016. À la fin de la saison 2018, il aura participé à dix triathlons en deux ans seulement.

L'ancien marathonien

Yvon Robichaud a toujours pratiqué la course à pied. Il a notamment couru le tout premier marathon de Montréal, en 1979. «Je venais de me marier, et j'étais vraiment en forme. À cette époque, ça allait bien, quand je partais à courir, je n'étais plus capable de m'arrêter!», raconte-t-il. En guise d'entraînement, il faisait le même trajet que le célèbre marathonien Gérard Côté, c'est-à-dire un parcours de Granby à Saint-Hyacinthe qui offrait un terrain plat et une jolie vue. Au sommet de sa forme, Yvon Robichaud a ainsi participé à tous les marathons de Montréal, jusqu'à la cessation de l'épreuve montréalaise, en 1990. La fin de l'événement a aussi marqué celle d'Yvon, dont les genoux ne suivaient plus la parade en raison d'arthrose sévère. Il a alors mis fin à toute activité sportive pendant plus de 20 ans.

Retrouver la passion

À 55 ans, la femme d'Yvon Robichaud a reçu un diagnostic précoce de la maladie d'Alzheimer. Pour le couple marié depuis près de 40 ans, c'est un choc. Yvon devient aidant naturel. Il est à temps plein auprès de sa femme, jusqu'au moment où elle doit être placée dans un foyer de longue durée. À la même période, il subit une opération importante à un genou qui le rend complètement inactif pendant une certaine période. Il sent alors le besoin de se refaire une santé physique et mentale. «J'avais pris 40 lb, et ça n'allait pas bien dans ma vie. Je me suis dit qu'il fallait que je fasse quelque chose. Puis, j'ai rencontré des gens qui avaient subi la même opération que moi, et qui venaient de se remettre au ski alpin. Ça m'a donné envie de recommencer à bouger, alors je me suis remis à la course, et je me suis rendu compte que j'étais en masse capable de courir.»

La découverte du triathlon

C'est en 2016 qu'Yvon découvre le triathlon sprint. Cette discipline lui convient très bien, car elle jumelle la course à deux autres sports, en plus d'offrir des distances réduites, ce qui allège l'impact sur ses genoux. «En natation, je n'ai aucun problème. Je ne nage plus comme quand j'avais 30 ans, mais je peux encore me débrouiller, et en vélo aussi. Mais la course est plus difficile. J'ai développé une façon de courir sur le bout des pieds qui ressemble à de la marche rapide.Ça me prend le double du temps, mais ça fonctionne», explique-t-il. À l'été 2016, il participe à sa première épreuve de triathlon. À l'été 2017, il participe à quatre compétitions. Et cette année, il est inscrit à cinq épreuves, dont celle de Montréal. «Ça a l'air gros comme ça, cinq triathlons, mais ce n'est pas si pire que ça. Selon mon expérience, il n'y a rien de pire qu'un marathon! Ce que j'aime aussi, c'est que ça me permet de voyager et de voir le Québec.»

L'entraînement

Tous les matins, en se levant, l'athlète de 73 ans monte sur son vélo stationnaire. «Je m'installe et je pédale le temps de lire ma Presse+, de faire mes mots croisés et mon sudoku. Ensuite, je cours 5 km sur mon tapis roulant. Au total, ça me prend environ une heure et demie. Pour la natation, je vais à la piscine une fois par semaine et je nage 1 km. Je ne fais pas de très longues distances. Mon secret, c'est plutôt d'en faire un peu chaque jour. Je ne fais pas d'intervalles non plus à cause de mon genou, précise-t-il. Tous les matins en me levant, je vis la même chose: les cinq premières minutes, j'ai toujours envie de lâcher. Mais c'était la même chose quand je faisais de la course à pied. On a envie de tout abandonner au début, mais à un moment donné, ça se replace, et là on se sent bien.»

L'avenir

Yvon Robichaud a de la difficulté à se projeter dans un avenir sans triathlon. «Je n'ai aucune idée quand je vais arrêter. Je n'ai pas pensé à ça encore. Ça occupe beaucoup de place dans ma vie, alors c'est bien important pour moi actuellement. C'est ce qui m'a permis de me sortir de mon marasme», reconnaît-il. Il aime chaque moment d'activité physique, que ce soit en entraînement ou en compétition. «Je n'ai aucune médaille d'or à gagner. La seule personne que j'ai à battre, c'est moi-même.» Il ne cache pas que sa regrettée femme demeure une grande motivation pour lui. «Quand je faisais des marathons, ma femme m'attendait toujours au fil d'arrivée. Encore aujourd'hui, quand je traverse le fil d'arrivée d'un triathlon, je vois encore ma femme.»

Le virus

Jacinthe Boulanger, 40 ans

Expérience: Jacinthe a commencé à faire du sport il y a à peine six ans et elle a réussi, à ce jour, une quinzaine de triathlons.

Le rythme de vie de Jacinthe Boulanger n'a pas toujours été celui d'une sportive, loin de là. Sa passion pour le sport est plutôt récente. Mais parce qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire, elle a su rattraper le temps perdu et fait maintenant de l'activité physique sa priorité.

«La vérité, c'est que j'ai toujours été joufflue. Et après ma deuxième grossesse, je pesais plus de 200 lb. Je ne me trouvais pas à mon goût du tout, alors j'ai décidé de me mettre à la course à pied en 2013», raconte Jacinthe. Comme elle est insatisfaite de la vitesse de sa progression, on lui suggère de faire des intervalles, en plus de courir de plus longues distances. Un peu plus tard, elle se donne comme objectif de courir un demi-marathon, chose qu'elle a accomplie pour la première fois en 2014. Elle a répété l'expérience la même année, mais ce deuxième événement s'est avéré moins heureux que le premier. «Ça n'a pas très bien été. J'en ai marché des bouts parce que j'avais trop mal aux genoux. Et c'était toujours comme ça, même à l'entraînement. J'étais toujours blessée», se remémore-t-elle.

C'est à ce moment qu'un entraîneur lui a recommandé de se mettre au triathlon. «Le problème, c'est que je ne me voyais vraiment pas aller nager à 20 h les soirs de semaine avec des enfants. Je ne pensais pas avoir le temps de faire ce sport. Il m'a dit: "Fais-moi confiance", alors j'ai finalement embarqué, et j'ai vraiment eu la piqûre», indique Mme Boulanger.

«Comme je n'ai pas le corps de l'emploi pour faire de la course, le triathlon est une meilleure option pour moi. D'ailleurs, je réussis à maintenir un poids santé depuis que j'en fais.»

Ce sera le quatrième été de compétition de Jacinthe Boulanger, qui compte maintenant une quinzaine de triathlons à son actif. Elle se sent non seulement plus en forme que jamais, mais la nouvelle athlète réussit aussi très bien à concilier ses entraînements avec sa vie professionnelle et familiale. «Au début, c'était plus difficile, parce que j'allais toujours m'entraîner quand les enfants étaient couchés. Maintenant, mes journées commencent tôt, c'est ce qui me permet de mieux organiser mon horaire. À 6 h, je suis au travail, donc je finis plus tôt et c'est ce qui me permet de m'entraîner entre 16 h et 17 h 30. Je pense que le secret, c'est d'être bien organisée», explique-t-elle, reconnaissante de l'appui de son conjoint dans sa démarche.

Son entraînement totalise environ cinq séances par semaine, parfois six en période estivale. Les séances alternent entre la natation, le vélo et la course. Elle est supervisée par un entraîneur qui lui soumet un plan en fonction des compétitions à venir. À force de voir sa mère se donner corps et âme à sa nouvelle discipline, le fils de 7 ans de Jacinthe a attrapé à son tour le virus du triathlon. Après avoir participé à sa première compétition l'an dernier, il récidivera cette année avec deux ou trois épreuves durant l'été.

Motivée par le goût de vivre

Jacinthe vit son quotidien avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Elle est atteinte d'une malformation artério-veineuse au cerveau qui menace de se transformer en hémorragie à tout instant, comme cela s'est produit quand elle avait 25 ans. Déjà opérée sans succès à cinq reprises dans le passé, elle tentera sa chance une sixième et dernière fois l'automne prochain. «Là, je leur ai dit que c'était leur dernière chance. C'est une opération très risquée, mais je risque autant en me faisant opérer qu'en ne le faisant pas, car s'ils ne m'opèrent pas, j'ai un risque de faire une autre hémorragie», résume-t-elle.

Les triathlons auxquels elle est inscrite prennent donc un tout autre sens pour Jacinthe, qui profitera plus que jamais de chaque instant. «Chaque fois que je vais faire mon dernier tour de course, c'est exactement ça qui va me motiver. Même chose chaque fois que je vais traverser un moment difficile, je vais me rattacher à ça, parce qu'on ne sait jamais ce qui va arriver», philosophe-t-elle. Sans savoir exactement ce que représente la convalescence après cette opération importante, Jacinthe Boulanger s'est déjà promis un retour rapide à ses habitudes actives. «Ne pas bouger, comme je le faisais avant, ce n'est plus une option pour moi. C'est rendu que j'ai de la misère à regarder la télé maintenant. J'ai besoin que ça bouge et de me sentir vivante. Mon message est classique, mais tellement important, c'est de profiter de la vie. Quand tu es capable de bouger et d'avancer, c'est ça qui compte.»

Photo André Pichette, La Presse

Jacinthe Boulanger

L'énergie de la jeunesse

Nathan D'Argenzio, 11 ans

Expérience: Nathan n'a que 11 ans, et déjà, il aura près de 10 épreuves de triathlon à son actif à la fin de l'été.

Nathan est un garçon très actif. Il a déjà fait du judo, du soccer et de la natation. C'est quand il a vu son père faire du triathlon qu'il a eu envie d'essayer, lui aussi. «Dès qu'il est question de sport, il souhaite toujours embarquer. Alors quand il a vu son père, ça n'a pas été long, il a dit: "Go, j'embarque"», raconte sa mère, Véronique Ouellet. Le jeune sportif s'est donc lancé dans sa première compétition à l'âge de 9 ans et depuis, c'est le seul sport qu'il pratique.

Selon sa mère, le triathlon est le sport idéal pour Nathan, qui maîtrisait déjà la course, le vélo et la natation. «J'aime beaucoup dépenser mon énergie dans des choses que j'aime faire. J'aime les trois sports qu'il y a dans le triathlon et j'aime beaucoup l'excitation le jour des compétitions. J'aime aussi avoir une médaille à la fin de la course», explique Nathan.

Nathan est dans la catégorie pour enfants U-11. Lors de sa première compétition, ses parents étaient évidemment sur place et tout s'est très bien déroulé. «Quand j'arrive à la compétition, je me prépare et on commence par la piscine. On attend le départ et on y va! Au départ, je suis stressé, mais pendant la compétition, je suis vraiment concentré sur ce que j'ai à faire», affirme Nathan.

Le triathlon nécessite une grande préparation physique. Nathan s'est donc joint à un club où des entraînements ont lieu presque tous les jours. Lundi: vélo éducatif, mardi: course à pied sur piste, jeudi: transition entre vélo et course, samedi: activité en famille, puis le dimanche: natation. «Avec le club, on pourrait en faire tous les jours. Mais comme pour nous, l'école demeure la priorité, on a mis des pauses, parce que sinon, ça n'arrêterait jamais», souligne Véronique.

La mère de Nathan dit avoir observé une grande amélioration chez son fils, ainsi que chez les autres enfants qui s'entraînent. «Ça paraît! Les exercices éducatifs sont très bénéfiques sur leur force, on le voit», remarque-t-elle. Nathan admet que, par moments, il n'a pas envie d'aller à l'entraînement. «C'est surtout l'hiver, le vendredi soir, que l'énergie est moins là. Mais dans ce temps-là, on n'y va pas. Ça ne sert à rien de pousser si ça ne lui dit pas», dit sa mère.

Si l'entraînement s'avère une nécessité pour continuer à s'améliorer, le triathlon demeure un loisir pour Nathan, et remporter la course n'a que très peu de valeur à ses yeux. «Ça ne me dérange pas de ne pas gagner. C'est pour le plaisir», dit-il. Et sa mère le confirme en ajoutant que pour eux, le triathlon est une activité familiale avant tout: «Nous, c'est dans la famille, on fait tous la même activité ensemble, alors on a du plaisir ensemble et ça enlève l'effet de stress.»

Le triathlon est un sport généralement associé à la performance, qui n'est pas encore très populaire auprès des enfants. Pour Véronique, cela dépend de l'approche et surtout du club. «Pour Nathan, c'est ludique parce que les trois sports sont agréables à la base. Aussi, le club dans lequel on est [Club Hippocampe] a une ambiance très familiale. Certains membres sont beaucoup plus performants, mais c'est un club où chacun trouve sa place», nuance-t-elle.

«Nathan a toujours été un enfant qui avait besoin de faire du sport pour se sentir bien. Quand on voit que la tension monte, on l'envoie faire une couple de tours, rigole sa mère. Je pense que Nathan est heureux dans tout ça. Si on voit que ça ne lui tente plus, on va arrêter. Ce n'est pas une fin en soi, on ne rêve pas aux Jeux olympiques! Le but derrière tout ça, c'est vraiment le plaisir, et de se sentir heureux dans ce qu'on fait.»

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, LA PRESSE

Nathan D'Argenzio

État d'esprit

Jessika Royea, 27 ans

Expérience: Après une première expérience lors d'un triathlon sprint l'an dernier, Jessika participera cette année à son tout premier triathlon «standard» à vie.

Comment est née votre passion pour le triathlon?

Je faisais beaucoup de natation avec une copine du travail. Elle m'a proposé de m'entraîner le soir avec elle. Comme on habite tout près du mont Royal toutes les deux, on pouvait aller courir sur la montagne et dans les alentours. Le but au départ était vraiment juste de se mettre en forme et d'avoir une activité à faire ensemble. Mais plus le temps passait, plus nos objectifs augmentaient.

Quels étaient ces objectifs et comment en êtes-vous venues à faire de la compétition?

On a eu l'idée de faire un triathlon sprint pour commencer. On aimait le défi, et on voulait voir si on allait être capables de le terminer. Comme c'était le cas, on s'est fixé un nouvel objectif, celui de le terminer en moins de 2 h. Puis finalement, pour cette année, on a décidé de s'inscrire au triathlon standard.

À quoi ont ressemblé vos résultats jusqu'ici ? En étiez-vous satisfaite?

J'ai terminé le triathlon sprint l'an dernier en environ 1 h 35 min. J'étais contente de mon temps, parce que c'était la première fois que je le faisais, et parce que notre but au départ était seulement de réussir à le terminer. Mais maintenant, notre but est de se pousser pour faire un meilleur temps. J'ai quand même décidé de travailler sur mes faiblesses pour faire encore mieux.

Avant de vous lancer dans le triathlon, aviez-vous un passé de sportive?

Oui, j'ai toujours fait du sport. J'ai fait de la natation, du soccer et du ski, mais c'était vraiment plus pour m'amuser. J'ai presque toujours fait du sport avec mon père. C'est un grand sportif et il a toujours été ma motivation pour faire ce genre de choses. D'ailleurs, récemment, on a fait une course à obstacles ensemble. Je suis aussi une grande passionnée de randonnée, de kayak et d'escalade. Mais toutes ces activités ont toujours été faites dans un contexte récréatif. Cette fois, j'avais envie de faire une activité qui allait mener à quelque chose de concret.

À quoi ressemble votre entraînement?

Je m'entraîne entre une heure et une heure et demie par jour, à raison de trois à quatre séances par semaine. Je commence par une course ou une randonnée de vélo tôt le matin avant d'aller travailler. Je fais la natation le soir, parfois la même journée, parfois le lendemain, car je fais fonctionner mon horaire d'entraînement selon mon horaire de travail. Comme je suis étudiante en quatrième année au doctorat en neuroscience à McGill, quand je fais une journée de 16 heures dans le laboratoire, ça va au lendemain pour l'entraînement. Je réussis à trouver l'équilibre pour faire les deux. Je me lève plus tôt qu'avant, c'est certain. Mais se lever plus tôt pour faire de l'exercice, je trouve ça logique, car toute ma journée est plus productive par la suite.

Vous attendiez-vous à cela quand vous vous êtes lancée dans le triathlon?

Bien franchement, auparavant, je n'aurais pas pensé pouvoir mettre une telle charge d'entraînement dans mon horaire. Mais maintenant, c'est devenu une priorité, même plus, c'est rendu un état d'esprit. Je réalise que si je ne le fais pas, je risque de régresser. Donc, je continue à ce rythme pour être capable d'atteindre mon but. Je suis une fille très compétitive, c'est ce qui me motive intérieurement. Je sais très bien que c'est le travail que j'y mets qui va me permettre d'y arriver ou non. C'est la même façon de penser que j'applique dans mon doctorat.

Qu'aimez-vous du triathlon?

Le triathlon est clairement mon nouveau sport. Non seulement j'aime ça, mais en plus, comme il y a trois sports différents, il y en a toujours un que je peux faire avec des amis. Cette année, je fais seulement l'épreuve de Montréal et je vais évaluer comment ça se passe afin de savoir si j'en fais plus d'un l'an prochain. Pour atteindre la bonne condition physique que ça requiert, je me suis préparé un entraînement spécifique. Et maintenant, je ne suis plus capable de m'en passer. Je ne me tanne jamais!

Photo IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Jessika Royea