Devant nos yeux, le bleu du fleuve Saint-Laurent file jusqu'au pont Jacques-Cartier. Sous nos pieds nus, il n'y a qu'une vaste planche de surf, qu'on manie tant bien que mal avec une grande pagaie. Heureusement, Sophie-Christine Brideau, fondatrice de Waves, une entreprise offrant des cours et des planches à pagaie (stand-up paddle board ou SUP ou paddle, en anglais) sur la Rive-Sud, n'est pas loin.

«La planche de SUP est beaucoup plus longue et plus stable qu'une planche de surf, indique la jeune femme de 23 ans. Après 20 minutes d'initiation, on est debout et on rame. C'est plus rapide qu'apprendre le surf!»

On tombe souvent? «Non, à moins d'essayer plusieurs manoeuvres», répond l'instructrice... qui s'est elle-même retrouvée à l'eau sans l'avoir prévu lors de notre initiation. «J'ai regardé derrière trop vite», a-t-elle constaté en riant. À sa défense, sa planche - sans aileron - était moins stable que celles de ses élèves.

C'est après un seul essai de planche à pagaie que Mme Brideau est tombée - au sens figuré, cette fois - amoureuse de ce nouveau type d'embarcation.

«Je ne suis pas une très grande sportive. Je n'aime pas aller super vite, je préfère le yoga et la natation. Quand j'ai découvert le SUP, j'ai trouvé ça super relaxant.»

Des planches conçues au Québec

Technologue en génie civil de formation, Mme Brideau s'est mise à magasiner une planche, avant de décider de dessiner les siennes, qui sont aujourd'hui fabriquées en Asie. Des planches gonflables, faites de laine synthétique et de trois couches de polychlorure de vinyle (PVC), vendues de 750 à 950 $ pièce, ce qui inclut un sac de transport, une pagaie, un cordon de sécurité et une pompe. Oui, une pompe, car il s'agit de planches que l'on gonfle à destination, en cinq minutes environ, à une pression de 11 à 23 PSI, si bien qu'elles sont étonnamment rigides.

«Le marché du surf, en incluant le paddle, gagne en popularité, souligne Mme Brideau, instructrice certifiée par Pagaie Canada. Il rattrape celui du kayak et du canot.» Pour mieux faire connaître la planche à pagaie, Waves offre des cours et des balades à Varennes, Longueuil et Boucherville.

Vue sans entrave

C'est à l'île Charron, juste au sud des îles de Boucherville, que La Presse a pu tenter l'expérience. Vêtu d'une veste de flottaison (exigée par Transports Canada, qui considère qu'une planche à pagaie sur laquelle on se tient debout est un «moyen de navigation» comme un autre), une lanière de sécurité reliant notre cheville à la planche, on s'élance sur les eaux, d'abord à genoux, avant d'oser se lever. La pagaie - ajustable - est réglée pour mesurer 20 cm de plus que la personne qui la manie.

«On essaie de pousser avec la main du haut et de tirer avec la main du bas, conseille Mme Brideau. On veut faire travailler les muscles du dos, au lieu de ceux des bras et des épaules, qui sont moins puissants.» L'instructrice laisse les élèves assez libres d'expérimenter, conseillant aux plus hardis de reculer sur leur planche, pour aller plus vite. Une fois la nervosité envolée, c'est relativement facile. Sans entrave, la vue qui s'offre au pagayeur, qui a quasiment l'impression de marcher sur l'eau, vaut à elle seule le prix du cours (35 $).

Noah et Loïc Boucher-Dubuc, deux frères âgés de 10 et 13 ans, apprécient cette nouvelle discipline. «J'aime aller vite et être en équilibre», dit Noah, qui suivait son deuxième cours donné par Waves. Ce qui plaît à son aîné? «La sensation qu'on pourrait aller à Montréal et revenir», s'exclame-t-il.

Traverser le fleuve jusqu'à Montréal est ambitieux, à moins d'avoir l'équilibre d'un yogi et le coup de pagaie de Caroline Brunet. Mais avis aux amateurs de sensations fortes: Waves offre des balades permettant d'admirer les feux d'artifice de La Ronde sur des planches à pagaie, à partir du parc Marie-Victorin de Longueuil.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE